Le désastre généralisé de la messe en français
publié dans flash infos le 30 décembre 2009
On lit, dans Présent du 31 décembre 2009, le numéro 7000, ce commentaire de Jean Madiran sur la baisse de la pratique religieuse en France, (4,5 %), fruit de la nouvelle messe en français.
Le désastre généralisé de la messe en français
• Bilan dans La Croix. Non pas de l’année qui s’achève, mais du désastre catholique, sur quarante ans, de 1965 (fin du Concile) à 2005 (élection de Benoît XVI). C’est le désastre des « messalisants », c’est-à-dire des catholiques allant chaque dimanche à la messe. En 1965, ils étaient 27 % de la population française. Ils ne sont plus que 4,5 % en 2005.
Ce bilan catastrophique se fonde sur une comparaison, aux diverses époques, de sondages d’opinion. Les sondages ne sont pas une science exacte. Mais ils ne peuvent pas inventer une chute de 27 à 4,5. La France est aujourd’hui, selon La Croix (et l’Ifop), « le pays catholique où la pratique dominicale est la plus basse ».
• Cette chute verticale de l’assistance à la messe est d’environ 12 % sous le pontificat de Paul VI et 11 % sous celui de Jean-Paul II. Puisqu’il s’agit de la messe, il est inévitable d’observer qu’un tel désastre est contemporain de l’interdiction de la messe traditionnelle par l’obligation d’une messe nouvelle en français.
On invoquera d’autres causes au désastre. Mais la messe en français reste la principale cause prochaine. Il faut se souvenir des raisons de l’institution d’une messe nouvelle, telles qu’elles ont été énoncées par Paul VI. Il s’agissait de sacrifier le latin et les magnifiques vêtements de la liturgie traditionnelle, dont il ne niait pas l’éclat merveilleux, mais qui étaient selon lui un obstacle à la participation des masses populaires, des journalistes et des hommes d’affaires. La nouvelle messe était donc explicitement imposée pour remplir les églises. Elle les a vidées.
• Isabelle de Gaulmyn, qui présente et commente ces chiffres terribles dans La Croix, s’en montre modérément atterrée. Elle a cru bon d’aller en demander l’explication à un « historien à l’Ecole pratique des hautes études ». On l’a connue moins mal inspirée. Ce personnage se nomme Denis Pelletier, et il a donné l’époustouflante consultation que voici :
« La courbe plonge à partir des années 1970, au moment où, après l’audace post-conciliaire des débuts, l’Eglise revenait à des positions plus classiques. »
Les années 1970 sont au contraire celles où bat son plein la plus spectaculaire et la plus scandaleuse « audace post-conciliaire », la suppression de la messe traditionnelle, abusivement remplacée par la messe en français, bavarde et démago.
Isabelle de Gaulmyn s’appuie sur la sentence paradoxale de l’historien Pelletier pour accentuer le paradoxe :
« La courbe historique [du désastre] montre en tout cas que l’on ne peut attribuer, comme certains l’ont fait, ce décrochage à Vatican II. »
Ah, bon, l’essentiel est sauvé.
• A la page suivante du même numéro de La Croix (29 décembre), Frédéric Mounier, qui a remplacé à Rome Isabelle de Gaulmyn, nous rapporte un propos bien consolant du cardinal Poupard :
« Il faut se souvenir de l’homélie de Paul VI lors de l’ouverture de son pontificat. Pour lui, avant de parler, l’Eglise devait se faire écoute. Ce fut le thème de sa première encyclique. De même (…), il n’a pas condamné la jeunesse en ébullition. Il s’est interrogé : – Saurons-nous les comprendre ? »
Que le Cardinal se rassure. On s’en est beaucoup souvenu. La hiérarchie ecclésiastique, sauf Benoît XVI et quatre ou cinq évêques, écoute d’abord, écoute avant tout, écoute énormément les « tendances actuelles ». Si bien que ce n’est plus guère : « Allez enseigner toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » (Mt 28, 19). Ce n’est plus guère ; « Allez dans le monde entier, proclamer l’Evangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé ; celui qui ne croira pas sera condamné » (Mc 16,15-16). C’est plutôt : Allez écouter ce qu’on dit dans le monde, comprenez leurs désirs, accompagnez leurs problèmes…
Alors, qu’on ne s’étonne pas : même les chiffres se mettent à hurler.
JEAN MADIRAN
Article extrait du n° 7000 de PRESENT du Jeudi 31 décembre 2009