Les catholiques poignardés dans le dos !
publié dans regards sur le monde le 8 juin 2013
Loi Taubira :
Les catholiques poignardés dans le dos !
Appel à la révocation du Conseil Famille et Société de la Conférence des Évêques de France
Mgr Georges Pontier
Président de la Conférence des Évêques de France
106, rue du Bac
Paris 75007
Excellence,
Suite à la publication par le Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques de France d’un scandaleux document intitulé « Poursuivons le dialogue – Perspectives après le vote de la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe », nous vous adressons respectueusement la demande de convoquer une réunion extraordinaire de la CEF, dont vous êtes le Président depuis le mois d’avril, pour révoquer le mandat dudit Conseil Famille et Société et élire des membres qui soient en phase avec les enseignements de l’Église et les sentiments de l’immense majorité des fidèles.
Il est inacceptable que devant une loi illégitime qui contredit la raison et nie la nature, les membres de cet organisme de la CEF puissent parler d’une supposée « complexité du jugement éthique en situation pluraliste ».
Il est inacceptable que les membres de cet organisme de la CEF puissent appeler à « dépasser » les oppositions manifestées au cours du débat en présentant à parité égale les arguments pour et contre la loi, les désignant comme « différents aspects qui semblent s’opposer » et des « malentendus entre différents points de vue ».
Il est inacceptable que les membres de cet organisme épiscopal ne trouvent pas incongru, dans le contexte d’une discussion cruciale sur la famille, que de nombreuses personnes — parmi lesquelles des catholiques bien sûr — « se sent[ai]ent tiraillés entre la volonté de donner tout son sens au mariage basé sur l’altérité des sexes et la volonté de ne pas rejeter des personnes homosexuelles », ces dernières prétendant à tous les avantages du mariage, dont l’adoption d’enfants !
Il est inacceptable qu’après le rejet massif et sonore du contrat d’union civile pour les homosexuels par de centaines de milliers de manifestants le 26 mai dernier, les membres de cet organisme épiscopal puissent déplorer que « les contre-propositions cherchant à concilier les deux aspects n’[aient] pas reçu d´écho politique ».
Il est inacceptable que les membres de cet organisme épiscopal puissent renforcer la campagne médiatique du lobby LGBT contre les opposants à la dénaturation du mariage en affirmant : « l’homophobie existe toujours dans la société et dans nos communautés catholiques » ; et : « une homophobie, jusque-là latente, s’est exprimée au grand jour avec une violence surtout verbale mais dans quelques cas aussi physique ».
Il est inacceptable qu’au moment où l’on est sur le point d’imposer à nos enfants l’idéologie du genre, négatrice de l’altérité sexuelle, les membres de cet organisme épiscopal puissent, sous le prétexte d’honorer la valeur de l’amitié et des relations interpersonnelles, considérer le fait de briser la chasteté dans les amitiés homosexuelles comme « ne dévaloris[ant] pas cette expérience » (sic !) ; inacceptable aussi de considérer que « ceux et celles qui vivent un tel lien d’amitié témoignent volontiers de la richesse qu’il représente et de l’importance qu’il revêt dans leur vie » (sic !).
Non. L’accueil véritable des personnes homosexuelles ne passe pas par le silence sur les Écritures, qui qualifient les actes d’homosexualité de « dépravation grave », ni par l’exaltation d’une tendance sexuelle objectivement désordonnée (Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 2358).
Et encore moins par l’exaltation d’une amitié homosexuelle qui comporterait « une ouverture sur les autres » et aurait « une véritable fécondité sociale », pouvant ainsi « témoigner d’une fécondité d’un autre ordre que l’engendrement » comme le font « les personnes vivant dans le célibat consacré » (sic et resic !).
