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Entraide et Tradition

En la fête des sept Douleurs de Notre Dame (1)

publié dans la doctrine catholique le 16 septembre 2016


Les hymnes liturgiques

 en l’honneur de Notre Dame

Les Vêpres (1)

de la fête 

 Des sept douleurs de la Sainte Vierge

Je vous ai dit souvent que les hymnes de notre sainte liturgie sont d’une richesse extraordinaire. Ils sont non seulement de vrais poèmes, des morceaux choisis de belle littérature, mais aussi, toujours, de vraie contemplation des mystères chrétiens.

Cet hymne des Vêpres de cette fête des 7 douleurs de la Vierge en est un exemple merveilleux.

L’auteur contemple la Passion du Christ, ses souffrances et celles qu’a connues Notre Dame, fidèle, immobile au pied de la Croix.

« Que l’étoile du soir disparaisse entièrement du ciel, que le soleil entraine avec lui le jour foudroyé, tandis que je célèbre la dérision de l’horrible meurtre et l’écroulement d’un Dieu »

Il y a dans cette strophe un ordre de l’auteur : « Que disparaisse l’étoile du soir…que le soleil entraine avec lui le jour foudroyé ». Ce sont des ordres solennels aux astres célestes, des commandements étonnants. Mais qu’elle en est la raison ? C’est qu’il va contempler le déroulement de la Rédemption aux événements très cruels, cruauté qui a de quoi choquer, même les puissances célestes, créatures de Dieu. Cette injonction à l’adresse des  puissances célestes : « Que l’étoile du soir disparaisse entièrement du ciel, que le soleil entraine avec lui le jour foudroyé » exprime l’émotion de l’âme pieuse de notre auteur devant la Croix. Ces créatures de Dieu, qui sont la manifestation de  la toute-puissance de Dieu, ne peuvent voir cette scène terrible : d’un Dieu terrassé, humilié. Elles doivent s’éloigner comme on éloigne un enfant d’un spectacle horrible…Et  cette remarque s’inspire, du reste, du récit évangélique lui-même. Il y eut précisément un obscurcissement du ciel au moment de la crucifixion du Dieu de Majesté, comme si le soleil s’était retiré ne pouvant souffrir un tel spectacle. Les trois synoptiques sont formels. Saint Luc, comme les deux autres, note bien : « Il était environ la sixième heure, quand des ténèbres couvrirent toute la terre jusqu’à la neuvième heure. Le soleil s’obscurcit…» (Lc 23 44 45)

Le texte latin fait parfaitement ressortir ce sentiment d’horreur que veut exprimer l’auteur de cet hymne : « Sol attonitum  praecipet diem ». « Attonitus » est un adjectif  très fort ; il veut dire frappé de stupeur, stupéfait, confondu. C’est l’accusatif, il s’accorde avec « diem », ce jour est frappé d’étonnement devant le spectacle de la Croix. Que le soleil et donc la clarté du jour,  se retirent  pour ne pas voir ce spectacle affreux , d’un Dieu humilié, « écroulé »!

Et la description de la Rédemption est exprimée en terme très fort : « tandis que je célèbre la dérision de l’horrible meurtre et l’écroulement d’un Dieu »

Cette Rédemption ne fut rien d’autre qu’une mort. L’auteur utilise le mot « nex, necis » et non pas simplement «  mors », car elle fut « horrible », mieux « féroce, cruel ». C’est le sens du mot latin « saevus ». Un autre qualificatif est donné à cette Passion du Christ. Elle fut « ludibrius ».Elle  fut une vraie « dérision ». « Ludibrius », en latin, veut dire « risée, le jouet, objet de risée. Ce mot vient de « ludus » qui veut dire : « jeu, amusement, divertissement ». Mais ne fut-ce pas le comportement d’Hérode face au Christ ; ne se moqua-t-il pas de lui.  C’est expressément dit dans saint Luc : « Hérode eut une grand joie de voir Jésus …mais avec ses gardes, il le traita avec mépris ; après s’être moqué de lui, et l’avoir revêtu d’une robe éclatante, il le renvoya à Pilate » (Lc 23 8 11). Saint Luc utilise le même verbe : « il-ludere ». Voyez comme l’auteur de cet hymne a médité les Ecritures. Cette mort ne fut rien d’autre que l’ « écroulement d’un Dieu » « catastrophem divinum ». Ce qui justifie  parfaitement le premier verset de cette strophe : « Que l’étoile du soir disparaisse entièrement du ciel, que le soleil entraîne avec lui le jour foudroyé ». Ce spectacle est intolérable à voir. L’auteur a du cœur.

