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Entraide et Tradition

De la réconciliation ecclésiale aujourd’hui

publié dans regards sur le monde le 14 avril 2011


De la réconciliation ecclésiale aujourd’hui
De la normalisation

De l’amour de l’Eglise et de la liturgie traditionnelle.

L’Eglise catholique est le tout de ma vie. Il en sera toujours ainsi. J’ai reçu d’elle la foi, le saint baptême, et, par elle, le plus beau des trésors, la vie éternelle par le péché originel effacé, et si je reste fidèle à cette filiation divine communiquée, un jour la vision de gloire. Par elle, j’ai connu le Christ, le Fils de Dieu fait homme en le sein de la Vierge Marie. « Et Verbum caro factum est ». Les Apôtres par le Christ ont reçu la Révélation, leurs successeurs en continuent fidèlement la transmission. L’Eglise apostolique peut dire avec saint Paul « accepi quod et tradidi », j’ai reçu ce que j’ai transmis. Par elle, j’ai connu le plan de salut voulu par Dieu depuis toujours et réalisé « à la plénitude des temps » en son Fils, plein d’amour et de vérité. Grâce à la réalisation de ce plan, je sais que le Christ est pour moi « l’espérance de la gloire ». Par elle et en elle, je suis devenu prêtre, prêtre catholique par les mains de Mgr Lefebvre ayant obtenu toute lettre « démissoriale » nécessaire à une ordination non seulement valide mais licite et par elle au service de l’Eglise dans la FSSPX de nombreuses années. L’exercice pastoral en l’Eglise est la joie de ma vie, la plénitude de mon cœur. L’étude du mystère de Dieu, sa prédication aux fidèles mis sur ma route, est le ravissement de mon intelligence. J’aimerais le mieux comprendre, pour le mieux annoncer. Chaque dimanche est un jour de bonheur parce que le Seigneur est prêché. Que m’importe le reste, cette prédication est l’essentiel. Par l’Eglise et en elle, grâce au sacerdoce, chaque jour, je monte à l’autel pour célébrer les saints mystères, le saint sacrifice de la Croix, renouvelé sacramentellement sur l’autel. Je célèbre ainsi la charité du Christ qui surpasse toute connaissance. Je la contemple. J’enivre mon cœur à cette charité ineffable et j’entretiens ainsi en mon âme, comme le dit joliment saint Bernard, « les aiguillons de l’amour ». J’aime non seulement la réalité de ce sacrifice, celui du Christ, le même que celui du Golgatha, perpétué dans le temps, mais j’aime aussi le rite « tridentin ». Il est cet « écrin » qui me conserve ce joyau, le plus beau joyau de l’Eglise : la messe. J’aime non seulement les mouvements respectueux et pieux qu’il m’impose, son sens hiérarchique, sa belle ordonnance….Par contre et en conséquence, j’ai horreur de ce rite « nouveau » qui se veut populaire mais qui n’est que désordre et confusion, une messe « démocratique ». J’aime aussi et surtout les prières du rite tridentin, les prières de l’Offertoire qui me rappellent tellement fortement, chaque fois, le sens de cet acte que je pose dans mon ministère sacerdotal. Car la messe est un acte, celui-là même du Christ sur la Croix et nullement un souvenir, une commémoration, comme le voudraient les protestants. Chacune de ses prières me rappellent les finalités de cet acte liturgique, qui est plus qu’un acte liturgique, qui est l’acte même du Christ, le prêtre n’est que son ministre. Cet acte est un acte de louange et d’honneur, c’est la finalité latreutique de la messe. Cet acte est un acte eucharistique. Il est une action expiatoire, propitiatoire, le Christ se faisant victime pour nous, à notre place pour réparer l’injustice faite à Dieu par le péché originel et nos propres péchés. Souverain Prêtre, Il s’est substitué à nous pour satisfaire la justice de Dieu. C’est un acte d’amour d’une charité insondable, incommensurable. Il est enfin impétratoire. En cet acte et en cet acte seul, je peux satisfaire, de la meilleur des manières, mes obligations envers Dieu. Il est bien légitime que j’aime et ce sacerdoce et cet acte divin et cette Eglise. J’aime son Canon, le Canon de la Messe, le Canon Romain, son caractère ancestral…En sa réalisation, la Sainte Eucharistie est ma nourriture ainsi que celle des fidèles, Elle est pour tous, dans la foi, l’espérance du salut, plus, la certitude du salut. « Celui qui mange mon corps et boit mon sang a la vie éternelle ». Cette Eucharistie est vraiment l’esprit et la vie, le cœur des fidèles, le cœur de l’Eglise. En cette liturgie-eucharistie, les familles se constituent, vivent et se développent. Naissant au pied de l’autel, il est bien légitime qu’il en soit ainsi. Le dimanche est non seulement le jour sacerdotal mais aussi la journée familiale par excellence. Elles doivent se réunir au pied de l’autel. Oui ! J’aime ce rite, le rite tridentin. J’aime son chant grégorien. J’aime sa langue liturgique, le latin. Mais j’aime tout autant l’Eglise qui m’a donné pour toujours et cet acte et ce rite et cette langue. Mon sacerdoce y trouve son accomplissement. Et nul ne pourrait, avec la grâce de Dieu, ni m’arracher à l’Eglise, ni m’arracher ce trésor, fut-ce un ange du Ciel comme parle saint Paul dans ses Epîtres. Il rencontrerait mâle résistance…à plus forte raison si cette opposition venait de créatures terrestres, mêmes ecclésiastiques.