Il fallait l’oser : évoquer côte à côte les vierges du Seigneur et des couples de même sexe qui « déshonorent eux-mêmes leur corps » par des « rapports contre nature » (Rom 1, 24-27) sans que cela ne dévalorise leur relation ! Saint Paul doit se retourner dans sa tombe…
Excellence, la réforme de civilisation que l’on veut nous imposer exige des catholiques la seule attitude de résistance cohérente avec leur foi : « On ne lâche rien. Jamais ! »
Affirmer dans un document officiel « c’est une preuve de maturité démocratique que d’accepter sans violence que son propre point de vue ne soit pas retenu », est-ce favoriser cette salutaire résistance à l’arbitraire, ou n’est-ce pas plutôt un appel à la démission ?
La violence, disent-ils ? Qu’ils aillent demander à la « génération garde à vue ». Elle saura témoigner de quel côté elle s’est déchaînée, cette violence…
Quant à l’invitation à une lâche acceptation du fait accompli, les membres du Conseil Famille et Société de la CEF sont en total décalage avec les fidèles de la base qui, eux, sont disposés à mener le combat jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à l’abrogation pure et simple de la loi Taubira.
C’est pourquoi nous résisterons à cette injonction épiscopale à pratiquer un dialogue de sourds avec un gouvernement qui méprise la religion et la simple raison, et qui envoie ses sbires pour maltraiter des « veilleurs » et autres manifestants pacifiques. Résistance pacifique, mais résistance : celle qui nous est permise par le droit de l’Église, le droit naturel et la loi civile.
C’est aussi pourquoi nous vous prions instamment que les membres du Conseil Famille et Société soient révoqués par la Conférence des Évêques de France et remplacés par des personnalités qui ne craignent pas de témoigner de la vraie foi catholique et de sa morale, et qui ne cèdent pas à la pression médiatique du lobby homosexuel.
Dans cette attente, nous renouvelons tout notre attachement à l’Église et aux valeurs non négociables de celle-ci, ainsi que notre fidélité au Magistère à travers nos Pasteurs légitimes. C’est dans cet esprit filial que nous vous prions de croire, Monseigneur, à l’assurance de nos sentiments respectueux et dévoués
Pour toute demande d’information au sujet de cet appel et de la garantie de confidentialité, merci de nous envoyer un message à l’adresse suivante : contact@avenirdelaculture.fr
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Voici le document en question:
Poursuivons le dialogue !
Perspectives du Conseil famille et société de la Conférence des évêques de France après le vote de la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe.
Dans sa note, le Conseil Famille et société avait choisi de se placer sur le terrain juridique et anthropologique pour favoriser le dialogue avec le plus grand nombre de personnes possible. Il y donnait un éclairage sur les raisons qui pouvaient conduire à réclamer cette transformation du mariage civil. Il y expliquait aussi pourquoi cette transformation du mariage lui semblait une réponse inadéquate à la demande de reconnaissance des personnes de même sexe. Il invitait le législateur à ne pas se laisser enfermer dans une querelle de droits individuels, mais à chercher à protéger le bien commun. Il soulignait enfin que le mariage était une institution. Non réductible à l’amour entre deux personnes, elle instaurait pour la société un lien entre l’amour fidèle d’un homme et d’une femme et la naissance d’un enfant. Cette institution signifiait à tous que la vie est un don, que les deux sexes sont égaux et indispensables à la vie et que la lisibilité de la filiation est essentielle pour l’enfant.
Cet ensemble constituait bien l’enjeu de la réforme et pas uniquement la question de l’égalité de traitement entre les couples de même sexe et les autres. C’est en raison de l’ampleur de ces enjeux pour l’ensemble de la société que le texte publié en septembre 2012 demandait que soit ouvert un large débat. Il offrait aussi aux catholiques des éléments de discernement pour y participer. De nombreuses communautés catholiques s’y sont référées pour organiser des rencontres. Entre temps le projet de loi a été examiné par l’Assemblée nationale et par le Sénat pour être finalement adopté en seconde lecture, le 23 avril 2013 par l’Assemblée nationale, dans une version proche de la proposition initiale du gouvernement ouvrant le mariage et l’adoption plénière aux couples de même sexe. Après validation par le Conseil constitutionnel, la loi a été promulguée par le Président de la République le 18 mai 2013.