Il va, du reste, contempler maintenant : la Mère et l’Enfant, en cette Rédemption.

« Vous étiez là, ô Mère, assistant au supplice, submergé par le malheur en gardant un cœur inébranlable, tandis que votre enfant, pendu à la Croix meurtrière, poussait de grands cris »

C’est tout simplement sublime !

La strophe commence par le mot « spectator ». Il est mis en premier, au début de la phrase. Elle est comme seule. Elle est spectatrice, observatrice de ce  supplice. Elle est là. « aderas » qui vient de « ad esse », elle est là « spectatrice ». Elle est présente. C’est le sens du verbe « adesse ». Elle n’a nullement fui, comme les disciples. Elle est auprès de son Fils. Elle est Mère, « Parens », une Mère fidèle, toute absorbée dans la contemplation de la scène violente de la Passion de son Fils.

L’auteur va la décrire dans son malheur. Il la voit comme « Malis uda », On traduit ici « submergée par le malheur » Le latin est bien plus descriptif. Il la voit « mouillée, trempée, baignée » de larmes par ce mal qui touche son Fils, mais loin d’être effondrée. Elle est : « gerens cor adamantinum ». Elle garde un  cœur fort. « Adamantinus » veut dire « dur comme le fer, qu’on ne peut briser ». Ce verset fait écho à notre « Stabat Mater dolorosa ». Et le verbe « stare » exprime précisément une attitude ferme, un peu comme le soldat au garde à vous.

«Elle est ferme », alors que son Fils,  – « c’est le sens du mot « Natus » – est « funerea pendulus in Cruce », « est pendu à la Croix cruelle », « funerea ». Là aussi, notre auteur attribue des sentiments à  la Croix : elle est un instrument « cruel ». Il est non seulement pendu à la croix cruelle, mais il pousse des grands cris. « Altos dum gemitus dabat ». « Altus »  veut dire «  haut, élevé ». C’est bien faire, là aussi, écho à l’Evangile qui retient le cri ultime du Christ en Croix « magna voce »: « Le soleil s’obscurcit…Et Jésus s’écria d’une voix forte : Père je remets mon esprit entre vos mains » (Lc 23 47) ; « E clamans voce magna, Jesus ait : in manus tua commendo spiritum meum ».

Cette attitude de fermeté dans la douleur est d’autant plus  sujet d’admiration que l’objet de sa douleur, Son Fils, « Natus », loin d’être absent de son regard, est là, devant elle,, sous ses yeux, « ante oculos »  suspendu sur la Croix  souffrant de combien de douleurs !

Ces douleurs feront l’objet de la troisième strophe :

« Votre Fils suspendu devant vous, déchiré par des coups cruels, votre Fils percé de plaies béantes, ô de quels traits acérés vous a-t-il transpercé ».

« Il est déchiré par des coups cruels », « atrocibus sectus verberibus ». « Atrocibus » de « atrox –ocis » qui veut dire : « atroce, cruel, terrible, dur ». Et de faite, les coups que reçut Notre Seigneur dans  sa Passion, et particulièrement dans sa flagellation et sa crucifixion, méritent bien ce qualificatif : d’atroces, de cruels…

Et l’auteur revient sur la qualité de la victime, sous ses yeux : c’est son Fils, « natus » – ce n’est pas un quidam,- c’est son Fils qui « est percés de plaies béantes » « hiantibus fossus vulneribus », « percé de plaies grandes ouvertes ».

« Fossus » est le participe passé de « fodere » qui décrit bien l’atrocité des plaies.  Il veut dire : « creuser au-dedans, percer, piquer, déchirer ». Ainsi de Notre Seigneur en sa Passion ! La flagellation a déchiré tout son corps, les épines du couronnement  ont  pénétré douloureusement le cuir chevelu. Ne parlons pas des plaies de ses mains,  de ses pieds : les clous ont creusés profondément tous ses membres.

