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Entraide et Tradition

Méditation du temps de l’Ascension sur l’hymne des Laudes et des Vêpres

publié dans couvent saint-paul le 10 avril 2021


Hymnes du temps de l’Ascension

Hymnes des Laudes et des Vêpres

Salutis humanae sator

 

 

« « Salútis humánæ Sator, Iesu, volúptas córdium Orbis redémpti Cónditor, Et casta lux amántium » «    Auteur du salut de l’homme, Jésus, la joie des cœurs, Créateur du monde racheté, et chaste lumière de ceux qui vous aiment »

Cette hymne est tout à l’honneur du Christ. Elle chante ses qualités, ses grandeurs, son rôle unique dans le mystère de la Rédemption. En raison de ce rôle, il est  « la joie des cœurs » et « la lumière de ceux qui l’aiment ».

Tout d’abord l’hymne chante ses qualités. Il est «  l’auteur du salut de l’homme » « salutis humane sator ». C’est bien ainsi que les Evangiles nous le présentent. C’est l’affirmation magnifique de saint Pierre, plein de courage et de foi  devant le sanhédrin après la guérison du boiteux à l’entrée du Temple : « Le lendemain, leurs chefs, les Anciens et les Scribes, s’assemblèrent à Jérusalem, avec Anne, le grand prêtre, Caïphe, Jean, Alexandre, et tous ceux qui étaient de la famille pontificale. Et ayant fait comparaître les Apôtres devant eux, ils leur demandèrent :  » Par quelle puissance ou au nom de qui avez-vous fait cela ?  » Alors Pierre, rempli du Saint-Esprit, leur dit :  » Chefs du peuple et Anciens d’Israël : si l’on nous interroge aujourd’hui, sur un bienfait accordé à un infirme, pour savoir comment cet homme a été guéri, sachez-le bien, vous tous, et tout le peuple d’Israël : C’est par le nom de Jésus-Christ de Nazareth, que vous avez crucifié et que Dieu a ressuscité des morts, c’est par lui que cet homme se présente devant vous pleinement guéri. Ce Jésus est la pierre rejetée par vous de l’édifice, et qui est devenue la pierre angulaire. Et le salut n’est en aucun autre ; car il n’y a pas sous le ciel un autre nom qui ait été donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés. ».Il est le Sauveur. C’est le chant de l’Ange, la Nuit de Noël : « un Sauveur vous est donné ».

On pourrait citer de nombreux textes qui affirment ce mystère. Il n’est donc pas étonnant que  le Concile de Trente, s’appuyant sur ces textes,  enseigne ce dogme du salut par le Christ et par nul autre : « Si quelqu’un affirme que (le) péché d’Adam – qui est un par son origine et. transmis par propagation héréditaire et non par imitation, est propre à chacun –, est enlevé par les forces de la nature humaine ou par un autre remède que le mérite de l’unique médiateur notre Seigneur Jésus Christ  qui nous a réconciliés avec Dieu dans son sang (Rm 5,9), “devenu pour nous justice, sanctification et Rédemption” (1Co 1,30) ou s’il nie que ce mérite de Jésus Christ soit appliqué aussi bien aux adultes qu’aux enfants par le sacrement conféré selon la forme et l’usage de l’Église : qu’il soit anathème. Car “il n’est pas d’autre nom sous le ciel qui ait été donné aux hommes par lequel nous devons être sauvés” (Ac 4,12). D’où cette parole : “Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du monde” (Jn 1,19,) et celle-ci “Vous tous qui avez été baptisés. vous avez revêtu le Christ” (Ga 3,27).

C’est à lire à genou !

En conséquence, nous dit notre auteur, il est : « Créateur du monde racheté » « orbi redempti conditor », « créateur du monde des rachetés ». Et puisqu’il en est ainsi, il est: «  la joie des cœurs » et « la chaste lumière de ceux qui (l’) aiment ». Comment, en effet ne pas aimer Celui qui a accompli un tel salut avec la somme de souffrances qu’il accepta de subir pour la réalisation de ce salut ? Nous retrouverons ces deux idées exprimées en la dernière strophe.

« Qua victus es cleméntia, Ut nostra ferres crímina ? Mortem subíres ínnocens, A morte nos ut tólleres ? » «   Quelle clémence vous vainquit pour que vous portiez nos crimes ?  Innocent, vous subissiez la mort, pour nous arracher à la mort ?

