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Homosexualisme : un catholique peut-il reconnaître les « droits des couples homosexuels » ?

publié dans regards sur le monde le 19 juillet 2013


Lu sur « Correspondance européenne » n° 270

Homosexualisme : un catholique peut-il reconnaître les « droits des couples homosexuels » ?

On assiste actuellement à la propagation, y compris dans le monde catholique, d’une conviction dangereuses selon laquelle la reconnaissance juridique des cohabitations homosexuelles constituerait le seul remède permettant d’éviter le « mariage entre personnes du même sexe »… « Non aux noces homosexuelles, oui à la reconnaissance des droits des couples de fait et homosexuels » : tel est le mot d’ordre de ceux qui voudraient organiser une « ligne de défense » fondée sur le « principe » ruineux « céder pour ne pas perdre ».

Il ne s’agit pas seulement d’une colossale erreur stratégique mais aussi et surtout d’une grave erreur morale. La morale, et non pas seulement la morale catholique, mais la morale naturelle, a en effet son pivot dans le principe selon lequel il faut faire le bien et éviter le mal : bonum faciendum et malum vitandum. Ce principe premier est immédiatement évident à l’homme en tout temps et en tout lieu et n’admet ni interprétations ni compromis. En postulant l’existence du bien et du mal, il présuppose l’existence d’un ordre objectif et immuable de vérités morales que l’homme découvre tout d’abord dans son cœur par ce qu’il existe une loi naturelle inscrite « en leur cœur » (Rm 2, 14-15).

Du principe selon lequel il faut faire le bien et éviter le mal dérive une conséquence nécessaire : il n’est jamais licite à personne et en aucune sphère, ni privée ni publique, de faire le mal. Le mal, qui est la violation de la loi morale, peut être toléré dans des cas exceptionnels mais jamais accompli positivement. Cela signifie qu’aucune circonstance et aucune bonne intention ne pourront jamais transformer un acte intrinsèquement mauvais en un acte humain bon ou indifférent. Jamais un mal, même minime, ne pourra être accompli, et ce quels que soient les plus nobles motivations. Le système moral du « proportionnalisme », aujourd’hui à la mode, rejette l’idée de principes absolus dans le domaine moral et admet la possibilité d’accomplir le « moindre mal » possible dans une situation particulière afin d’obtenir un bien proportionnellement plus grand. Cette théorie a été condamnée par le Bienheureux Pape Jean Paul II dans son Encyclique Veritatis Splendor, qui réaffirme l’existence « d’absolus moraux », ayant un contenu immuable et inconditionné. « La pondération des biens et des maux, comme conséquences prévisibles d’une action – explique le Pape –, n’est pas une méthode adéquate pour déterminer si le choix de ce comportement concret est (…) moralement bon ou mauvais, licite ou illicite » (n° 77).

Le droit critère du jugement moral est en effet celui qui évalue un acte comme « bon » ou « mauvais » à selon qu’il respecte ou viole la loi naturelle et divine, le considérant d’abord et avant tout en soi, c’est-à-dire dans son objet, ses circonstances et ses conséquences propres. En revanche, le critère proportionnaliste est relativiste en ce qu’il évalue un acte comme « meilleur » ou « pire » à selon qu’il améliore ou empire une situation donnée. La Congrégation pour la Doctrine de la Foi, dans une Note du 21 décembre 2010 portant sur la banalisation de la sexualité, se référant à ceux qui interprétaient un certain nombre de paroles de S.S. Benoît XVI dans son livre Lumière du monde, en ayant recours à ce qu’il est convenu d’appeler la théorie du « moindre mal », déclara que « cette théorie, toutefois, est susceptible d’interprétations déviantes de caractère proportionnaliste », condamnées par la Veritatis Splendor, parce que « une action mauvaise par son objet, même s’il s’agit d’un moindre mal, ne peut être licitement voulue ». Cela a une valeur contraignante tant sur le plan de la conduite personnelle que sur celui du comportement public. Les parlementaires catholiques peuvent ne pas avoir la possibilité de réaliser concrètement le plus grand bien mais ils ne peuvent jamais promouvoir une loi injuste en soi, quelle qu’en soit la motivation. Si le principe selon lequel le moindre mal peut être accompli pour obtenir un plus grand bien était admis, les catholiques pourraient promouvoir l’avortement thérapeutique, pour éviter l’avortement sélectif, la fécondation artificielle homologue pour éviter la fécondation artificielle hétérologue, les unions civiles pour éviter le « mariage » homosexuel. Mais ce faisant, la morale entière s’écroulerait parce que de moindre mal en moindre mal, tout arbitraire pourrait être prétextueusement permis.

