L’abdication catholique est générale en France (2)
publié dans regards sur le monde le 12 mars 2010
L’abdication catholique est générale en France (2)
L’affaire interminable du « consubstantiel », rappelée vendredi dernier, n’est pas une abdication accidentelle ou isolée. C’est un repère, c’est un exemple particulièrement visible de la tendance du catholicisme français, et donc de son épiscopat, à une abdication intellectuelle devant les contre-vérités, les exigences, les pressions de la modernité post-kantienne. La liste de ces abdications est longue. Tentons un bref résumé panoramique.
Quel renoncement à se proclamer la seule religion qui détienne la vérité religieuse ! Comme si le modernisme avait rendu impossible une telle profession de foi. Elle est quelquefois niée, même par des évêques. Le plus souvent, c’est un renoncement silencieux à l’expliquer, la justifier, l’enseigner ; selon l’expression de l’abbé Régis de Cacqueray, c’est « l’impossibilité [supposée] d’affirmer que la religion catholique est la seule qui a été fondée par Dieu ». Conséquence immédiate, trop souvent « le dogme de la divinité du Christ est comme mis entre parenthèses », ainsi que l’écrivait le (futur) cardinal Journet.
Conséquence visible : le scandale permanent de l’agenouillement empêché dans les églises, de la table de communion supprimée en
faveur d’une communion debout et dans la main, manifestation orgueilleuse
de l’éminente dignité de la personne humaine dans son individualité
prétendument souveraine.
Passivité devant les abominations de l’école publique : l’épiscopat,
depuis la Seconde Guerre mondiale, a cessé de voir et de dire que la principale cause de la déchristianisation française est la confiscation de l’éducation par un Etat d’inspiration maçonnique. Cette étatique « éducation nationale » a courbé sous sa loi, sous ses programmes, sous son esprit, ce qui était l’enseignement catholique, l’obligeant à n’être plus qu’un « catholicisme non confessionnel » (!). Ce tyrannique abus de pouvoir de l’autorité politique est tombé tellement bas qu’il en est venu jusqu’à officialiser le prosélytisme homosexuel dans l’école publique : sans que l’on ait entendu la clameur indignée d’un épiscopat unanime !
Indécis et distrait devant le génocide organisé par un avortement massif (on dépasse maintenant les 7 millions d’enfants français tués dans le sein de leur mère), l’épiscopat français, par la voix de celui qu’il a élu comme son président, désavoue les manifestations et les « cris dans la rue » (sic !) des mouvements pro-vie, et il supporte que ce même président distribue solennellement la communion aux responsables et aux complices du « droit à l’avortement » ! Le combat politique et religieux contre l’avortement est la pierre de touche décisive : on attend depuis trop longtemps que des évêques en prennent vigoureusement la tête au cri de « Dieu le veut ! ».
Abdication intellectuelle devant les « idées nouvelles » d’une « modernité » accueillie sans discernement : qu’il y ait des « idées nouvelles
» dans les sciences et dans les techniques est parfaitement légitime (ce qui ne veut d’ailleurs pas dire que toutes soient également vraies). Mais il n’en va pas de même pour les « idées nouvelles » en matière de religion et de morale, elles sont surtout des « attaques toujours renaissantes » contre la loi naturelle et la Révélation : « La civilisation n’est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtir dans les nuées. Elle a été, elle est ; c’est la civilisation chrétienne, c’est la cité catholique. Il ne s’agit que de l’instaurer et la restaurer sans cesse sur ses fondements naturels et divins contre les attaques toujours renaissantes de l’utopie malsaine, de la révolte et de l’impiété. » Tel fut le grave avertissement adressé par saint Pie X aux évêques français. Cet avertissement aura exactement un siècle le 2 5 août prochain, en la fête de saint Louis. On y mesure le chemin parcouru, en l’espace d’un siècle, par l’abdication de l’esprit et du cœur.
JEAN MADIRAN (Présent du mercredi 10 mars 2010)