Ainsi, en forçant quelque peu le trait, certains estiment que la réforme ne modifie en rien le mariage quand celui-ci reconnaît l’amour entre deux êtres, alors que d’autres pensent qu’elle vide le mariage de sa substance lorsque celui-ci fait fi de la différence sexuelle. Certains analysent la réforme comme un progrès à l’égard de l’égalité des droits, d’autres craignent l’effondrement de la société incapable de reconnaître la différence comme mode d’identification humaine. Certains dénient à l’Eglise le droit d’intervenir dans les questions de société, d’autres auraient voulu qu’elle soit à la pointe du combat politique. Certains invoquent l’amour miséricordieux de Dieu pour plaider en faveur de la loi, d’autres invoquent l’amour créateur de Dieu pour s’y opposer. Certains estiment que le débat politique a été escamoté, d’autres estiment que le débat à l’intérieur de l’Eglise a été escamoté. Comment dépasser de telles oppositions ?
Mais, au-delà de la question de la formulation politique du projet de réforme, ces clivages, vécus douloureusement à l’intérieur des personnes comme à l’intérieur des communautés chrétiennes, sont aussi révélateurs de la complexité du jugement éthique en situation pluraliste et invitent à approfondir notre réflexion. Ils signalent que le jugement éthique lui- même est devenu pluraliste. Chacun invoque sa conscience et on ne saisit plus s’il existe encore des fondements communs pour se prononcer sur ces grandes questions où l’avenir de l’homme se dessine. Ainsi assiste-t-on à l’émergence troublante de nouvelles manières de juger les situations. Dépendantes des émotions, de la narration ou du ressenti individuel, elles laissent peu de place aux arguments de raison. Cette donnée de fait doit être prise en compte par quiconque veut pratiquer le dialogue : il lui faut aussi prendre en compte l’histoire personnelle de chacun et tenter de l’y rejoindre, ce qui signifie aussi d’assumer sa propre histoire.
Cette complexité du jugement éthique dans une société pluraliste et sécularisée n’empêche pas, d’une part, de tirer les enseignements positifs de ce temps de débat et, d’autre part, de formuler des pistes de réflexion pour approfondir le dialogue.
1. Les enseignements positifs de ce temps de débat
1.1 Vivre l’exigence démocratique
Respecter la laïcité La laïcité de l’Etat, telle qu’elle s’est approfondie en France depuis la loi de 1905 qui en définit les règles, ne fait pas obstacle à une expression des religions dans le débat public. La laïcité de l’Etat n’implique pas une laïcité de la société. La laïcité accueille dans l’espace public les opinions et contributions à la recherche de l’intérêt général, exprimées au nom d’une conviction religieuse ou spirituelle, car elle reconnaît la richesse du pluralisme. L’Eglise, comme toute association, peut faire entendre ses arguments ; les catholiques, comme tous les citoyens, peuvent prendre la parole. Bien sûr, il ne peut être question d’imposer la foi ou un point de vue religieux. La participation des catholiques au débat public se fait à partir d’une vision de l’homme qui trouve sa source dans la raison éclairée par la foi chrétienne.
Assumer une position minoritaire Les catholiques prennent aujourd’hui conscience que cette vision n’est plus ni connue ni partagée par tous. Même lorsqu’elle est partagée, les conséquences politiques à en tirer peuvent diverger. A l’intérieur de la communauté catholique ces divergences ne mettent pas en danger l’unité ecclésiale, pas plus que l’issue d’un vote démocratique ne rejette les catholiques en dehors de la communauté nationale. Lors de sa dernière assemblée plénière, par la voix de son président, la Conférence des Evêques de France s’est exprimée sur la situation créée par l’adoption du projet de loi et sur sa portée au regard de la cohésion nationale. Elle a aussi invité les catholiques à se comporter comme citoyens, assumant une position minoritaire en démocratie.