Cette strophe est magnifique. Elle affirme que cette œuvre de salut est une œuvre d’amour, de miséricorde, de clémence. « Clementissime Pater », dira le Canon Romain. « Qua victus es cleméntia, Ut nostra ferres crímina ? Je traduirais plus nerveusement que la traduction proposée : « Par quelle clémence vous fûtes vaincu pour porter nos crimes ». Le « qua » est mis en avant dans le texte latin. Il faut lui donner toute sa valeur dans la traduction française. Notre auteur exprime ici  parfaitement l’œuvre de la Rédemption : le Christ porta nos péchés, raison de ses souffrances et cause de notre Salut.  Il faut se souvenir du texte du Serviteur souffrant d’Isaïe qui enseigne la même chose : « 1 Qui a cru ce que nous avons entendu, et à qui le bras de Yahweh a-t-il été révélé ? 2 Il s’est élevé devant lui comme un frêle arbrisseau ; comme un rejeton qui sort d’une terre desséchée ; il n’avait ni forme ni beauté pour attirer nos regards, ni apparence pour exciter notre amour. 3 Il était méprise et abandonné des hommes, homme de douleurs et familier de la souffrance, comme un objet devant lequel on se voile la face ; en butte au mépris, nous n’en faisions aucun cas. 4 Vraiment c’était nos maladies qu’il portait, et nos douleurs dont il s’était chargé ; et nous, nous le regardions comme un puni, frappé de Dieu et humilié. 5 Mais lui, il a été transpercé à cause de nos péchés, broyé à cause de nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix a été sur lui, et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. 6 Nous étions tous errants comme des brebis, chacun de nous suivait sa propre voie ; et Yahweh a fait retomber sur lui l’iniquité de nous tous. 7 On le maltraite, et lui se soumet et n’ouvre pas la bouche, semblable à l’agneau qu’on mène à la tuerie, et à la brebis muette devant ceux qui la tondent ; il n’ouvre point la bouche. 8 Il a été enlevé par l’oppression et le jugement, et, parmi ses contemporains, qui a pensé qu’il était retranché de la terre des vivants, que la plaie le frappait à cause des péchés de mon peuple ? 9 On lui a donné son sépulcre avec les méchants, et dans sa mort il est avec le riche, alors qu’il n’a pas commis d’injustice, et qu’il n’y a pas de fraude dans sa bouche. 10 Il a plu à Yahweh de le briser par la souffrance ; mais quand son âme aura offert le sacrifice expiatoire, il verra une postérité, il prolongera ses jours, et le dessein de Yahweh prospérera dans ses mains. 11 A cause des souffrances de son âme, il verra et se rassasiera. Par sa connaissance le juste, mon Serviteur, justifiera beaucoup d’hommes, et lui-même se chargera de leurs iniquités.
12 C’est pourquoi je lui donnerai sa part parmi les grands ; il partagera le butin avec les forts. Parce qu’il a livré son âme à la mort et qu’il a été compté parmi les malfaiteurs ; et lui-même a porté la faute de beaucoup, et il intercédera pour les pécheurs »
  (53 1-12).

« Innocent, vous subissiez la mort, pour nous arracher à la mort » « Mortem subíres ínnocens, A morte nos ut tólleres »

Il sera la Victime innocente de son sacrifice. Et par son sacrifice nous libérera de du péché et de la mort, conséquence du péché, selon l’enseignement de saint Paul : « Stipendia peccati mors » «  le salaire du péché c’est la mort ».  Par son Sacrifice sur la Croix qui se perpétue sur nos autels, ce qui en fait la grandeur, Il nous donne la vie, la vie de l’âme, la vie éternelle. Expliquons ! Car Dieu trouve toute apaisement dans l’oblation du Sacrifice du Fils, tant il est parfait. En effet le sacrifice du Christ, la messe qui le perpétue, n’est pas seulement un sacrifice de louange et d’action de grâce, mais encore un vrai sacrifice de propitiation qui apaise Dieu et nous le rend favorable.  Si donc nous immolons et si nous offrons cette victime très sainte avec un cœur pur, une foi vive et une douleur intense de nos péchés, nous obtiendrons infailliblement miséricorde de la part du Seigneur et le secours de sa grâce dans tous nos besoins. Le parfum qui s’exhale de ce sacrifice lui est si agréable qu’il ne peut rien nous refuser, il nous accorde les dons de la grâce et du repentir, Il nous  pardonne nos péchés. Aussi l’Eglise dit-elle dans une de ses Prières solennelles : « Chaque fois que nous renouvelons la célébration de ce sacrifice, nous opérons l’œuvre de notre salut » (Secrète du 9 dim après la Pentecôte).  Car tous les mérites si abondants de  la Victime sanglante qui est Jésus, se répandent sur nous par ce sacrifice non sanglant. (Cat du Concile de Trente  (§ 8).