On comprend qu’un tel spectacle puisse déchirer le cœur d’une mère par leur atrocité. C’est ce que médite maintenant notre auteur : « ô de quel traits acérés vous a-t-il transpercée » ; « Quot penetrantibus Te confixit aculeis ». « Aculeus » c’est « l’aiguillon », c’est « la pointe » qui ne reste pas seulement à la surface, mais qui pénètre  profondément. « Confixit » de « configere » qui veut dire « percer, clouer ». Et l’auteur précise même – pour que l’on ne se fasse pas d’illusion- que ces aiguillions ont profondément pénétrés dans la victime. Mais quelle est, cette fois, la victime, c’est  la Mère : « quot pentrantibus Te confixit aculeis ». L’auteur rappelle ici la prophétie du prophète Siméon : « Un glaive transpercera votre âme » (Lc 2 35). L’annonce s’accomplit ici même, au pied de la Croix. Les souffrances du Christ, son Fils, sont raison de ce glaive annoncée par Siméon et aujourd’hui réalisé. Quelles étaient mystérieuses les paroles de Siméon. Aujourd’hui elles trouvent toute leur explication.

Et notre auteur poursuit la méditation de la Passion dans une strophe au style très nerveux comprenant une série de mots brefs,  qui en est un beau résumé, une description sublime. Voyez :

« Hélas, les crachats, les soufflets, les coups, le fiel, l’absinthe, l’éponge, la lance, la soif, les épines, le sang, comme tout cela a torturé de mille manières votre cœur compatissant ! »

N’est-ce pas rappeler toutes les atrocités de la Passion du Seigneur.  De fait, il a connu les crachats, les soufflets, les coups, le fiel, l’absinthe, l’éponge, la lance, la soif, « J’ai soif », les épines, « la couronne d’épine », le sang. « la lance » transperçant son côté. Il en sortit du sang, au témoignage de l’Apôtre Jean. Il suffit de se remémorer le lent déroulement de la Passion du Christ pour voir l’exactitude de tous ces dix mots. Cette synthèse est, je trouve, très émouvante. On comprend que tout cela ait pu torturer le cœur compatissant de la Mère. Le latin est sublime : « quam varia pium Cor pressere tyrannide ». « Pressere » de « premere » qui veut dire : « presser, serrer, accabler, serrer de près ». Vous le voyez, le sens du verbe est déjà à lui-même très fort. Mais cela ne suffit pas à l’auteur, il  ajoute « tyrannide ». Tout cela exprime la profondeur de la souffrance qu’a connue  la Mère au pied de la Croix, d’autant qu’elle assista à ces scènes d’un « cœur compatissant », en latin, nous avons  d’un cœur « pium ». C’est plus que la compassion. « Pius » veut dire : « affectueux, tendre, dévoué ».

Et malgré ces douleurs si vives, La Vierge reste ferme. C’est ce qu’exprime dans une autre strophe merveilleuse l’auteur de l’hymne :

« Cependant vous restez debout, plus généreuse que tous les martyrs, ô Vierge ; par un prodige inouï, mourant sans mourir, ô Mère, clouée par de si dures douleurs »

Et là nous retrouvons notre verbe « stare » : « être ferme, être droit, immobile ». « Cunctis interea stas generosior, Virgo, martyribus ». Ce verbe veut dire : « être debout, être immobile, demeurer ferme, résister, durer, rester fidèle ». Telle est l’attitude de la Mère affligée en cette Passion. On ne peut trouver un meilleur mot pour exprimer la force d’âme de Marie en la Passion de son Fils. Elle n’est pas écroulée, mais ferme et résolue.

L’auteur exprime merveilleusement l’attitude de la Mère, « Parens » au pied de la Croix. Elle est là comme « mourante », comme clouée à la Croix avec son Fils « diris fixa doloribus » «  blessée, transpercée de si graves douleurs, cependant sans mourir, « moriens non moreris ». Elle aurait dû mourir comme son Fils, volontairement, dans un grand cri de douleur, …Mais non, il fallait qu’elle soit, aussi, à la naissance de l’Eglise, au jour de la Pentecôte…

La conclusion s’impose dans l’ultime strophe : une humble prière, l’humble prière d’avoir la force d’imiter une telle force dans les difficultés de la vie :

« Gloire, louange, honneur à la Trinité suprême, à qui je demande humblement par une instante prière d’imiter, dans le malheur, la force d’âme de la Vierge » Amen.