C’est une preuve de maturité démocratique que d’accepter sans violence que son propre point de vue ne soit pas retenu. C’est une preuve de maturité sociale que de reconnaître que le débat politique n’épuise pas le débat éthique et anthropologique sur les grandes questions du sens de l’existence. On peut continuer à provoquer de multiples manières la réflexion sur nos visions du monde et leurs conséquences pour la vie de tous et tout particulièrement des plus vulnérables d’entre nous. C’est une preuve de maturité spirituelle que de croire que ce ne sont pas les paroles qui importent pour exprimer une conviction, mais davantage encore le témoignage et l’engagement d’une vie au service du prochain, nourrie par la foi au Christ.
A cet égard, les communautés catholiques auront aussi à accompagner les nombreux jeunes qui ont spontanément et pacifiquement pris part aux débats et aux manifestations. Il s’agit à la fois de saluer et de soutenir leur engagement tout en assurant leur formation, notamment dans le domaine de la doctrine sociale, pour favoriser ce témoignage à la suite du Christ.
1.2 L’intérêt supérieur de l’enfant
Dans sa décision du 17 mai 2013, le Conseil constitutionnel a érigé « l’intérêt de l’enfant » en exigence constitutionnelle. Cela renforce l’exigence que toute décision d’adoption doit être conforme à l’intérêt de l’enfant. Le Conseil a également jugé que la loi n’a ni pour objet ni pour effet de reconnaître un « droit à l’enfant ». Le rejet très net de toute instrumentalisation crée l’espoir que ce souci de protéger l’enfant, figure du plus faible parmi nous, permettra de trouver une majorité pour s’opposer à un élargissement des cas autorisés pour la procréation médicalement assistée et à la légalisation de la gestation pour autrui.
1.3 L’accueil dans l’Eglise des personnes homosexuelles
L’accueil inconditionnel L’homophobie, comme toute forme de discrimination, est inacceptable. Pour les communautés catholiques, l’accueil inconditionnel de toute personne est premier. Toute personne, indépendamment de son parcours de vie, est d’abord un frère ou une sœur dans le Christ, un enfant de Dieu. Cette filiation divine transcende tous les liens humains de famille. Chaque personne a droit à un accueil aimant, tel qu’il est, sans avoir à cacher tel ou tel aspect de sa personnalité. L’accueil inconditionnel de la personne n’inclut absolument pas une approbation de tous ses actes. Cet accueil constitue cependant la condition première de toute relation, selon l’exemple donné par le Christ lui-même.
La miséricorde et la loi Pour accueillir, les communautés chrétiennes n’ont pas à choisir entre la loi ou la miséricorde. C’est la miséricorde qui ouvre le chemin par lequel chaque personne rendue à sa dignité et à sa liberté, peut s’engager librement sur une voie exigeante de conversion et de croissance. Ce que la foi désigne comme loi n’est pas un diktat moral, mais le signe que, par un comportement d’humilité, la rencontre avec l’amour divin devient possible. C’est une rencontre avec le Christ qui va conduire une personne à opérer des changements dans sa vie. Tout en sachant que cela leur échappe, les communautés chrétiennes ont à favoriser cette rencontre, à témoigner de l’action de Dieu dans la vie de chacun et à accompagner des cheminements, sans jamais juger les cœurs. De ce point de vue, le Conseil famille et société reconnaît que beaucoup peut encore être fait pour mieux accueillir et accompagner les personnes homosexuelles et leurs familles. Les incompréhensions apparues à propos de la loi au sein des communautés catholiques sont à la fois révélatrices de cette situation, mais peuvent aussi aboutir à une meilleure prise en considération de cette responsabilité par les communautés qui sont invitées à approfondir le débat sur différents points.
2. De nouveaux sujets d’approfondissement
2.1 Une vision de l’homme…
Tous responsables de tous Si les relations sont, à ce point, constitutives de notre être, nous ne pouvons rester indifférents aux personnes avec qui nous sommes en relations. Notre interdépendance appelle à une solidarité entre nous. Cette solidarité n’est pas « un sentiment de compassion vague ou d’attendrissement superficiel pour les maux subis par tant de personnes proches ou lointaines. Au contraire, c’est la détermination ferme et persévérante de travailler pour le bien commun, c’est-à-dire pour le bien de tous et de chacun parce que tous nous sommes vraiment responsables de tous » [1]. De cette interdépendance, de cette responsabilité pour autrui, découle une attention particulière pour les plus petits, les plus faibles d’entre nous, qui se retrouve dans le commandement évangélique de nourrir et vêtir les pauvres, d’accueillir l’étranger, de visiter les malades et les prisonniers (Mt 25).