 

« Perrúmpis inférnum chaos : Vinctis caténas détrahis ; Victor triúmpho nóbili Ad déxteram Patris sedes». «   Vous brisez le chaos infernal : vous faites tomber les chaînes des captifs; vainqueur d’un noble triomphe, vous vous asseyez à la droite du Père ».

L’auteur nous rappelle merveilleusement l’action du Christ en la Rédemption. Tout d’abord, « il brise le chaos infernal ». « Perrúmpis inférnum chaos » Le verbe latin « perrumpo » est très expressif. Ce verbe  exprime la force, je dirai même la brutalité. Cette lutte contre Satan fut pour le Christ une action où il exprima force et douceur. Force ! Rappelez-vous l’arrivée de la cohorte pour le capturer. Tous ils furent terrassés.  « Perrumpo » veut dire d’abord « pénétrer de force », « forcer », puis « rompre entièrement », « ouvrir violemment », « enfoncer », « vaincre ». Souvenez-vous aussi du cri que le Christ poussa lorsqu’il remit son âme en les mains de son Père, il s’exclama : « magna voce » «  d’une voix forte: » tout est consommé ».

Il est également intéressant de relever l’expression « infernum chaos » «  Vous brisez le chaos infernal ». Comment faut-il entendre ce « chaos infernal ». L’expression me plait beaucoup. « Chaos » veut dire « confusion, désordre grave, bouleversement ». C’est cette situation qui fut le résultat du péché originel, l’œuvre de Satan. «Satan m’a tenté » dira Eve. Il est bien juste alors de parler du « chaos infernal ». Je trouve que c’est saint Grignon de Montfort qui fait la plus belle description de ce chaos infernal. Il décrit d’abord la beauté de la création de l’homme dans sa justice originel avec les dons préternaturels, puis le péché commis, il contemple la situation de l’homme qui s’en suivit. Un vrai Chaos. Voyez. Vous trouvez ce récit dans son livre « l’Amour de la Sagesse éternelle » :

« 35. Si la puissance et la douceur de la Sagesse éternelle a tant éclaté dans la création, la beauté et l’ordre de l’univers, elle a brillé bien davantage dans la création de l’homme, puisque c’est son chef d’oeuvre, l’image vivante de sa beauté et de ses perfections, le grand vaisseau de ses grâces, le trésor admirable de ses richesses, et son vicaire unique sur la terre: Sapientia tua fecisti hominem, ut dominaretur omni creaturae quae a te facta est. Sap. 9. [Sg 9,2]