 

 

 

 

 

Hymnes

Les Vêpres

de la fête 

 Des sept douleurs de la Sainte Vierge

Je vous ai dit souvent que les hymnes de notre sainte liturgie sont d’une richesse extraordinaire. Ils sont non seulement de vrais poèmes, des morceaux choisis de belle littérature, mais aussi, toujours, de vraie contemplation des mystères chrétiens.

Cet hymne des Vêpres de cette fête des 7 douleurs de la Vierge en est un exemple merveilleux.

L’auteur contemple la Passion du Christ, ses souffrances et celles qu’a connues Notre Dame, fidèle, immobile au pied de la Croix.

« Que l’étoile du soir disparaisse entièrement du ciel, que le soleil entraine avec lui le jour foudroyé, tandis que je célèbre la dérision de l’horrible meurtre et l’écroulement d’un Dieu »

Il y a dans cette strophe un ordre de l’auteur : « Que disparaisse l’étoile du soir…que le soleil entraine avec lui le jour foudroyé ». Ce sont des ordres solennels aux astres célestes, des commandements étonnants. Mais qu’elle en est la raison ? C’est qu’il va contempler le déroulement de la Rédemption aux événements très cruels, cruauté qui a de quoi choquer, même les puissances célestes, créatures de Dieu. Cette injonction à l’adresse des  puissances célestes : « Que l’étoile du soir disparaisse entièrement du ciel, que le soleil entraine avec lui le jour foudroyé » exprime l’émotion de l’âme pieuse de notre auteur devant la Croix. Ces créatures de Dieu, qui sont la manifestation de  la toute-puissance de Dieu, ne peuvent voir cette scène terrible : d’un Dieu terrassé, humilié. Elles doivent s’éloigner comme on éloigne un enfant d’un spectacle horrible…Et  cette remarque s’inspire, du reste, du récit évangélique lui-même. Il y eut précisément un obscurcissement du ciel au moment de la crucifixion du Dieu de Majesté, comme si le soleil s’était retiré ne pouvant souffrir un tel spectacle. Les trois synoptiques sont formels. Saint Luc, comme les deux autres, note bien : « Il était environ la sixième heure, quand des ténèbres couvrirent toute la terre jusqu’à la neuvième heure. Le soleil s’obscurcit…» (Lc 23 44 45)

Le texte latin fait parfaitement ressortir ce sentiment d’horreur que veut exprimer l’auteur de cet hymne : « Sol attonitum  praecipet diem ». « Attonitus » est un adjectif  très fort ; il veut dire frappé de stupeur, stupéfait, confondu. C’est l’accusatif, il s’accorde avec « diem », ce jour est frappé d’étonnement devant le spectacle de la Croix. Que le soleil et donc la clarté du jour,  se retirent  pour ne pas voir ce spectacle affreux , d’un Dieu humilié, « écroulé »!

Et la description de la Rédemption est exprimée en terme très fort : « tandis que je célèbre la dérision de l’horrible meurtre et l’écroulement d’un Dieu »

Cette Rédemption ne fut rien d’autre qu’une mort. L’auteur utilise le mot « nex, necis » et non pas simplement «  mors », car elle fut « horrible », mieux « féroce, cruel ». C’est le sens du mot latin « saevus ». Un autre qualificatif est donné à cette Passion du Christ. Elle fut « ludibrius ».Elle  fut une vraie « dérision ». « Ludibrius », en latin, veut dire « risée, le jouet, objet de risée. Ce mot vient de « ludus » qui veut dire : « jeu, amusement, divertissement ». Mais ne fut-ce pas le comportement d’Hérode face au Christ ; ne se moqua-t-il pas de lui.  C’est expressément dit dans saint Luc : « Hérode eut une grand joie de voir Jésus …mais avec ses gardes, il le traita avec mépris ; après s’être moqué de lui, et l’avoir revêtu d’une robe éclatante, il le renvoya à Pilate » (Lc 23 8 11). Saint Luc utilise le même verbe : « il-ludere ». Voyez comme l’auteur de cet hymne a médité les Ecritures. Cette mort ne fut rien d’autre que l’ « écroulement d’un Dieu » « catastrophem divinum ». Ce qui justifie  parfaitement le premier verset de cette strophe : « Que l’étoile du soir disparaisse entièrement du ciel, que le soleil entraîne avec lui le jour foudroyé ». Ce spectacle est intolérable à voir. L’auteur a du cœur.