Une attention aux plus vulnérables C’est cette conviction première qui inspire les mêmes catholiques à se faire serviteur des pauvres pour accueillir en eux le Christ et à faire opposition à ce qui risque de priver l’enfant de ses droits, de son inscription dans une histoire et une généalogie. A partir de cette vision de l’homme et de cette attention au plus vulnérable, l’Eglise demandera à la fois l’accueil de l’étranger et l’accueil de l’enfant à naître. Les deux peuvent s’annoncer de façon imprévue, à un moment que nous jugeons mal choisi. Mais le Christ nous demande d’accueillir chaque personne comme lui-même … C’est toujours à partir de cette vision que l’Eglise condamne le licenciement sans concertation de salariés ou l’expulsion brutale de Roms. Dans les décisions économiques ou politiques, le souci de l’homme doit rester premier et sa dignité doit être respectée. C’est encore cette vision qui pousse l’Eglise à intervenir pour le respect des personnes diminuées par l’âge ou le handicap. C’est autour de cette vision de l’homme et ce souci de donner toute leur place aux plus démunis parmi nous que 12000 personnes se sont rassemblées à Lourdes début mai dans le cadre de Diaconia 2013 autour du thème « Servons la fraternité ».
Alors oui, cette attention au plus faible peut se traduire par une opposition à des projets de réforme, mais ce n’est pas par un réflexe conservateur, mais dans le souci que la dignité de l’homme reste bien au centre des préoccupations d’un monde en pleine évolution. Une dignité qui, pour le chrétien, n’est pas liée à une liste de qualités physiques, intellectuelles ou morales ni même à notre propre pouvoir de communiquer ou de nous relier à d’autres. La dignité est fondée dans le fait que chaque créature est créée à l’image de Dieu. En celui qui n’a pas encore accédé au langage ou en celui qui l’a perdu, en celui dont la liberté est entravée ou diminuée par une cause psychique ou physiologique, en celui qui, vulnérable, est remis entièrement entre nos mains, le chrétien reconnaîtra un frère en humanité qui doit être respecté sans condition.
2.2 … cohérente avec une vision du mariage
Une distance grandissante entre mariage civil et mariage religieux Les quatre piliers du mariage chrétien sont l’unité, l’indissolubilité, la fidélité et l’ouverture à la vie. Pendant longtemps, le mariage civil reflétait la même conception du mariage. Avec l’apparition du divorce, et plus particulièrement après l’introduction du divorce par consentement mutuel en 1975, le pilier de l’indissolubilité a disparu du mariage civil créant une distance avec le mariage religieux. Cette distance s’est encore creusée avec la disparition de l’ouverture à la vie comme élément essentiel du mariage civil. Elle s’aggrave encore d’avantage lorsque la différence sexuelle entre l’homme et la femme, élément fondamental pour penser l’alliance féconde à l’image de Dieu, est évacuée ou relativisée dans la définition du mariage civil. Il faut donc prendre acte du fait que mariage civil et mariage religieux ne recouvrent plus le même type d’engagement.
Les conséquences : Les époux catholiques, astreints au mariage civil, continuent d’honorer les exigences civiques et éthiques de solidarité et d’engagement vis-à-vis des enfants et des tiers que le mariage civil, en tant qu’institution, continue de consacrer. Son ouverture aux personnes de même sexe ne modifie pas les exigences juridiques du mariage fixées par le code civil. Choisir de se marier religieusement, c’est consentir librement à un degré d’exigences qui complète et dépasse celles qui continuent d’être requises par le mariage civil. Ces exigences gardent aujourd’hui tout leur sens, un sens que renforce encore son caractère de choix minoritaire et librement consenti.
