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Entraide et Tradition

L’incendie de la cathédrale de Nantes

publié dans regards sur le monde le 25 juillet 2020


L’incendie de la cathédrale de Nantes.

La haine contre les chrétiens se répand, mais personne ne la reconnaît et personne ne les défend. Au contraire

Antonio Socci
19 juillet 2020
Ma traduction

Des siècles de foi, d’histoire et d’art réduits en cendres: de même que sont réduites en cendres notre âme, notre identité. Cette fois, l’incendie a frappé la cathédrale gothique de Nantes. Après l’incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris en avril 2019, c’est un autre coup très dur porté à la chrétienté française millénaire. Et si pour Notre Dame l’attentat a été exclu (mais on attend d’autres explications convaincantes), dans le cas de Nantes, la piste de l’incendie criminel est en cours d’investigation. Avant cela, il y avait déjà eu l’incendie de la célèbre église Saint-Sulpice, également à Paris et de nombreuses autres églises catholiques.

Selon les données officielles du ministère de l’intérieur, en 2018, il y a eu 1 063 « faits anti-chrétiens » et en 2017, 1 038. Il s’agit d’églises brûlées, vandalisées, pillées ou profanées en France. Un chiffre énorme! Mais personne ne parle de la christianophobie et personne ne fait de lois pour protéger les chrétiens.

Pourtant, l’attaque contre l’Église et la volonté de détruire toute trace de christianisme sont évidentes. Il est clair que le catholicisme est aujourd’hui la cible d’une haine violente qui conduit à la profanation, au pillage, à la destruction de statues, à la dévastation de tabernacles, à la dispersion d’hosties et d’écrits tracés avec des excréments.

Il y a même un terrorisme qui est allé jusqu’à égorger un prêtre sur l’autel: c’est ce qui est arrivé au pauvre père Jacques Hamel, à Saint-Étienne-du-Rouvray, le 26 juillet 2016.

« A la fin de la messe », rappelle Vatican News, « le père Hamel, 85 ans, a été massacré par deux extrémistes qui avaient prêté serment d’allégeance à l’Etat islamique. Avant d’être tué, le prêtre a été forcé de s’agenouiller. Ses derniers mots ont été : « Va-t’en, Satan! », « Eloigne-toi de moi, Satan! ».

Le pape Bergoglio, dans une messe de suffrage, a justement voulu rappeler ses dernières paroles et a ajouté : « Le père Jacques Hamel a été égorgé sur la croix, au moment où il célébrait le sacrifice de la croix du Christ. Un homme bon, doux et fraternel, qui a toujours essayé de faire la paix, il a été assassiné comme s’il était un criminel. C’est le fil conducteur satanique de la persécution ».

En fait, c’est une haine anti-chrétienne qui se déchaîne aujourd’hui sans aucune raison, et même sans aucun prétexte.

Lorsque, en 2002, j’ai publié mon livre  “I nuovi perseguitati” , j’ai été bouleversé par les dimensions inconnues du martyre des chrétiens au XXe siècle, commencé avec le génocide des Arméniens, poursuivi avec les massacres qui ont eu lieu sous les totalitarismes, en particulier sous le communisme, et qui continue encore.

Mais j’ai été encore plus frappé par les dimensions inconnues de la persécution qui continue à avoir lieu dans tous ces régimes islamiques ou communistes ou de toute façon autoritaires dans lesquels les chrétiens sont des communautés sans défense, souvent marginales et totalement inoffensives, auxquelles personne ne peut imputer aucune faute.

Tout cela, à l’époque, en 2002, on ne le lisait pas dans les journaux, mais encore aujourd’hui où les nouvelles parlent du martyre des chrétiens – souvent horrible – , on ne reconnaît pas l’énormité de la persécution et de la haine dont ils sont victimes et on évite de les reconnaître comme victimes et d’en tirer les conséquences civiles et politiques.