  1. Tout dans l’homme était lumineux sans ténèbres, beau sans laideur, pur sans souillure, réglé sans désordre et sans aucune tache ni imperfection. Il avait pour apanage la lumière de la Sagesse dans son esprit, par laquelle il connaissait parfaitement son Créateur et ses créatures. Il avait la grâce de Dieu dans son âme, par laquelle il était innocent et agréable aux yeux du Très-Haut. Il avait dans son corps l’immortalité. Il avait le pur amour de Dieu dans son coeur, sans crainte de la mort, par lequel il l’aimait continuellement, sans relâche, et purement, pour l’amour de lui-même. Enfin il était si divin, qu’il était continuellement hors de lui-même, transporté en Dieu, sans qu’il eût aucune passion à vaincre ni aucun ennemi à combattre. 
    O libéralité de la Sagesse éternelle envers l’homme! O heureux état de l’homme dans son innocence!
  2. Mais, malheur des malheurs! Voilà ce vaisseau tout divin qui se brise en mille morceaux; voilà cette belle étoile qui tombe; voilà ce beau soleil qui est couvert de boue; voilà l’homme qui pèche, et qui, en péchant, perd sa sagesse, son innocence, sa beauté, son immortalité. Et enfin il perd tous les biens qu’il avait reçus, et est assailli d’une infinité de maux. Il a l’esprit tout hébété et ténébreux: il ne voit plus rien. Il a le coeur tout glacé pour Dieu: il ne l’aime plus.
    Il a l’âme toute noire de péchés: elle ressemble au démon. Il a des passions toutes déréglées: il n’en est plus le maître.
    … Voilà l’homme en un instant devenu l’esclave des démons, l’objet de la colère de Dieu et la victime des enfers!
    Il se paraît à lui-même si hideux que de honte il va se cacher. Il est maudit et condamné à la mort; il est chassé du paradis terrestre et il n’en a plus dans les cieux. Il doit mener, sans aucune espérance d’être heureux, une vie malheureuse sur la terre maudite. Il y doit mourir en criminel, et, après sa mort, être comme le diable, à jamais damné dans son corps et dans son âme, lui et tous ses enfants.
    Tel est le malheur épouvantable où l’homme, en péchant, tomba; tel est l’arrêt équitable que la justice de Dieu prononça contre lui.
  3. …. Il se voit chassé du paradis et de la présence de Dieu, il voit la justice de Dieu qui le poursuit avec toute sa postérité; il voit le ciel fermé et l’enfer ouvert, et personne pour lui ouvrir l’un et fermer l’autre ».

Voilà cette victime que la Christ va réparer en sa Passion. « Vous brisez ce chaos infernal ». i.e  Vous le réparez, vous le restaurez dans sa dignité première.

 « Vous faites tomber les chaînes des captifs »,  c’est-à-dire « vous libérez par votre sacrifice  les captifs.  En effet, le sacrifice du Christ est  une satisfaction pleine et entière par laquelle il  paya à Dieu son Père toute la dette de nos péchés. Et  parce que le sacrifice de la Croix fut infiniment agréable à Dieu, à peine Jésus-Christ l’eut-Il offert que la colère et l’indignation de son Père furent entièrement apaisées. « Nos chaînes, alors  tombèrent  de nos membres  grâce à ce sacrifice de la Croix, Dieu nous étant devenus « clément » et « miséricordieux ». Aussi l’Apôtre a-t-il soin de nous faire remarquer que Jésus  s’est livré Lui-même pour nous en s’offrant à Dieu comme une Victime et une oblation d’agréable odeur. » Le prince des Apôtres, a-t-il soin de dire également :  ce n’est ni par l’or ni par l’argent corruptibles que vous avez été rachetés de la vanité de votre vie, que vous avez héritée de vos pères, mais par le Sang précieux de l’Agneau Saint et Immaculé, Notre-Seigneur Jésus-Christ ».

« vous vous asseyez à la droite du Père ». Là, notre auteur confesse le mystère de l’Ascension. En effet après avoir achevé et consommé le mystère de notre Rédemption, Jésus  monta au ciel, comme homme, en son corps et en son âme. Voilà expressément le mystère. Car, comme Dieu, Il y avait toujours été, puisque par sa divinité, Il occupe et remplit tous les lieux.  Notre-Seigneur est monté au ciel par sa propre vertu et non par une force étrangère, comme Elie  qui y fut transporté sur un char de feu, ou comme le Prophète Habacuc , ou le diacre Philippe , qui portés en l’air par la puissance divine, parcoururent ainsi des distances considérables. Et ce n’est pas seulement comme Dieu que Jésus-Christ fit son ascension par cette vertu toute-puissante qu’Il tenait de sa divinité même, mais aussi comme homme. Sans doute un pareil prodige dépasse les forces naturelles, mais la puissance dont son âme bienheureuse était douée, pouvait transporter son corps partout où elle voulait. Et son corps, déjà glorifié, obéissait sans peine aux ordres de l’âme dans tous les mouvements qu’elle lui imprimait.

Voilà pourquoi nous croyons que Jésus-Christ est monté au ciel par sa propre vertu, et comme homme et comme Dieu.

Voilà ce que nous apprend le catéchisme. Mais l’auteur ajoute : vous vous asseyez à la droite du Père ». Comment comprendre cette expression. Voici !