Goûter à la vie de Dieu Ce choix correspond au goût de l’absolu qui habite spontanément le cœur des jeunes amoureux qui souhaitent faire rimer amour avec toujours. Il exprime aussi une réponse personnelle à l’invitation de goûter en quelque sorte à la vie de Dieu. La fidélité et l’indissolubilité sont des exigences fortes, qui peuvent paraître irréalistes à vue humaine, mais qui nous invitent à nous nourrir de l’extraordinaire fidélité de Dieu qui s’étend d’âge en âge pour en refléter quelque chose dans nos vies. L’ouverture à la vie veut dire que nos amours ne sont pas destinés à nous enfermer dans un tête-à-tête égoïste, mais qu’ils nous poussent à accueillir les autres. La Bible nous montre le visage de Dieu, infiniment fidèle, pardonnant toujours et encore les errements de son peuple. Le Christ nous montre une dynamique relationnelle d’amour capable d’accueillir tous et chacun. Même si nos mariages ne sont pas toujours à la hauteur de ce débordement d’amour dont nous gratifie Dieu, c’est une aventure qui vaut la peine d’être vécue et c’est un bonheur pour ceux qui arrivent à parcourir le chemin ensemble. Ainsi, nous tenons à ce mariage avec ses exigences, non pas parce qu’il nous protègerait contre les incertitudes et les risques – ceux-ci ne nous sont pas épargnés -, mais parce qu’il permet de vivre dans la vérité de l’amour une expérience humaine unique où nous pouvons pressentir un goût d’éternité.
2.3 Retrouver le sens de l’amitié
Toutes les personnes hétérosexuelles n’arrivent pas à vivre une relation d’amitié chaste avec une personne de l’autre sexe. Toutes les personnes homosexuelles n’arrivent pas à vivre une relation d’amitié chaste avec une personne du même sexe. Mais le fait que tous n’y arrivent pas ne dévalorise pas cette expérience. Celles et ceux qui vivent un tel lien d’amitié témoignent volontiers de la richesse qu’il représente et de l’importance qu’il revêt dans leur vie. Les liens d’amitié aussi comportent une ouverture sur les autres et ont une véritable fécondité sociale. Les personnes célibataires, les personnes vivant dans le célibat consacré peuvent témoigner d’une fécondité d’un autre ordre que l’engendrement. De telles expériences humaines risquent d’être balayées par un certain libertarisme. Il y a donc urgence à travailler à l’éducation relationnelle, affective et sexuelle des jeunes. Les chrétiens sont appelés à témoigner que d’autres façons de vivre les relations humaines sont possibles.
En conclusion
La communion ecclésiale n’est pas évidente. Depuis les origines, les chrétiens sont invités à l’unité, signe de celle qui existe au sein même du Dieu trinité auquel ils croient. Depuis les origines, les conflits et les déchirures viennent fragiliser le témoignage des chrétiens et meurtrir le corps du Christ dans lequel chacun a été baptisé. Depuis les origines, il est question de pardon et de charité au sein de nos communautés. C’est dire que notre combat est d’abord celui d’une conversion personnelle pour que notre vie soit une véritable bonne nouvelle cohérente avec l’Evangile et donne aux autres le goût de la vivre. Notre parole la plus convaincante prend avant toute chose la forme d’un engagement et d’un service. A cette condition nous ne craindrons pas que nos façons de vivre entrent en contradiction avec les normes de la société. L’important, c’est que nos vies soient réglées sur le soleil du Christ et qu’on puisse dire que notre témoignage n’est pas jugement pour l’autre mais tout simplement cohérence entre la foi et les actes.
A la suite du Christ, venu en ce monde porté par l’amour du Père pour le monde, sur ce chemin, nous ne sommes pas seuls. En solidarité avec tous ceux qui nous entourent, nous pouvons mettre en œuvre des pratiques qui témoignent du respect inconditionnel de tout être humain et qui garantissent un avenir aux plus vulnérables. Il revient à chacun de garder, toujours plus justement, le souci du vivre ensemble qui respecte la dignité de la personne humaine, souci du vivre ensemble social et politique, orienté vers toujours plus de justice, de paix et de solidarité.