Encore aujourd’hui, dans le « Corriere della sera » (en pages intérieures), on peut trouver un titre comme celui-ci: « Pakistan: Christian meurt brûlé vif parce qu’il ne voulait pas se convertir à l’Islam ». Résumé: « Sa femme dénonce les violences subies aux policiers qui la violent devant ses deux enfants de 7 et 12 ans ».

Mais ici, chez nous, ces cas – qui ne sont nullement isolés – ne suscitent pas une sensibilité plus grande à la condition des chrétiens. Pourtant – évidemment sous une forme pacifique, et non violente conforme au style chrétien – il y aurait tout lieu de voir naître un mouvement « Christian Lives Matter » (pour reprendre une formule en vogue aujourd’hui).

Malheureusement, c’est souvent la hiérarchie catholique elle-même qui évite de parler de persécutions et de martyrs et qui dialogue avec des régimes et des idéologies adverses, parfois même jusqu’à la capitulation.

L’échec de cette capitulation excessive est évident. Il suffit de considérer la recrudescence des persécutions en Chine, après cette capitulation qu’est l’accord secret entre le Vatican et Pékin, ou la récente transformation de la basilique Sainte-Sophie en mosquée, après toutes les ouvertures controversées du pape sur le monde islamique.

Il existe aujourd’hui un assentiment ecclésiastique analogue envers l’idéologie laïciste qui se répand en Europe depuis 25 ans et qui a voulu l’effacement des « racines judéo-chrétiennes » du texte constitutionnel.

C’est la France qui s’est le plus opposée à cette référence aux racines chrétiennes et quand, à cause de l’incendie de Notre Dame, une vague d’émotion a déferlé sur ce pays, on a remarqué la gêne du président Macron pour exprimer la douleur de son peuple : il aurait dû reconnaître que la cathédrale n’était pas seulement un « monument national », mais qu’elle exprimait l’âme catholique de l’histoire française. Et il ne l’a pas fait.

Même en ce qui concerne la culture laïque qui domine l’élite européenne, la main tendue de la hiérarchie du Vatican n’a produit aucune ouverture, mais – au contraire – il existe une tentation de limiter et de conditionner la liberté d’enseignement de l’Église. Il ne suffit donc pas de faire la propagande d’une Église qui « ne veut pas avoir d’ennemis » pour n’en avoir aucun.

Mais les incendies de Nantes et de Notre-Dame ne concernent pas seulement les catholiques: c’est aussi la France laïque (avec l’Europe laïque) qui doit décider une fois pour toutes ce qu’elle veut faire de son histoire et de son identité.

On a rappelé à juste titre que même dans les cas où des églises s’effondrent ou brûlent pour des raisons accidentelles, c’est dû à la négligence de l’État français qui en a la gestion exclusive : c’est donc un signe de désintérêt culturel et politique. Marcel Proust était amoureux des cathédrales et comme peu d’autres, il les a défendues et a célébré leur importance pour nous. Mais aujourd’hui ?

Notre Dame a été construite en 300 ans et en quelques heures elle a été dévastée. La cathédrale de Nantes aussi. La grande bataille d’aujourd’hui est – comme le disait Charles Péguy, grand poète de la France chrétienne – entre le « parti de la charrue » et le « parti de la poudrière ».

Entre le parti de ceux qui travaillent pendant des mois pour faire pousser un champ de blé et ceux qui, avec un briquet, le brûlent en une heure.

L’Église a mis des siècles à « civiliser » les peuples d’Europe et à leur enseigner la dignité de tout homme, la liberté, le devoir de fraternité, l’amour, le caractère sacré de la vie, l’aspiration à la vérité, la beauté et l’éternité. Voulons-nous brûler tout cet héritage et sombrer dans un nihilisme sans racines, sans Dieu, sans beauté et sans patrie ?

 

(Source: Benoît et moi)

Revue-Item.com

 

 

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