La messe tridentine, ce trésor condamné

Or chose étonnant, cette hypothèse, simple hypothèse, devint réalité, un jour, le 3 avril 1969, mieux encore, le 24 octobre 1974, lors d’un consistoire tenu par le Pontife suprême, Paul VI. Il voulait imposer à la chrétienté son « nouveau missel », dit de Paul VI. Cette volonté allait contre l’être « historique de l’Eglise ». L’Eglise est une tradition. Le rite « tridentin » remonte pour l’essentiel, du moins son Canon, à Saint Grégoire le Grand. Il était, dans l’Eglise, une coutume ancestrale, plus que millénaire…Nulle autorité ne pouvait dès lors l’abolir. Il était légitime et le resterait à jamais. Aussi un combat « acharné » s’en suivit que d’aucuns appelèrent « le combat des dociles ». Ils ne voulaient se laisser arracher ce trésor, garant de l’orthodoxie menacée, d’autant que le modernisme pénétrait et les esprits et les institutions. Maritain disait, à l’époque, dans son livre « le Paysan de la Garonne » que le Modernisme du début du XX ème siècle, celui que décrivit et condamna saint Pie X, était « un simple rhume des foins ». C’est dire la gravité de la chose. Une résistance s’organisa. Mgr Lefebvre, soutenu de prêtres et de laïcs, en fut comme le « héraut ». Tout se cristallisa, un temps, autour de sa personne. Il fonda ses séminaires pour garder, entre autres, cette messe tridentine. La réforme liturgique pourtant allait s’imposer « d’un train d’enfer ». Comme Attila, elle écrasait toute résistance. Rien ne devait demeurer de la tradition liturgique. Missel nouveau, rite nouveau, bréviaire nouveau, Lectionnaire nouveau, catéchisme nouveau, Droit canon nouveau. Tout devait correspondre à la nouvelle théologie. Tout devait s’inspirer de « l’esprit conciliaire ». Quel était-il ? On ne le savait pas trop. Toute période révolutionnaire a besoin de slogans pour imposer son idéologie. A nouvelle doctrine, disait Mgr Lefebvre, nouvelle messe, nouveau catéchisme. Le combat fut très dur. Tout l’arsenal « canonique » fut déployé pour mettre les gens au pas. Mais l’amour de l’Eglise, de sa doctrine, de son rite ancestral, cause et raison de cette opposition, fut « intrépide » aussi. Les suspens a divinis tombèrent jusqu’à l’excommunication, comme des boulets de canons, anachroniques en un temps où il était « interdit d’interdire ». Mais la contradiction ne gène jamais le « révolutionnaire ». Les souffrances furent grandes mais toujours portées dans un esprit filial et jamais « révolté ». La fidélité au patrimoine ecclésial justifiait cette résistance. Et ces condamnations étaient manifestement injustes et illégales, fruits d’un abus de pouvoir évident. L’avenir le dira. Et l’avenir l’a dit

Une réconciliation nécessaire.