Il va, du reste, contempler maintenant : la Mère et l’Enfant, en cette Rédemption.

« Vous étiez là, ô Mère, assistant au supplice, submergé par le malheur en gardant un cœur inébranlable, tandis que votre enfant, pendu à la Croix meurtrière, poussait de grands cris »

C’est tout simplement sublime !

La strophe commence par le mot « spectator ». Il est mis en premier, au début de la phrase. Elle est comme seule. Elle est spectatrice, observatrice de ce  supplice. Elle est là. « aderas » qui vient de « ad esse », elle est là « spectatrice ». Elle est présente. C’est le sens du verbe « adesse ». Elle n’a nullement fui, comme les disciples. Elle est auprès de son Fils. Elle est Mère, « Parens », une Mère fidèle, toute absorbée dans la contemplation de la scène violente de la Passion de son Fils.

L’auteur va la décrire dans son malheur. Il la voit comme « Malis uda », On traduit ici « submergée par le malheur » Le latin est bien plus descriptif. Il la voit « mouillée, trempée, baignée » de larmes par ce mal qui touche son Fils, mais loin d’être effondrée. Elle est : « gerens cor adamantinum ». Elle garde un  cœur fort. « Adamantinus » veut dire « dur comme le fer, qu’on ne peut briser ». Ce verset fait écho à notre « Stabat Mater dolorosa ». Et le verbe « stare » exprime précisément une attitude ferme, un peu comme le soldat au garde à vous.

«Elle est ferme », alors que son Fils,  – « c’est le sens du mot « Natus » – est « funerea pendulus in Cruce », « est pendu à la Croix cruelle », « funerea ». Là aussi, notre auteur attribue des sentiments à  la Croix : elle est un instrument « cruel ». Il est non seulement pendu à la croix cruelle, mais il pousse des grands cris. « Altos dum gemitus dabat ». « Altus »  veut dire «  haut, élevé ». C’est bien faire, là aussi, écho à l’Evangile qui retient le cri ultime du Christ en Croix « magna voce »: « Le soleil s’obscurcit…Et Jésus s’écria d’une voix forte : Père je remets mon esprit entre vos mains » (Lc 23 47) ; « E clamans voce magna, Jesus ait : in manus tua commendo spiritum meum ».

Cette attitude de fermeté dans la douleur est d’autant plus  sujet d’admiration que l’objet de sa douleur, Son Fils, « Natus », loin d’être absent de son regard, est là, devant elle,, sous ses yeux, « ante oculos »  suspendu sur la Croix  souffrant de combien de douleurs !

Ces douleurs feront l’objet de la troisième strophe :

« Votre Fils suspendu devant vous, déchiré par des coups cruels, votre Fils percé de plaies béantes, ô de quels traits acérés vous a-t-il transpercé ».

« Il est déchiré par des coups cruels », « atrocibus sectus verberibus ». « Atrocibus » de « atrox –ocis » qui veut dire : « atroce, cruel, terrible, dur ». Et de faite, les coups que reçut Notre Seigneur dans  sa Passion, et particulièrement dans sa flagellation et sa crucifixion, méritent bien ce qualificatif : d’atroces, de cruels…

Et l’auteur revient sur la qualité de la victime, sous ses yeux : c’est son Fils, « natus » – ce n’est pas un quidam,- c’est son Fils qui « est percés de plaies béantes » « hiantibus fossus vulneribus », « percé de plaies grandes ouvertes ».

« Fossus » est le participe passé de « fodere » qui décrit bien l’atrocité des plaies.  Il veut dire : « creuser au-dedans, percer, piquer, déchirer ». Ainsi de Notre Seigneur en sa Passion ! La flagellation a déchiré tout son corps, les épines du couronnement  ont  pénétré douloureusement le cuir chevelu. Ne parlons pas des plaies de ses mains,  de ses pieds : les clous ont creusés profondément tous ses membres.

