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Entraide et Tradition

Une surprenante déclaration de Mgr Fellay, supérieur de la FSSPX…

publié dans regards sur le monde le 4 janvier 2011


Une surprenante déclaration de Mgr Fellay, supérieur de la FSSPX…

Le 23 décembre 2010, Mgr Fellay, alors qu’il se trouvait en Nouvelle Calédonie pour célébrer la messe de minuit, le jour de Noël, dans la petite chapelle de la communauté de Katiramona, eut l’occasion de répondre à quelques questions d’une journaliste des « Nouvelles Caledoniennes ».

Deux ou trois réflexions du prélat ont retenu mon attention.

Celle-ci, la première : « D’ailleurs, le pape revient aux idées traditionnelles. Il voit très bien qu’il y a une déviation et qu’il faut la corriger. On est peut-être beaucoup plus proche du pape qu’il n’y paraît ».

Celle-là, enfin « on a toujours soutenu qu’on ne veut pas faire bande à part. On maintient qu’on est catholiques et qu’on le reste. Nous souhaitons que Rome nous reconnaisse comme de vrais évêques. D’ailleurs, on n’ose plus le mot schismatique à notre encontre. Alors si on n’est pas schismatiques, ni hérétiques, c’est qu’on est sacrément catholiques. D’ailleurs le pape dit qu’il y a seulement un problème d’ordre canonique. Il suffit d’un acte de Rome pour dire que c’est fini et nous rentrons dans l’Eglise. Ça viendra. Je suis très optimiste ».

Cette dernière déclaration est fort importante et, avouez le, un peu étonnante.

A lire ce dernier passage, au dire même de Mgr Fellay et du Souverain Pontife, il n’y aurait plus de problèmes doctrinaux entre Rome et la FSSPX, mais seulement un problème canonique : « il y a seulement un problème canonique. Il suffit d’un acte de Rome pour dire que c’est fini et nous rentrons dans l’Eglise. Ça viendra. Je suis très optimiste ».

On a l’impression que les discutions théologiques engagées à la demande la FSSPX avec Rome n’ont plus aujourd’hui, la moindre importance. Du moins, Mgr Fellay n’y fait manifestement aucune allusion.

La FSSPX affirmait pourtant hier que ces discutions étaient capitales, premières, et qu’elles déterminaient la suite des événements. Elles constituaient une démarche logique c’est-à-dire qu’il était impossible d’envisager une entente avec Rome avant tout règlement doctrinal et chronologique c’est-à-dire qu’une fois réglé ce difficile problème doctrinal viendrait alors et alors seulement le problème canonique, facile lui à régler. C’était dire l’importance qu’ils mettaient dans ces conversations doctrinales. Aujourd’hui, rien de tout cela, rien de tel, plus de « conversations doctrinales » (?). Elles semblent être jetées « au grenier des vielles lunes ». Il n’y porte pas la moindre attention, le moindre intérêt. Il ne voit plus que le problème canonique. C’est l’attitude du Pape lui-même : « D’ailleurs le pape dit qu’il y a seulement un problème d’ordre canonique ».

Ah Bon ! Nous sommes heureux de l’apprendre.

Mais pourquoi avoir annoncé « urbi et orbi », si l’on peut dire, qu’avant tout accord canonique, il fallait régler les points doctrinaux contestés au sujet de Vatican II, comme par exemple le problème de la liberté religieuse, comme le problème du dialogue interreligieux… Ces problèmes sont-ils donc réglés ? Les ont-ils donc réglés dans leurs conversations théologiques ?

Et si oui, comment se fait-il que l’on puisse lire encore des textes comme la dernière déclaration du Vatican, sous la plume de Benoît XVI, intitulé « la liberté religieuse, chemin de paix » ? Mais ce texte est un « copié collé » du document conciliaire « Dignitatis humanae ». Sur ce sujet, le Pontife reviendrait-il aux idées traditionnelles, celles défendues par ces prédécesseurs comme un Léon XIII, Pie X, Benoît XV, Pie XI et Pie XII ? Reprendrait-il « la magistère de toujours » ? J’ai du mal, quant à moi, à le croire. Lisez :
« La liberté religieuse est aussi un acquis de civilisation politique et juridique. C’est un bien essentiel : toute personne doit pouvoir exercer librement le droit de professer et de manifester individuellement ou de manière communautaire, sa religion ou sa foi, aussi bien en public qu’en privé, dans l’enseignement et dans la pratique, dans les publications, dans le culte et dans l’observance des rites. Elle ne devrait pas rencontrer d’obstacles si elle désire, éventuellement, adhérer à une autre religion ou n’en professer aucune. En ce domaine, la règlementation internationale se révèle emblématique et est un exemple essentiel pour les États, en ce qu’elle ne permet aucune dérogation à la liberté religieuse, sauf l’exigence légitime de l’ordre public pénétré par la justice. La règlementation internationale reconnaît ainsi aux droits de nature religieuse le même statut que le droit à la vie et à la liberté personnelle, car ils appartiennent au noyau essentiel des droits de l’homme, à ces droits universels et naturels que la loi humaine ne peut jamais nier ».
(On voit aujourd’hui comment on fait droit au droit de la vie avec le droit de l’avortement et droit de l’euthanasie déjà adoptée dans plusieurs Etats d’ Europe….)