Après plus de quarante ans de « combat acharné », le Pontife suprême, Benoît XVI, dans un Motu Proprio ayant pour titre « Summorum Pontificum » le reconnaît. Aussi à ce rite tridentin, veut-il lui redonner une place dans l’Eglise. Il doit être respecté, vénéré, célébré dans les paroisses, les sanctuaires. Les évêques sont même encouragés à créer à cet usage des paroisses personnelles. Il les incite à aller dans ce sens…C’est la claire intention du Pape dans ce document. Il faut que cesse cette « guerre » des rites. C’est l’heure de la « réconciliation ». Il le veut. Il le dit aux évêques: « Il s’agit de parvenir à une réconciliation interne au sein de l’Eglise. » S’inspirant de l’histoire de l’Eglise et des divisions successives, il leur demande de faire « tous les efforts afin que tous ceux qui désirent réellement l’unité aient la possibilité de rester dans cette unité ou de la trouver de nouveau ». Nous étions en 2007, le 7 juillet 2007. Il régnait depuis seulement deux ans sur le siège de Pierre. Mais bien avant, dans beaucoup de ses écrits, le problème liturgique fut sa préoccupation. Il regrettait cette « réforme liturgique » de Paul VI. On voyait qu’il voulait la corriger. Est-ce seulement possible ? Il parla très vite de la « Réforme de la Réforme », celle de Paul VI, réforme réalisée hâtivement, et sans respect de la tradition liturgique. Il parlait de liturgie « fabriquée », un comble, car la liturgie de l’Eglise est comme un vivant qui croît dans la continuité de l’être. C’est ainsi que l’on s’éloignait de la pensée de Pie XII et de son Encyclique sur la liturgie « Mediator Dei » et même du document conciliaire « Sacrosanctum concilium ». Son livre « L’esprit liturgique », mais bien d’autres encore, comme « le sel de la terre », « Mes souvenirs, ma vie »… rappelaient les grands principes liturgiques qu’il serait heureux, non seulement heureux mais nécessaire de reprendre, reprendre la célébration de la messe « ad orientem », reprendre la langue liturgique, le latin, au moins dans les parties professées aussi par le peuple, reprendre la communion sur la bouche et à genou par respect et confession du grand mystère de la transsubstantiation. En un mot, reprendre tous les actes qui donnent et nourrissent le caractère sacré de la liturgie, caractère sacré qui doit être cultivé pour donner au peuple le sens de la Transcendance de Dieu et de son amour. Caractère sacré qui est le propre du rite tridentin, rite qui reste l’archétype de toute liturgie ! Il profitait aussi des colloques auxquels il assistait, principalement de celui de Fontgombault, pour préciser da pensée sur la « Réforme de la Réforme ».C’est en tout état de cause que les pères du conclave l’ont élu en 2005, pape. Rien n’était caché de ses intentions liturgiques.

La situation à Rome changeait.

Mais avant même ce Motu Proprio du 7 juillet 2007, il y eut cette conférence au Consistoire du 22 décembre 2005 où il précisait le vrai sens à donner aux textes conciliaires. Il fallait les interpréter non dans « un sens de rupture » mais dans « la continuité » avec la doctrine de toujours de l’Eglise. Nous retrouvions l’idée exprimée par Mgr Lefebvre devant le Pape Jean-Paul II, dès 1983 : « Nous acceptons le Concile Vatican II interprété à la lumière de la Tradition ». A la bonne heure ! Et c’est ainsi que nous avons fortement apprécié l’homélie qu’il prononça le 8 décembre 2005. Là, il donnait une nouvelle lecture du document conciliaire Gaudium et Spes. On ne l’a pas fait assez remarquer. (cf Plaidoyer pour l’unité. (p. 117-122). Il corrigeait le jugement utopique du Concile sur le monde moderne et rappelait que son désir d’autonomie vis-à-vis de Dieu est un drame, son drame.

Mais avant même l’accès de Benoît XVI sur le siège de Pierre, dès la fin du pontificat de Jean-Paul II, nous pouvions constater un réel changement de Rome vis-à-vis des « réfractaires ». Changement vis-à-vis de ceux qui voulaient garder la messe tridentine. Ce changement se manifesta déjà en la fameuse lettre de 1984 Quottuor abhinc annos . Les évêques avaient la possibilité de concéder un indult pour la célébration de la messe antique. Les conditions imposées étaient, il est vrai, « drastiques ». Mais quoi qu’il en soit, comme le disait Jean Madiran, dans Itinéraires, la « messe revenait ». « Ils » avaient voulu l’interdire, « ils » avaient échoué. Puis tout un mouvement nouveau s’installait, peu à peu, dans les bureaux romains. En 1986, Rome reconnaissait que cette messe n’avait pas été abolie. Le cardinal Stickler le confessa publiquement en 1995. Puis devant l’accroissement toujours constant des fidèles désirant cette messe, Jean Paul II publia son Motu Proprio Ecclesia Dei Adflicta , qui, tout en condamnant Mgr Lefebvre, en raison des sacres accomplis, demandait aux Evêques de se montrer accueillants pour « les fidèles de la tradition »… Le retour était lancé. On ne reviendrait pas en arrière, le cardinal Stickler le confessait. Et de fait, il ne revint pas en arrière. Il accepta même en 2001, la création d’une administration apostolique pour les pères de Campos, fidèles de Mgr de Castro Mayer, l’Administration Saint Jean Marie Vianney, avec exemption de l’ordinaire du lieu, droit exclusif dans leurs églises du rite tridentin, et juridiction propre et personnelle sur les fidèles choisissant cette messe.

De 1992 à 1995, 12 colloques avec la bénédiction du Cardinal Ratzinger

Jamais animé de l’esprit du « libre examen » protestant, un prêtre ordonné par Mgr Lefebvre ne pouvait que se réjouir de cette évolution et cherchait, à son niveau, de montrer sa satisfaction. Aussi fort de ce « coup de barre vers la Tradition », comme le disait M l’abbé Celier dans son Livre « Benoît XVI et les traditionalistes », j’ai été heureux d’initier, dès 1992, comme supérieur du District de France de la FSSPX, des contacts nouveaux avec des autorités ecclésiales reconnues, en France.

