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Le naturalisme

publié dans couvent saint-paul le 18 juillet 2011


4ème dimanche après la Pentecôte
Le naturalisme

« J’estime que les souffrances du temps présent sont sans proportion avec la gloire à venir qui sera manifestée en nous. Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la manifestation des enfants de Dieu. La création, en effet, a été assujettie à la vanité, — non de son gré, mais par la volonté de celui qui l’y a soumise, — avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu. Car nous savons que, jusqu’à ce jour, la création tout entière gémit et souffre les douleurs de l’enfantement. Et ce n’est pas elle seulement; nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit, nous gémissons en nous-mêmes, attendant l’adoption [des enfants de Dieu], la rédemption de notre corps ».
Ce passage de saint Paul dans son Epître aux Romains est très extraordinaire. Il nous parle du monde surnaturel, du monde avenir qui s’épanouira en Dieu dans la possession de la gloire divine, possession qui sera le fruit de la filiation divine réellement acquise dans la foi au Christ ; « …afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle », possession de l’incorruptibilité, de l’impassibilité pour les corps ressuscités ; possession de la béatitude éternelle pour les âmes contemplant éternellement Dieu dans sa bonté et sa beauté. En effet saint Paul, comme vous avez pu le comprendre à la seule lecture du texte, parle de « gloire à venir » des enfants de Dieu, de leur « manifestation » dans la gloire. Il nous dit que la création elle-même « sera affranchie de la servitude de la corruption » et qu’elle aura « part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu ».
Voilà un langage vraiment surnaturel. C’est le langage divin. C’est le langage de l’Eglise. C’est le lange des Apôtres, de l’Evangile. C’est le langage de l’espérance du Ciel, de l’espérance eschatologique. L’homme créé et régénéré en Dieu dans les eaux du baptême s’accomplit, s’achève, se perfectionne et connaît le bonheur éternel en Dieu. Dieu est la fin de toutes choses, l’accomplissement de toutes choses. Dieu possédé par la créature est la plénitude de l’être créé. L’homme n’est grand qu’en Dieu. Dieu est sa loi, sa gloire et sa perfection. Dieu est le tout de l’homme. Il est sa béatitude.
Voilà la conclusion simple que l’on peut tirer de ce texte paulinien : Dieu est le tout de l’homme ici-bas et dans l’au-delà et il trésaille d’allégresse en cette pensée.
Or le monde moderne est opposé totalement à cette attitude évangélique.
En effet « la pente actuelle des esprits et des cœurs, le trait principal des caractères, l’habitude des individus, la coutume des sociétés, la loi qui les régit et l’esprit politique qui les gouverne, le mouvement de la science et, par suite, la direction des études et de toute l’éducation, l’état général qui en résulte, c’est un univers fermé sur lui-même, replié sur lui-même. La nature, rien que la nature, elle se suffit à elle-même, à elle seule. C’est pourquoi le signe propre de notre temps, c’est le naturalisme »
Mais qu’est-ce que la naturalisme ?
Comme son nom l’indique, il est essentiellement, une attitude indépendante et répulsive de la nature à l’égard de l’ordre surnaturel et révélé, à l’égard de Dieu.
« …Possédant en elle-même toutes les lumières, les forces et les ressources nécessaires pour régler toutes choses ici bas, tracer la conduite de chacun, protéger les intérêts de tous et parvenir au terme final de sa destinée qui est le bonheur…la nature devient, dans ce système une sorte d’enceinte fortifiée et de camp retranché, où la créature s’enferme comme dans son domaine propre tout à fait inaliénable ». (Card. Pie)
« En somme l’homme se suffit et, possédant en soi son principe, sa loi et sa fin, il est son monde et il devient, à peu près son Dieu. Et s’il est par trop manifeste que l’individu, pris comme tel, est indigent sur beaucoup de point et insuffisant pour beaucoup de choses, néanmoins pour se compléter, il n’ y a pas à sortir de son ordre ; il trouve dans l’humanité, dans la collectivité, ce qui lui manque personnellement »…alors que pour le catholique, il ne trouve, avons dit avec Saint Paul, sa perfection, sa plénitude qu’en Dieu.
« Le naturalisme est, donc, ce qu’il y a de plus opposé au christianisme.
« Le Christianisme dans son essence, est tout surnaturel, ou, plutôt c’est le surnaturel même en substance et en acte. Dieu surnaturellement révélé et connu, Dieu surnaturellement aimé et servi, surnaturellement donné , surnaturellement possédé et surnaturellement goûté, c’est ce que nous enseigne saint Paul dans ce texte aux Romains. Le Christianisme c’est en un mot Dieu possédé, la vie éternelle, c’est Dieu aimé, c’est la filiation divine par la grâce reçue. La nature y est, certes, indispensable, supposée à la base de tout, c’est sur; mais elle y est, partout, dépassée. Le christianisme est l’élévation, l’extase, la déification de la nature créée. C’est la filiation divine. C’est la liberté des enfants de Dieu.