Mgr Fellay serait-il d’accord avec cette déclaration vaticane tellement équivoque et partant fausse ? J’ai du mal à le croire. A moins qu’il s’éloigne de la pensée des papes du 19ème et 20ème siècles,  sur ce sujet,  jusqu’à Pie XII. Est-il donc proche, sur ce sujet, de la pensée exprimée par Benoît XVI ? Dit-il vrai lorsqu’il répond à la journaliste : « On est peut-être beaucoup plus proche du pape qu’il n’y paraît ». A la place des siens, je veillerais…Mais peut-être a-t-il parlé dans un moment d’euphorie…

A vouloir régler d’abord et avant toute chose le problème doctrinal, il se compliquait non seulement la vie, mais il éloignait d’autant le règlement canonique voulu par Rome au moins depuis l’an 2000, depuis l’année jubilaire. Voyez le règlement des prêtres de Campos ! Et croyez bien que ce n’est pas le règlement canonique qui a fait « évoluer » ou « dévier » Mgr Riffan, c’est Mgr Riffan lui-même, et peut-être sa trop grande habileté…

Le texte continue :

« La liberté religieuse n’est pas le patrimoine exclusif des croyants, mais de la famille tout entière des peuples de la terre. C’est l’élément incontournable d’un État de droit ; on ne peut pas la nier sans porter atteinte en même temps à tous les droits et aux libertés fondamentales, puisqu’elle en est la synthèse et le sommet. Elle est « le ‘papier tournesol’ qui permet de vérifier le respect de tous les autres droits humains ». Celle-ci favorise l’exercice des facultés plus spécifiquement humaines tout en créant les prémisses nécessaires pour la réalisation d’un développement intégral, lequel concerne de manière unitaire la totalité de la personne en chacune de ses dimensions ».

Et si vous avez bien assimilé l’enseignement de l’encyclique de Léon XIII, « Libertas praestantissimus », commenté par Mgr Lefebvre dans son livre « C’est moi l’accusé qui devrais vous juger ! », vous pourrez difficilement affirmer que le problème doctrinal soit réglé sur ce sujet.

De plus le Vatican, dans ce texte, nous appelle même à fêter le 25ème anniversaire de la journée d’Assise de 1986 qui avait tellement scandalisé notre saint fondateur. En ce jour, on a vu le Souverain Pontife, Jean-Paul II, mis au rang des « leaders » des « religions », oubliant un instant, semble-t-il, qu’Il était « le Vicaire du Christ », Lui, vrai Dieu et vrai homme, le Successeur de Pierre, « Tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Eglise » :
« En 2011 sera fêté le 25e anniversaire de la Journée mondiale de prière pour la paix, convoquée en 1986 à Assise par le vénérable Jean-Paul II. A cette occasion, les responsables des grandes religions du monde ont manifesté combien la religion est un facteur d’union et de paix et non de division et de conflits. Le souvenir de cette expérience est un motif d’espérance en un avenir où tous les croyants se sentent et deviennent effectivement artisans de justice et de paix ».

Verra-t-on une journée identique?

Alors voilà annoncée une nouvelle journée nécessairement syncrétique. Il ne suffit pas de dire qu’elle ne le sera pas pour qu’elle ne le soit pas. Comme le dit le professeur Amerio dans son livre « Stat veritas » « on ne peut pas promouvoir le syncrétisme et ensuite avertir qu’il faudrait faire attention à éviter le syncrétisme » (p 139).

Vraiment j’ai du mal à croire qu’ « Il suffi(se) d’un acte de Rome pour dire que c’est fini et nous rentrons dans l’Eglise ». Je ne le crois pas. Je ne le crois pas simplement comme ça.

Il m’a toujours paru prudent – finirais-je par avoir raison? –  de s’en tenir à la pensée de Mgr Lefebvre exprimée dans sa lettre du 21 novembre 1987 – lettre qui nous fait penser, en raison de son importance et de l’identité de date, à sa fameuse déclaration de 1974, elle aussi du 21 novembre – et qui demandait :

-que l’on nous prenne tels que nous sommes sans chercher à nous faire dévier en rien de notre attachement à la Tradition liturgique et doctrinale. Qu’on nous reconnaisse le droit de la messe tridentine. C’est chose faite, mieux encore le droit de ce rite est un droit universellement reconnu par Rome pour tout prêtre. Et il faut la mauvaise volonté évidente des évêques pour voir si peu de fruit du Motu Propio de Benoît XVI.

-qu’on lève l’excommunication des évêques sacrés par Mgr Lefebvre, les quatre. C’est chose faite

-qu’on réhabilite la FSSPX et que Rome accepte les modifications des statuts quant à la succession de Mgr Lefebvre. C’est à faire, mais cela devrait être chose facile, sauf, peut-être sur un point, le sacre d’un ou de plusieurs évêques, comme successeur de Mgr Lefebvre…

– qu’on reconnaisse, dans le statut canonique à donner à la FSSPX, une juridiction propre et personnelle à l’autorité supérieur, une sorte d’exemption à l’instar de l’organisation de l’institut aux armées. Ce n’est pas fait et ce sera difficile à obtenir.

-enfin que les divers instituts, fidèles à la messe tridentine, soient unis dans une sorte de « fédération » ou « confédération » et rattachés à Rome, à une sorte de « Congrégation romaine » pour régler avec les épiscopats les différents problèmes inhérents aux développements de la « Tradition ». C’est en voie de constitution, mais cela reste encore dans la pensée de Benoît XVI. Il le dit dans son Motu Proprio « Summorum Pontificum ». Mgr Lefebvre, quant à lui, a été très clair sur ce sujet (Voir mon livre: Plaidoyer pour l’unité »)

Je pense que l’Institut du Bon Pasteur se prêterait volontiers à une telle « organisation canonique ». Monsieur l’abbé Laguérie pourrait sur ce sujet exprimer sa pensée.

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