Passant un jour à Randol, monastère bénédictin, près de Clermont Ferrand, le Père abbé Dom de Lesquin discutait avec un jeune, un petit neveu, je crois, sur le parvis du monastère. Sachant le rôle qu’il avait joué auprès de Dom Gérard lors de son rapprochement du 8 juillet 1988 avec Rome, je l’aborde et lui parle de ce qui me tenait à cœur et qui, pour moi, était aussi la grande préoccupation de Mgr Lefebvre, sa vie durant : une normalisation canonique avec Rome. Je lui parle de ce rapprochement canonique avec Rome, les choses semblant « bouger » du côté de Rome. Ne pourrions nous pas, avec certains de vos amis, organiser quelques réunions pour aborder les problèmes qui nous divisent sur le Concile ? Il saisit la balle au bond. La cloche du monastère sonnant pour l’office, nous nous quittions nous donnant rendez-vous au plus tôt à l’abbaye de la Source à Paris.

La pensée de Mgr Lefebvre.

Je savais que ce rapprochement avec Rome était la grande préoccupation de Mgr Lefebvre. Il n’aimait pas la situation où nous nous trouvions. Il aurait préféré mourir que de se trouver en conflit avec Rome. Il me le dit lors de la première visite canonique romaine en 1974 réalisée par les seigneurs Onclin et Deschamp. Aussi ne voulait-il pas que nous nous y habituions. Elle n’était pas normale. Il n’a pas cessé de nous le dire. Aussi n’hésitait-il pas à répondre aux moindres invitations romaines, au moindre nouvelles exigences romaines. Elles furent nombreuses. Certains pensaient que c’était « peine perdue », « qu’il allait se faire avoir » par « le serpent romain ». Peu importe. Rome l’appelait, il allait. Il provoqua lui-même bien des visites, sa visite avec le pape Paul VI, le cardinal Villot y mettant pourtant tellement d’opposition, sa visite au pape Jean-Paul II, qu’il nous raconta, à son retour, dans le menu. C’était passionnant. Nous vivions au cœur de l’Eglise, grâce à lui. Nous avions particulièrement apprécié la lettre qu’il remettait au cardinal Gagnon suite à la deuxième visite canonique de novembre 1987, le 21 novembre. Là, il précisait les conditions d’une normalisation avec Rome. Tout était clair et précis. Il avait le sens des règlements administratifs. Combien de conférences épiscopales a-t-il organisés alors qu’il était délégué apostolique de Pie XII, en Afrique. Et on dit, me disait-il, que je suis contre « la collégialité ». « J’en ai organisé beaucoup lors de mon séjour africain ». On voyait dans ce texte l’homme pratique, le juriste, le pasteur. Rien n’était laissé au hasard. J’ai examiné sa pensée dans mon livre « Plaidoyer pour l’unité ». Il voulait ce rapprochement romain, cette normalisation, cette réconciliation. « Que Rome nous prenne tels que nous sommes, comme une petite armée animée de l’esprit des Macchabées ». Les conditions étaient claires. Elles étaient absolues, mais mûrement réfléchies. La commission « Ecclesia Dei » de demain, trouvait, dans cette lettre, sinon son organisation, du moins son origine.

Les colloques de 1992 à 1995

Fort de cette conviction et de cet exemple, nous nous sommes rencontrés discrètement avec le Père de Lesquin à l’abbaye de la Source. Il me lit « une belle lettre » de Dom Roy à Mgr Lefebvre, datant de 1976, où Dom Roy lui demandait de se soumettre à l’ordre du pape concernant les ordinations de juin 1976 et qui furent l’origine de l’affrontement entre Rome et lui. Je dis « belle lettre » même si je n’en partageais pas la recommandation. Je mesurais plut tôt la force d’âme qu’il fallut à Mgr Lefebvre pour « résister » même à ses amis. L’obéissance ne peut aller jusqu’à faire perdre les trésors de l’Eglise, la messe en est un. Mgr Lefebvre le dit le 29 juin 1976 dans son homélie : « Si en toute objectivité, nous cherchons quel est le motif véritable qui anime ceux qui nous demandent de ne pas faire ces ordinations, si nous recherchons leur motif profond, nous voyons que c’est parce que nous ordonnons ces prêtres afin qu’ils disent la messe de toujours. Et c’est parce que l’on sait que ces prêtres seront fidèles à la messe de l’Eglise, à la messe de la Tradition, à la messe de toujours, qu’on nous presse de ne pas les ordonner. Et j’en veux pour preuve …le fait qu’on m’a mis dans les mains un missel nouveau en me disant : Voilà la messe que vous devez célébrer et que vous célébrerez désormais dans toutes vos maisons. On m’a dit également que si en cette date, aujourd’hui, ce 29 juin, devant toute votre assemblée, nous célébrions une messe selon le nouveau rite, tout serait aplani désormais entre nous et Rome. Ainsi donc il est clair, il est net que c’est sur le problème de la messe que se joue tout le drame entre Ecône et Rome ». La messe est un trésor. Le sacerdoce en est un autre. Ils sont corrélatifs. Comment ne pas les sauvegarder ? Que vaut l’obéissance devant de telles choses ?