Il ne manque pas de personnes qui, pour justifier le principe du moindre mal dans le domaine politique, se réfèrent à une phrase du Pape Jean Paul II dans son Encyclique Evangelium Vitae, selon laquelle « pourrait licitement apporter son soutien à des propositions destinées à limiter les préjudices d’une telle loi (abortiste) et à en diminuer ainsi les effets négatifs sur le plan de la culture et de la moralité publique » (n° 73). Mais ce passage ne peut être interprété que de manière cohérente avec la Veritatis Splendor et avec le Magistère moral de l’Eglise, qui enseigne qu’il est possible de tolérer un mal, en renonçant à le réprimer et qu’il est même possible de réguler un mal, dans le sens d’en réduire la liberté et le domaine d’action mais qu’il n’est pas possible de permettre ou de réguler un mal en l’autorisant parce que cela signifierait l’approuver et s’en rendre pleinement complices (cf. Ramon Garcia de Haro, La vita cristiana, Ares, Milano 1995). Dans le passage précité, le Pape ne déclare pas qu’il est licite pour un catholique de produire une loi injuste mais qu’il lui est licite d’intervenir sur une loi, en cours d’élaboration parlementaire, de la modifier par le biais d’amendements simplement abrogatifs ou restrictifs de dispositions permissives et immorales. Il s’agit en ce cas d’amendements qui empêchent que certaines propositions de normes obtiennent force de loi. Il faut cependant préciser que, dans notre ordonnancement juridique, la loi n’est pas seulement votée article par article mais également dans son ensemble, en signe d’approbation globale. Dès lors, il ne serait jamais permis au parlementaire catholique d’apporter son suffrage lors du vote final positif d’un texte autorisant des actions immorales et ce même si une telle loi se trouvait être le résultat de l’approbation de ses amendements.

En effet, il ne peut en aucun cas et d’aucune manière prendre sur soi la responsabilité globale d’un texte final autorisant par exemple des pratiques abortives même seulement dans des cas rares et extrêmes. Cela signifie qu’il pourra corriger la proposition de loi par le biais d’amendements correctifs mais qu’il ne pourra en approuver le texte final si y demeurent des dispositions mauvaises. Pour pouvoir moralement être proposée par un parlementaire catholique, une loi doit avoir une integritas propre et doit donc être totalement juste dans le sens qu’aucune de ses dispositions ne doit contredire la Loi naturelle et divine. Mais si une loi contient ne serait-ce qu’une seule disposition intrinsèquement et objectivement immorale, elle constitue une « non loi ». Un parlementaire catholique ne pourra en aucun cas la voter dans son ensemble sous peine de prendre la responsabilité morale et juridique de l’ensemble du texte. « Bonum ex integra causa, malum ex quocumque defectu » ne se lasse de répéter Saint Thomas d’Aquin (Summa Theologica, I-II, q. 71, a. 5, ad 2; II-II, q. 79, a. 3, ad 4).

En Italie, des représentants de centre-droit et de centre-gauche trouvent actuellement une « large entente » afin d’exhumer les DICO (« Droits et devoirs des personnes cohabitant de manière stable »), le projet de loi portant reconnaissance juridique des rapports de cohabitation présenté par le gouvernement Prodi en février 2007. A l’époque, le projet fut mis en échec grâce à l’opposition des catholiques. Aujourd’hui, certaines personnalités du monde catholique considèrent elles aussi la reconnaissance des unions homosexuelles de fait comme « un moindre mal » qui pourrait être accompli afin d’éviter « le plus grand mal » du « mariage » homosexuel. Mais d’un point de vue moral, la reconnaissance légale des unions homosexuelles est tout aussi grave que leur égalisation légale avec le mariage. C’est pourquoi la Congrégation pour la Doctrine de la foi, dans le Document sur Les projets de reconnaissance juridique des unions entre personnes homosexuelles du 3 juin 2003, approuvé par le Pape Jean Paul II, établit que « le respect envers les personnes homosexuelles ne peut en aucune façon conduire à l’approbation du comportement homosexuel ou à la reconnaissance juridique des unions homosexuelles ». Voter une loi de ce genre signifie se rendre complices d’un mal qui n’est certes pas annulé par la prétendue « réduction du dommage ». Si étaient présentées au Parlement deux projets, l’un légalisant le « mariage » homosexuel et l’autre reconnaissant les droits des couples homosexuels bien que ne les égalisant pas au mariage, les catholiques ne pourraient voter en faveur du second en tant que « moins mauvais » que le premier et si le pire des deux projets devait être adopté, la responsabilité serait seulement de ceux qui l’auraient soutenu. Comment peut-on imaginer qu’un catholique puisse approuver une loi qui protège juridiquement l’un des « péchés qui crient vers le ciel » comme « le péché des Sodomites » (Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 1867) ? (Roberto de Mattei)

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