Or le naturalisme, caractéristique du monde moderne, nie, avant tout, ce surnaturel, il est donc pur antichristianisme en tant qu’il élimine Dieu du monde et de la création. Il est de tout point en opposition à la religion chrétienne.
Ce naturalisme est satanique en ce sens qu’il nie comme Lucifer nia l’ordre divin et surnaturel, ne voulant pas se soumettre à cet ordre.
Quelle fut en effet la pierre d’achoppement pour Satan et pour ses anges ?
La foi nous enseigne que le Dieu créateur, par un acte libre et souverainement gratuit de sa volonté, ayant résolu, pour racheter le genre humain, de descendre personnellement dans sa création, s’incarna dans le sein de la Vierge Marie. Il, n’emprunta ainsi ni la substance purement spirituelle de l’ange ni la substance simplement matérielle de l’être inintelligent. Le Fils unique de Dieu se fit homme ; il prit un corps et une âme ; il se posa ainsi au centre de la création des esprits et de la matière. Il est devenu ainsi Médiateur, Sauveur, Illuminateur de tout ce qui était, par nature, au-dessus et au-dessous de son humanité sacrée…
Ce prodige et, vraiment, cet excès d’amour divin, cette Incarnation, ce fut au sentiment d’un grand nombres de Pères et de théologiens, le principe et la ruine de Satan…Croire au Fils de Dieu fait homme, espérer en Lui, l’aimer, le servir, l’adorer, être même glorifié en Lui, telle fut la condition du salut. Les deux testaments nous disent que ce précepte s’adressa aux anges comme aux hommes ; il est écrit dans l’un et dans l’autre : « Et adorent eum omnes angeli eius ». Saint Michel en tête, en premier.
Satan, lui, frémit à l’idée de se prosterner devant une nature inférieure à la sienne, à l’idée surtout, de recevoir lui-même de cette nature si étrangement privilégiée, un surcroît actuel de lumière, de science, de mérite et une augmentation éternelle de gloire et de béatitude. Se jugeant blessé dans la dignité de sa condition native, il se retrancha dans le droit et dans l’exigence de l’ordre naturel ; il ne voulut adorer dans un homme, la nature divine, ni accueillir, en lui-même, un surplus de splendeur et de béatitude dérivant de cette humanité déifiée. Au mystère de l’Incarnation, il objecta la création ; à l’acte libre de Dieu, il opposa un droit personnel ; enfin, contre l’étendard de la Grâce, et de son cortège de vertus et de dons, la filiation, la nature divine participée, il leva le drapeau de la nature.
Rien que la nature ! Au diable, alors, – si je puis dire – la glorification de l’homme en Dieu. Au diable, l’espérance eschatologique, sotériologique en le Christ et qu’en le Christ. Il est le seul Sauveur, la seule perfection
« C’est ainsi que tout le travail de l’enfer se traduit fatalement par la haine du Christ (et de son Eglise), par la négation de tout l’ordre (surnaturel) de la grâce et de la gloire »
« Et le point d’où Satan est tombé, c’est celui d’où il veut précipiter les autres. »
Et cela dès le commencement, dès le péché originel. Le péché originel, premier péché de l’homme, fut aussi et toujours sous l’inspiration de Satan, un péché de naturalisme.
« Le premier homme, enseigne saint Thomas d’Aquin, pécha de deux manières : il pécha, principalement, en désirant la ressemblance avec Dieu quant à la science du bien et du mal, afin de pouvoir, en vertu de sa propre nature, déterminer lui-même ce qu’il est bon ou ce qu’il est mal de faire ; et il pécha secondement, désirant la ressemblance avec Dieu quant au pouvoir d’agir, afin de conquérir par la vertu de sa propre nature, la béatitude. En un mot, il désira, comme les anges s’égaler à Dieu, en ne s’appuyant que sur lui-même, en méprisant l’ordre (surnaturel) et la règle établie par Dieu »
Le naturalisme est donc, le péché fondamental de notre monde et, si l’on peut dire le péché très spécifiquement satanique, plus que tout autre. S’en tenir à la nature, refuser l’ordre divin de la grâce, autrement dit : séparer le naturel du surnaturel comme le fait aujourd’hui tout laïcisme doctrinal, voilà le péché initial et comme fastidieusement renouvelé, le péché clef ; en fait le seul et grand drame du monde contemporain.
Voilà le principe posé, vous pouvez en voir très facilement toutes les applications politiques actuelles en tous les domaines, de l’éducation nationale à la politique européenne en pensant par tous les problèmes moraux de la bioéthiques actuelles. « Exit » Dieu de sa propre créature. Exit Dieu de son domaine. Exit Dieu de l’éducation, de la morale, des relations politiques. Exit Dieu de la famille, des relations sociales…
Au contraire, ouvrons toute grande nos âmes à la grâce de Dieu pour qu’Il la rectifie, la purifie, l’ordonne selon son ordre à Lui, l’ordre divin.
Amen.

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