Je lui parlais des intentions qui m’animaient en ces colloques. Je craignais l’isolement de la FSSPX, la division ayant été bien organisée après les sacres par la « politique » vaticane. Pour attirer loin de Mgr Lefebvre, le Vatican donnait mille biens, la messe tridentine, les reconnaissances canoniques d’Instituts de droit pontifical pour toute société nouvelle, la dignité abbatiale pour Dom Gérard…Tous biens, jusque là refusés…Pourquoi ? Il suffisait de quitter Mgr Lefebvre pour en bénéficier…Tous, ils prirent la balle au bond ! Il y avait de quoi craindre l’isolement …Oui ! Je le craignais. Et je craignais que, dans cet isolement, on finisse par se « scléroser », se « renfermer sur soi ». Ce qui aurait pu devenir un drame. Nous n’avions rien à craindre d’échanger sur le plan doctrinal, bien au contraire. C’était pour nous l’occasion de travailler, d’affiner nos positions. Le travail qu’avait fait Mgr Lefebvre sur la « liberté religieuse » avait été très heureux. Quel travail autour de ce texte ! Ce ne pouvait être que bénéfique de le poursuivre.
Il consentit à la chose. Et c’est ainsi que, pour ces colloques, il prendrait avec lui, me dit-il, le Père Field, son théologien, qu’il demanderait à Dom Forgeot, père abbé de Fontgombault, de se joindre à lui, avec un autre moine du monastère. Il demanderait le soutien des dominicains du couvent de Toulouse. C’est ainsi que le Père de la Soujeole ainsi que le père Boninot participèrent à toutes nos réunions. Ils venaient en habit dominicain. Nous avons eu 12 réunions au total. Tout commença en 1992. Nous allions tantôt chez les moines, tantôt dans nos maisons de la FSSPX. De mon côté, je prie avec moi, M l’abbé Celier qui se dévoua sans compter dans les conversations. Il fut un peu le secrétaire des séances. Il préparait la plupart des textes de nos interventions, M l’abbé Boivin, notre historien, M l’abbé Lorans, M l’abbé Boubée et lors de son retour d’Australie, M l’abbé Lesnay. La première réunion eut lieu à Suresnes. L’atmosphère était légèrement tendue. Dom Forgeot, le premier arrivé, était un peu gêné. Il ne savait pas très bien où le Père de Lesquin le conduisait…Mais les autres arrivèrent très vite après. Je me suis chargé de détendre l’atmosphère. Je sais faire. Les sujets que nous pourrions aborder furent précisés. Vous les imaginez : la liberté religieuse, la liturgie, l’œcuménisme, Gaudium et Spes., la Tradition, le Magistère. Après Suresnes, ce fut le tour de Fontgombault de nous recevoir. Puis l’Institut saint Pie X à Paris, puis Randol, puis un monastère près de Carcassonne dont je ne me souviens plus du nom, puis nous furent même accueillis par le Recteur de la Basilique de Montmartre. Là, M l’abbé Lesnay prit, au cours du déjeuner, « un coup de sang » qu’il fallut apaiser…pour finir à l’école saint Bernard à Courbevoie. Ce fut la dernière réunion. Nous étions en 1995. Je n’étais plus supérieur du district et n’avais plus beaucoup de pouvoir…d’autant que la Maison Générale ne voyait pas cette initiative d’un très bon œil. Que font-ils aujourd’hui ? Le nouveau supérieur de District, à l’époque M l’abbé de Jornas, y était tout à fait opposé. Aujourd’hui, il est un représentant de la FSSPX. Comme les choses changent…Comment lui imposer, à l’époque, cette idée et travailler dans ce sens avec ses confrères, lui y étant fort opposé ? De ces colloques, Dom de Lesquin en informait le Cardinal ratzinger. Je garde précieusement tous ces dossiers. La dernière communication de ces douze entretiens fut un courrier du Père Field à Monsieur l’abbé Lesnay et sa réponse. Il ressortait de tout cela qu’il fallait approfondir de la notion de Magistère. Tout tourne autour de ce problème : du Magistère Ordinaire et Universel de l’Eglise.

Une volonté clairement affirmée d’un accord.

