La négation du « génocide arménien »
publié dans flash infos le 22 décembre 2011
AGRIF
Bernard Antony, président, communique :
La négation du « génocide arménien » : l’AGRIF, la première, l’a judiciairement combattu. Mais il faut en finir avec une pénalisation du négationnisme aux effets pervers.
C’est l’AGRIF qui, la première, intenta un procès contre la négation du génocide arménien qu’avait formulée (« Ce génocide est fort douteux ») l’historien Bernard Lewis dans Le Monde (06/11/1993).
Le procès, présidé par Yves Montfort, vint devant la 17° Chambre correctionnelle le 15 octobre 1994. L’AGRIF fut déboutée au motif que ses statuts ne prévoyaient pas explicitement la défense de la cause arménienne.
Car à l’époque la loi Rocard-Gayssot du 13 juillet 1990 ne prévoyait que la répression de la négation du génocide juif et des crimes contre l’humanité du nazisme définis par le Tribunal de Nuremberg.
Les organisations arméniennes dont le président du Conseil Central, Ara Toranian, vint me remercier, purent reprendre l’action initiée par l’AGRIF par des procès sur la base de l’article 1382 du Code Civil « réparant sur le fondement de la responsabilité civile le préjudice causé aux victimes ».
Pour moi en effet qui ai étudié l’immensité de l’horreur du génocide des Arméniens et autres chrétiens perpétré avec un hallucinant raffinement de cruauté par l’État jeune-turc et toute une population fanatisée, il était indécent, et même objectivement raciste, que la négation d’un génocide soit moins dénoncée qu’une autre, qu’il s’agisse des génocides commis par le nazisme ou par le communisme.
Mais l’évidence s’impose depuis longtemps que, comme l’avait très lucidement fait observer l’écrivain Annie Kriegel, (Figaro du 3 avril 1990), la loi Rocard-Gayssot ne serait pas une bonne chose.
La répression du négationnisme n’a en effet que des effets pervers. Alors que l’on exalte le principe de la liberté absolue du blasphème, et même de l’exécration et de l’excrémentation contre les religions, cette répression contre une « opinion » historique, fût-elle abominable, paraît incongrue.
Elle est évidemment interprétée comme l’imposition d’une vérité officielle, d’un tabou à respecter et ce sous peine de sanctions.
La loi de répression du négationnisme institue ainsi les effets pervers de croyance que « le génocide n’est pas vrai puisqu’il est obligatoire d’y croire ».
Or, aucun historien sérieux ne nie plus la triste réalité de la continuité des génocides de l’histoire moderne, depuis le génocide vendéen jusqu’à ceux commis par le nazisme et le communisme en passant par l’extermination des Arméniens et autres chrétiens par les Jeunes-Turcs.
J’avais en 1989 démontré au Parlement Européen les constantes idéologiques de justification de ces génocides.
J’ai été heureux que Maître William Goldnadel, le remarquable président d’Avocats sans Frontières et vice-président du CRIF, en ait fait à son tour une très émouvante et percutante démonstration dans sa préface au livre de l’historien Reynald Seycher « Vendée – Du Génocide au mémoricide ».
Aujourd’hui il n’est que temps d’enseigner cette atroce continuité des différentes formes de la barbarie totalitaire.
Mais il ne faut pas sécréter et encourager dialectiquement le négationnisme par une répression liberticide. Il faut le combattre par l’exposé de la vérité. Il faut bien sûr en réprimer les injures et les diffamations qui s’y rattachent, comme cela était possible avec la très bonne loi de 1880 sur ces délits, à éventuellement adapter et compléter.
La liberté ne saurait être en effet celle de l’injure, de la diffamation, de l’incitation à la haine, de provocations sans limites.
Tous les chrétiens, comme les Arméniens en particulier, comme les juifs et d’autres devraient être également protégés contre ces délits. Mais en matière d’histoire, c’est par la vérité qu’il faut réfuter le déni de réalité, fût-il abominable.
AGRIF
70 BD St Germain
75005 Paris