Le secret de la confession
publié dans regards sur le monde le 26 février 2019
Des sénateurs songent à abolir le secret de la confession
L’Eglise en fait beaucoup – beaucoup trop ? – après n’avoir pas fait assez pour combattre la pédophilie dans le clergé. Les réunions se multiplient à Rome, dans les diocèses et les paroisses. Bien sûr, qu’elle soit le fait de prêtres, d’enseignants ou de parents, ce détestable vice doit être dénoncé et ses auteurs poursuivis. Mais il ne faut pas se faire d’illusions, elle ne se-ra jamais éradiquée complètement.
C’est, disent les psychiatres, une perversion qui est liée à un stade archaïque du développement de la sexualité et que l’on ne peut déceler comme s’il s’agissait d’une pathologie classique. Parfois elle ne se déclare chez l’intéressé – qui passe alors à l’acte – que tardivement dans sa vie. Cela ne veut pas dire que c’est un « malade » irresponsable ! Le pédophile sait très bien ce qu’il fait et que c’est condamnable. Dans le domaine sexuel, on peut toujours maîtriser ses pulsions, c’est ce que disent les « psy » et que corroborent la morale et l’anthropologie chrétiennes.
Il est difficile de s’en rendre compte quand un jeune homme est candidat au sacerdoce, rien ne permet de déceler cette tendance auparavant – hélas ! – qu’il ne passe à l’acte. Les “mea culpa” et les serments d’en finir avec les prêtres pédophiles ne changeront rien. La seule réplique est a posteriori contre ces prêtres et ces religieux indignes.
Mais l’Eglise, en la personne du pape et des évêques, en prenant le sac et la cendre, en se frappant la poitrine tous les matins, a ouvert la boîte de Pandore. Elle promet par la voix du saint Père et des évêques en France et ailleurs de ne plus rien laisser passer, de dénoncer les coupables à la justice plus vite que leur ombre. Pas seulement les prêtres mais ceux que les victi-mes leur désigneront. Ils veulent « tout faire » pour désormais livrer à la justice ces individus.
« Tout » ? Une commission sénatoriale (où abondent les francs-maçons !) dans le cadre d’une mission cherchant à lut-ter contre les abus sexuels sur mineurs, a pris au mot les hauts responsables de l’Eglise. « Tout » messeigneurs, y compris re-noncer au secret de la confession ? Le 12 février, Bernard Bonne, le sénateur Républicain de la Loire, a demandé à Mgr Oli-vier Ribadeau Dumas, secrétaire général et porte-parole de la Conférence des évêques de France : « Est-ce que vous ne pensez pas quand même qu’il y a certains faits tellement importants et tellement criminels qu’il faudrait dépasser le stade du secret de la confession pour pouvoir effectivement en parler ? »
Un autre membre de la Haute Assemblée lui a posé la question : « Le droit canon prime-t-il le droit français ? » La for-me interrogative n’est là que par diplomatie, en réalité, pour les sénateurs, la réponse est dans la question.
Sachant que ce thème serait inévitablement abordé par la commission, le président des évêques de France, Mgr Pontier, avait précisé, dans une déclaration liminaire : «En premier lieu, le secret de la confession est un secret professionnel. Il obéit aux règles du droit applicable à de tels secrets comme celui du médecin ou de l’avocat. En deuxième lieu, je voudrais que nous ne nous leurrions pas sur le fait que des prêtres abuseurs iraient confesser leurs crimes.»
Si le second propos est fondé, le premier ne l’est pas et il offre même un argument pour abolir le secret de la confes-sion. Ce secret n’est pas le même que celui d’un médecin, lequel est délié de son secret professionnel s’il constate des sévices sur un mineur (et un patient blessé par balle). Dans ce cas, il a obligation, sous peine de poursuites, d’alerter la justice. Le se-cret de la confession, lui, ne peut être violé en aucun cas, certains prêtres sont morts pour avoir refusé de le trahir.
Les sénateurs auraient beau jeu d’étendre la loi concernant les médecins aux prêtres, obligés de dénoncer le pénitent pé-dophile ou le pédophile accusé par un jeune pénitent dans le cadre de la confession. En vérité, le problème n’en est pas vrai-ment un pour le confesseur : il conditionne l’absolution que sollicite le pénitent à sa dénonciation auprès de la justice.
Que vont faire les sénateurs qui doivent livrer des préconisations à l’issue de leur mission au mois d’avril ? « C’est un réel sujet. On va voir comment on peut le traiter et voir quelles recommandations, on va faire », a déclaré Catherine Deroche, sénateur LR de Maine-et-Loire et présidente de la mission d’information.
Il est donc possible, si ce n’est probable, que les sénateurs recommandent qu’une loi oblige les prêtres à révéler les abus sexuels dont ils auraient connaissance dans le cadre de la confession. Partant de là, on irait rapidement au-delà de la pédophilie et c’en serait fini, dans la loi laïque, du secret de la confession. Nous n’en sommes pas encore là, mais la vigilance s’impose. P.R
(Source le Bulletin d’André Noêl)