Tout cela pouvait montrer à Rome, en plus, que les prêtres de la FSSPX n’étaient pas animés d’un esprit de révolte, d’opposition systématique et bornée Mais au contraire qu’ils étaient bien ouverts à des échanges doctrinaux, qu’ils acceptaient bien « le Concile interprété à la lumière de la Tradition ». Mais qu’en conséquence et en toute logique, il fallait reconnaître que l’Eglise n’était pas née au Concile de Vatican II, qu’il ne pouvait pas être la seule référence de la pensée et de l’agir catholique, d’autant qu’il s’était défini comme un Concile pastoral, chose assez atypique. Il fallait en finir avec cette seule référence, « un vrai totalitarisme de la pensée unique ». De plus, il fallait accepter et reconnaître qu’aucune rupture d’avec la Tradition était ni acceptable ni possible. Et que seul le retour à la doctrine éternelle de l’Eglise était la solution de la crise et la voie royale du retour à l’ordre. Voilà l’œuvre nécessaire de l’autorité. On n’en fera pas le sacrifice !

Nos interlocuteurs comprenaient ainsi que la FSSPX « était prête dans l’heure à tout accord, à tout arrangement » pourvu que la foi catholique lui soit assurée pour elle et pour l’Eglise. C’est ce qu’exprimait quelques temps plus tard, M l’abbé Celier, au nom de la FSSPX, dans son livre « Benoît XVI et les traditionalistes ».

L’action du cardinal Castrillon Hoyos

Aussi nous nous sommes réjouis vivement personnellement lorsque le cardinal Castryon Hoyos renoua des contacts avec les autorités de la FSSPX et avec Mgr Rangel, suite au pèlerinage accompli à Rome, lors de l’Année Sainte, en l’an 2000. Des conditions, bien légitimement, furent demandées et posées à Rome, celle du retour de la messe tridentine pour tout prêtre de l’Eglise, puis la levée des excommunications des quatre évêques. La première condition sur la messe fut refusée, dans un premier temps, toutes les autorités vaticanes consultées n’y étant pas favorables… Le sujet était important. Sur ce sujet, l’unanimité n’existait pas encore à Rome…Chose étonnante ! Il en est toujours ainsi, du reste ! Par contre la levée des excommunications semblait ne pas poser de problème…

Quoi qu’il en soit, les contacts étaient repris. La volonté de Rome de tout faire pour aboutir à une réconciliation avec nous était bien accueillie de part et d’autre. La solution alla bon train pour nos amis du Brésil avec Mgr Rangel. Une Administration Apostolique leur reconnaissant le droit exclusif à la messe dite de saint Pie V, fut créée leur garantissant la garde de la foi puisque l’exemption juridique leur fut donnée sous la seule autorité du Pontife romain et de ses dicastères. Sous cette autorité, ils sont leurs « propres » maîtres. A eux de rester fidèles à l’enseignement de Mgr de Castro Mayer dont ils sont issus.

Les pourparlers furent plus longs avec la FSSPX. La prudence « originelle » de Mgr Lefebvre, le fondateur, doit marquer encore les esprits. Mais la volonté de réconciliation avec Rome, là aussi, est pris en compte. Toutefois, malgré certains signes d’une heureuse évolution à Rome, ne serait-ce que du côté liturgique… la crainte prédomine toujours. Certains membres influents de la FSSPX restent sur la réserve. « Chat échaudé craint l’eau froide ». …Ceux-ci argumentent auprès de Mgr Fellay…Et ils ne sont pas peu nombreux. Mgr Fellay doit en tenir compte. L’unité est à sauvegarder. De plus, il est, lui, aux contacts rapprochés des autorités romaines, hier avec le cardinal Castrillon Hoyos, aujourd’hui avec le cardinal Levada.. Il doit faire attention. Il attend des preuves certaines de Rome. Les quatre évêques ont mis en premier le problème des conversations doctrinales. Je ne suis pas contre. La preuve ! Ensuite viendra le règlement canonique. C’est là, pour eux, « un ordre chronologique et logique ». C’est contestable ! La vie concrète n’est pas toujours ni chronologique ni logique. Les circonstances peuvent bousculer bien des logiques Je crois que Mgr Lefebvre était dans sa vie et sa pensée bien plus pratique que « logique ». Il se laissait, disait-il, conduire par la Providence. Et vous croyez que la Providence conduit toujours les âmes selon un mode « chronologique et logique ». Demandez aux saints. Mgr Fellay, devant cette très lourde tache, parle cependant parfois de règlements pratiques, concrets avant même tout règlement doctrinal définitif. C’est du moins ce qu’il disait le 24 novembre 2007 à Olivier Figuéras dans une interview de Présent : « j’envisage la possibilité, relativement prochaine, de trouver des remèdes pratiques à la situation de la FSSPX dans l’Eglise »…Je m’en réjouissais, mais restais étonné ! Il a dit beaucoup de choses. Quoi qu’il en soit, ils en sont toujours aux conversations doctrinales. Elles approchent de la fin, nous dit-on, en mai 2011. Je crains qu’elles n’aboutissent à rien. L’Eglise est éternelle, pas la FSSPX… Alors Rome peut obliger nos « confrères » à accepter une solution « pratique » pour en finir…

Cependant devant le problème de la réconciliation, la FSSPX n’est pas la seule concernée. Ce problème touche également et les épiscopats et le clergé des communautés « Ecclesia Dei »et le clergé diocésain et les séminaires.