On comprend qu’un tel spectacle puisse déchirer le cœur d’une mère par leur atrocité. C’est ce que médite maintenant notre auteur : « ô de quel traits acérés vous a-t-il transpercée » ; « Quot penetrantibus Te confixit aculeis ». « Aculeus » c’est « l’aiguillon », c’est « la pointe » qui ne reste pas seulement à la surface, mais qui pénètre  profondément. « Confixit » de « configere » qui veut dire « percer, clouer ». Et l’auteur précise même – pour que l’on ne se fasse pas d’illusion- que ces aiguillions ont profondément pénétrés dans la victime. Mais quelle est, cette fois, la victime, c’est  la Mère : « quot pentrantibus Te confixit aculeis ». L’auteur rappelle ici la prophétie du prophète Siméon : « Un glaive transpercera votre âme » (Lc 2 35). L’annonce s’accomplit ici même, au pied de la Croix. Les souffrances du Christ, son Fils, sont raison de ce glaive annoncée par Siméon et aujourd’hui réalisé. Quelles étaient mystérieuses les paroles de Siméon. Aujourd’hui elles trouvent toute leur explication.

Et notre auteur poursuit la méditation de la Passion dans une strophe au style très nerveux comprenant une série de mots brefs,  qui en est un beau résumé, une description sublime. Voyez :

« Hélas, les crachats, les soufflets, les coups, le fiel, l’absinthe, l’éponge, la lance, la soif, les épines, le sang, comme tout cela a torturé de mille manières votre cœur compatissant ! »

N’est-ce pas rappeler toutes les atrocités de la Passion du Seigneur.  De fait, il a connu les crachats, les soufflets, les coups, le fiel, l’absinthe, l’éponge, la lance, la soif, « J’ai soif », les épines, « la couronne d’épine », le sang. « la lance » transperçant son côté. Il en sortit du sang, au témoignage de l’Apôtre Jean. Il suffit de se remémorer le lent déroulement de la Passion du Christ pour voir l’exactitude de tous ces dix mots. Cette synthèse est, je trouve, très émouvante. On comprend que tout cela ait pu torturer le cœur compatissant de la Mère. Le latin est sublime : « quam varia pium Cor pressere tyrannide ». « Pressere » de « premere » qui veut dire : « presser, serrer, accabler, serrer de près ». Vous le voyez, le sens du verbe est déjà à lui-même très fort. Mais cela ne suffit pas à l’auteur, il  ajoute « tyrannide ». Tout cela exprime la profondeur de la souffrance qu’a connue  la Mère au pied de la Croix, d’autant qu’elle assista à ces scènes d’un « cœur compatissant », en latin, nous avons  d’un cœur « pium ». C’est plus que la compassion. « Pius » veut dire : « affectueux, tendre, dévoué ».

Et malgré ces douleurs si vives, La Vierge reste ferme. C’est ce qu’exprime dans une autre strophe merveilleuse l’auteur de l’hymne :

« Cependant vous restez debout, plus généreuse que tous les martyrs, ô Vierge ; par un prodige inouï, mourant sans mourir, ô Mère, clouée par de si dures douleurs »

Et là nous retrouvons notre verbe « stare » : « être ferme, être droit, immobile ». « Cunctis interea stas generosior, Virgo, martyribus ». Ce verbe veut dire : « être debout, être immobile, demeurer ferme, résister, durer, rester fidèle ». Telle est l’attitude de la Mère affligée en cette Passion. On ne peut trouver un meilleur mot pour exprimer la force d’âme de Marie en la Passion de son Fils. Elle n’est pas écroulée, mais ferme et résolue.

L’auteur exprime merveilleusement l’attitude de la Mère, « Parens » au pied de la Croix. Elle est là comme « mourante », comme clouée à la Croix avec son Fils « diris fixa doloribus » «  blessée, transpercée de si graves douleurs, cependant sans mourir, « moriens non moreris ». Elle aurait dû mourir comme son Fils, volontairement, dans un grand cri de douleur, …Mais non, il fallait qu’elle soit, aussi, à la naissance de l’Eglise, au jour de la Pentecôte…

La conclusion s’impose dans l’ultime strophe : une humble prière, l’humble prière d’avoir la force d’imiter une telle force dans les difficultés de la vie :

« Gloire, louange, honneur à la Trinité suprême, à qui je demande humblement par une instante prière d’imiter, dans le malheur, la force d’âme de la Vierge » Amen.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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