Parce que, parmi les hommes, placer quelqu’un à sa droite, c’est lui donner la plus grande marque d’honneur, on a transporté l’idée de cette coutume aux choses spirituelles, et pour mettre dans tout son jour la gloire que Jésus-Christ s’est acquise, et qui L’élève comme homme au-dessus de toutes les créatures, nous disons qu’Il est assis à la droite de son Père.

Cette expression être assis  signifie la possession ferme et constante de la puissance royale et de la gloire infinie que Jésus-Christ a reçue de son Père. Car, dit l’Apôtre , son Père, après L’avoir ressuscité d’entre les morts, L’a fait asseoir à sa droite dans le ciel, au-dessus de toutes les Principautés, de toutes les Puissances, de toutes les Vertus, de toutes les Dominations et de tout ce que l’on peut trouver de plus grand, soit dans le siècle présent, soit dans le siècle futur, et Il a mis toutes choses sous ses pieds. (Eph 1 20) De telles paroles font voir manifestement que cette gloire est tellement propre et particulière à notre Seigneur, qu’elle ne peut convenir à aucune autre créature. Et c’est ce qui a fait dire ait même Apôtre dans un autre endroit : Qui est celui des Anges à qui Dieu a jamais dit: asseyez-vous à ma droite ? (Hb 1 13)

Alors à l’occasion de ce mystère confessé, n’oublions pas que nous ne sommes sur la terre  que des hôtes et des étrangers, à la recherche de notre patrieet comme les membres de la cité des Saints et de la maison de Dieu. En effet, dit encore le même Apôtre :« nous vivons déjà dans le ciel. (Phil 3 20)

« Te cogat indulgéntia, Ut damna nostra sárcias, Tuíque vultus cómpotes Dites beáto lúmine ». « Que la miséricorde vous force à réparer nos malheurs,  et enrichissez-nous de la bienheureuse lumière de votre Visage ».

Cette strophe presque conclusive, nous fait comprendre que la Rédemption est une œuvre de miséricorde « Te cogat indulgentia »,  mais tout à la fois de justice. De miséricorde car Dieu se pencha sur la misère de l’homme suite au péché originel et le répara de ses malheurs, « ut damna nostra sarcias ». Mais aussi de justice car nulle créature aussi sainte soit-elle, pouvait réparer et satisfaire pour le péché en raison de l’infinie malice du péché originel, selon le principe thomiste « injuria injuriato ». L’injure se mesure à la personne injuriée. Ici dans le cas, Dieu qui est d’une dignité infinie. Dès lors le péché est d’une certaine manière, d’une malice infinie. Dès lors, seule une personne humaine et divine pouvait réparer la malice infinie du péché. L’Incarnation était nécessaire pour réparer la faute originelle. Un Dieu-Homme. C’est pourquoi notre auteur peut lui demander que nous soyons enrichis de la « lumière de son Visage », de celui qui nous laissa dans sa Passion, ses propres vertus: la patience, l’humilité, sa charité admirable, sa douceur, son obéissance, son courage surhumain à souffrir pour la justice, non seulement les douleurs, mais la mort elle-même Ainsi en vérité nous pouvons dire que notre Sauveur, dans le seul jour de sa Passion, voulut représenter en Lui toutes les vertus dont il avait recommandé la pratique pendant le cours entier de sa prédication. N’est-ce pas  vouloir nous enrichir de la « bienheureuse lumière » de son visage ?

« Tu, dux ad astra, et sémita, Sis meta nostris córdibus, Sis lacrimárum gáudium, Sis dulce vitæ præmium. Amen ». « Vous, guide et voie qui mènent aux cieux ; soyez aussi le but de nos cœurs ; soyez notre joie dans les larmes, soyez la douce récompense de notre vie. Amen.

Voilà enfin la conclusion que le Christ soit pour nous le « but de nos cœurs » la « joie de notre vie »  dans cette vallée de larmes  « sis lacrimarum gaudium »  et enfin la récompense finale : « Je vais vous préparer une place. » Ainsi, comme le dit Dom Delatte dans son beau livre « Vivre avec le Christ », l’union de cœur avec la Christ,  dans la foi, l’espérance et la charité est la perfection de la vie chrétienne.

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