La réponse des épiscopats

Dans cette affaire de réconciliation, de normalisation, il ne faut pas négliger le poids des épiscopats à Rome, surtout des épiscopats français et allemands. Beaucoup ne sont pas favorables au retour de ces « prêtres tridentins » dans leurs diocèses, ni de ces communautés « Ecclesia Dei » de droit pontifical qui leur « échappent » un peu. Leur formation intellectuelle les inquiète. L’évêque de Metz le faisait, il y a quelques années, clairement entendre. « Jamais nous prendrons de tels prêtres opposés et donc inhabiles à parler au monde moderne ». Les évêques de France ne manifestent, à part quelques exceptions, aucun empressement pour appliquer le Motu Proprio de Benoît XVI, Summorum pontificum. Où sont les « églises personnelles » qu’appelle de ses vœux le Pape ? La chose est cependant en marche, ils la suivent, la freinent même, mais ne peuvent plus la refuser totalement. Ils cherchent cependant à la limiter. De cette façon, la réconciliation liturgique demandera du temps. Mgr Lefebvre nous le disait : « préparez vous pour un combat de longue durée ».

La réconciliation et le clergé diocésain.

Cette réconciliation, outre le problème doctrinal, sera liturgique ou ne sera pas.
Elle doit donc s’initier dans les séminaires. Si l’on veut vraiment «parvenir à une réconciliation interne au sein de l’Eglise » comme le demande expressément Benoît XVI, il faut en prendre les moyens. La « réconciliation » passe nécessairement par la formation au séminaire. Il y faudra des générations. Au moins une dizaine d’années et plus. Il faut la vouloir. Aux séminaristes, il faut apprendre le sens des choses liturgiques ; il faut apprendre le latin. Benoît XVI le demande expressément. La liturgique, son ordre, son symbolisme demandent tout une étude, un apprentissage, une pratique. Les années de séminaires sont nécessaires à cette fin. Qui en prend les moyens ? On laisse entendre aujourd’hui que le texte romain qui doit préciser les résolutions du Motu Proprio Summorum Pontificum prévoit que les séminaristes apprennent la célébration de la messe aussi dans le rite « tridentin ». A la bonne heure ! Cela va dans le bon sens.

Si cela ne se fait pas, nous risquons d’avoir une juxtaposition de communautés, de prêtres. Ils chercheront à vivre dans l’amitié, une amitié retrouvée au niveau des diocèses, des doyennés. C’est important. Mais ce n’est ni essentiel ni suffisant. Le conflit relevant de la doctrine, il faut nécessairement restaurer l’enseignement de la théologie thomiste, le sens de la liturgie dans le clergé. Le pape Benoît XVI vient de le rappeler dans sa belle lettre aux séminaristes de 2011. Ce serait aussi l’objet de ce fameux texte romain en préparation qu’on annonce !

Une réconciliation difficile

Le travail de cette réconciliation entre les prêtres sera difficile. Pourquoi ?

Parce qu’il faut mesurer la crise qui touche l’Eglise. Elle est doctrinal et liturgique. Sur le plan liturgique, deux mondes s’affrontent : la liturgie tridentine, la liturgie « moderniste ». Elles sont incompatibles l’une à l’autre. Sur ce sujet, il me semble que M l’abbé Barthe l’exprime fort bien dans une synthèse difficilement dépassable, dans son dernier livre : « la messe à l’endroit », à la page 11et 12. Son expression est toujours un peu difficile. Je partage son jugement : nous assistons dans la liturgie moderne à une « déritualisation ». Venez assister à une messe chrismale et vous en serez convaincu ! Vous avez également un « pluralisme » rituel…Qu’est devenue dans bien des églises la messe de Paul VI ? Vous avez également « un aplatissement du symbolisme liturgique », l’envahissement d’une « pédagogie de monitions », bien évidemment « le retournement de l’autel, si possible placé au centre de l’assemblée, la mue du célébrant hiérarchique en acteur personnel ». Oui ! Ce sont là quelques caractéristiques de la liturgie moderne. « Tout a contribué, dit-il, à faire (bien gauchement d’ailleurs) du culte divin une sorte de théâtralité accordée à la modernité, et donc, à faire que la dramaturgie liturgique cesse largement d’être … une réprobation de ce monde ». Or la vraie « liturgie chrétienne au sein du monde moderne ne peut qu’être critique de ce monde ». C’est très juste. La liturgie classique est « théandrique ». Le monde moderne « anthropocentrique ». Le culte divin est louange et adoration de Dieu. Le monde moderne est replié sur soi-même. Ainsi « s’adapter à ce monde, c’est disparaître. Ce qui est advenu »….Dès lors, « l’aspect de rupture de l’univers rituel catholique par rapport à la modernité individualiste a ainsi largement disparu. La conciliation – d’autant plus maladroite qu’elle est par la force des choses partielle – avec la « culture » que cette modernité sécrète fait que le culte divin a cessé d’avoir la pleine force d’invitation à tout « restaurer dans le Christ » . C’est ainsi que le profane, d’une manière non totale, certes, mais cependant d’une manière assez massive, est entrée dans le sanctuaire. : « idéologiquement, par la refabrication de rites où le subjectif de la célébration du groupe centré sur lui-même s’impose sensiblement par un abandon de l’hiératisme rituel, de la langue sacrée, de la prière « vers le Seigneur », de l’adoration exprimée au moyen d’une gestuelle et d’un silence de prosternation. On a ainsi concédé à la société moderne une atténuation de ce qu’elle n’est plus en mesure d’entendre : la valeur de la messe comme sacrifice offert pour les péchés, la présence réelle du Christ sous les espèces eucharistiées, la différence/similitude du sacerdoce de l’Homme-Dieu exprimant précisément l’action du Christ-Tête ». (p. 11-12). Ces dernières valeurs, rappelées heureusement ici par l’abbé Barthe, sont essentielles à la doctrine catholique et parfaitement exprimée dans le rite tridentin. Oui ! Sa « gestuelle » et ses prières les expriment à la perfection. Elles sont de l’essence du sacrifice de la messe.

Ce sont bien, alors, deux mondes qui s’affrontent. Ils sont incompatibles, inconciliables. Cette critique n’est pas outrancière. Elle est juste. Voilà la réalité, même si elle ne s’exprime pas partout, dans les églises paroissiales, heureusement, dans toute cette acuité.

Les choses en sont là aujourd’hui. Une « cohabitation » avec cette liturgie moderne – qui n’est souvent plus la liturgie de Paul VI,- mais il faut reconnaître que toutes les initiatives étaient permises – est pour moi, impossible. Il faut procéder à l’arret de ce qui est devenu une vraie subversion. Il faut comme le dit M l’abbé Barthe, « subvertir cette idéologie d’ouverture ». Aussi est-il légitime de se poser la question de la simple possibilité de procéder à la « Réforme de la Réforme » voulue par le cardinal Ratzinger. La liturgie de Paul VI, ici décrite, est-elle seulement réformable ?

Et pourtant l’Eglise doit nécessairement restaurer sa tradition liturgique.
Il n’y aura pas de réconciliation profonde et donc d’unité des esprits et des cœurs dans le monde sacerdotal -ce qui est hautement souhaitable – sans la réforme liturgique. La réconciliation par la réforme liturgique doit être le maître mot aujourd’hui … dans l’Eglise.

Mais dans cette réforme qui aboutira à une vraie réconciliation, il faut avoir le sens du possible et, dans ce domaine liturgique, aller du mieux au bien. M l’abbé Barthe suggère, dans un premier temps, de retenir cinq points :
-« Réintroduire l’usage de la langue liturgique latine, spécialement par l’utilisation du chant grégorien ( kyriale, Pater, si possible chant des parties du propre de la messe),
-Distribuer la communion selon le mode traditionnel,
-User de la première prière eucharistique, si possible en latin, et sans trop élever la voix,
-Orienter la célébration vers le Seigneur au moins à partir de l’offertoire,
-User en silence de l’offertoire traditionnel.
Avec en parallèle, la célébration de « la forme extraordinaire », la forme tridentine, qui viendra tout naturellement s’intégrer dans une vie liturgique paroissiale animée de cette réforme et qui la soutiendra efficacement. Et voilà pourquoi Benoît XVI demande la célébration paroissiale du rite tridentin au milieu du rite « ordinaire ». (p. 96)

Voilà qui serait beaucoup. Voilà qui favoriserait réellement une réconciliation sacerdotale.
Voilà ce que veut le pape. C’est ce qu’il va peut-être ordonner dans le texte romain qu’on annonce…Mais si sa publication est retardé, c’est qu’il doit rencontrer encore obstacles et oppositions… ?
Il faut l’aider. Le temps fera son œuvre.

La FSSPX et ses nombreux prêtres, en s’insérant dans l’Eglise, tout en gardant bien sur la fidélité à la messe tridentine, à la doctrine, peut y contribuer…Que craignent ils donc? Leurs évêques sont leur protecteur. Ils le montrent hautement.

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