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Histoire de la Messe Interdite (1)

publié dans un disciple le 24 novembre 2017


Histoire de la Messe interdite (1)

 

Livre 1

 

Les années avant la réforme conciliaire du 3 avril 1969

 

La subversion

 

 Je publie, à partir d’aujourd’hui, l’ensemble du cours que je donnais aux séminaristes de Courtalain depuis 2006. Je reprends le titre que Jean Madiran donnait à son œuvre inachevée en raison de son décès. Il donna deux petits  tomes: Histoire de la messe interdite. Il devait en publier beaucoup d’autres. Je m’en inspire et , s’il est permis, je désire poursuivre cette œuvre. j’irai des années conciliaires et post-conciliaires jusqu’à la publication du Motu Proprio de Benoît XVI Summorum  Pontificum et même un peu plus loin, jusque  dans le Pontificat du Pape François, analysant son attitude à l’égard des Franciscains de l’Immaculée, attitude  dont la FSSPX devrait bien tenir compte…

je commence par ce livre I consacré à la subversion, dans l’Eglise, de la  liturgique dans les année conciliaires et post-conciliaires

 

Trois  traits caractérisent cette période conciliaire et post-conciliaire en matière liturgique avant le 3 avril 1969, date de la publication du Nouvel Ordo Missae du Pape  Paul VI :

 

– C’est une période de désordre et de subversion. En effet, « un vent de désordre et de subversion » souffle dans l’Eglise et tout particulièrement sur le plus beau de ses biens : la messe et le latin. Ce sera l’objet du chapitre I de ce Livre I

 

– C’est une période de mépris systématique de la loi : On encourage « au mépris systématique de la législation existante, même récente ? Ce que l’on constate dans, ce que Jean Madiran appellera « le processus de la communion dans la main ». Nous donnerons son analyse dans  le chapitre 2. Les nouvelles générations n’ont pas connu cette « affaire ».

 

– En conséquence, cette période est une période de vacance de la loi laissant la porte ouverte à tous les abus de pouvoir. Nous le montrerons dans le chapitre 3.

Et cela est d’autant plus grave que l’exemple vient de haut : du Pape Paul VI. Ses allocutions sur  le latin le démontrent fort bien. Sa fameuse messe du 5 mars 1965, aussi. Tout cela permet de comprendre le véritable sens de la réforme liturgique voulue par le Concile et son document conciliaire Sacro Sanctum Concilium ». C’est ce qu’analyse très justement M l’abbé Wailliez (FSSPX) et de M Alain Beaugrain, dans un article publié dans la revue Pour qu’Il Règne  de mai-juin 2014, du prieuré de la FSSPX à Bruxelles.

 

-A cette lumière, nous pourrons comprendre comment on en est arrivé à célébrer la messe exclusivement face au peuple, alors qu’aucun texte n’en a jamais fait l’obligation. Ce sera le chapitre 4 qui reprendra une étude de M l’abbé Luc Lefebvre.

 

Mgr Lefebvre a refusé cette subversion « liturgique ». Il s’est même dressé contre. Nous l’avons suivi.

 

 

 

Chapitre 1

 La messe et le latin

 

 

Ainsi avant même la publication du Nouvel Ordo Missae (NOM), un vent de désordre et de subversion systématique, soufflait dans l’Eglise surtout au sujet du latin. Cette subversion était curieusement menée « au nom de Concile »…  mais ce n’était peut-être pas faux tant ce texte Sacro Sanctum Concilium » est équivoque, capable d’interprétations multiples. Nus le montrerons.

 

Nous allons en faire l’histoire de cette subversion. Nous nous inspirons de l’étude M Salleron publiée dans son livre : « la Réforme liturgique » et des études de Jean Madiran, dans « Itinéraires ». Nous donnerons la pensée du cardinal Stickler qui a une interprétation très littérale du texte conciliaire.

 

§-1 Le Latin et la Constitution sur la liturgie.

 

 

L’article 36 de la Constitution sur la liturgie du Concile Vatican II, règle la question du latin dans ses trois premiers paragraphes :

 

§1 : « L’usage de la langue latine, sauf droit particulier, sera conservé (1) dans les rites latins ».

 

§2 : «  Toutefois, soit dans la messe, soit dans l’administration des sacrements, soit dans les autres parties de la liturgie, l’emploi de la langue du pays peut être souvent très utile pour le peuple : on pourra donc lui accorder une plus large place, surtout dans les lectures et les monitions, dans un certain nombre de prières et de chants, conformément aux normes qui sont établies sur cette matière dans les chapitres suivants, pour chaque cas ».

§3  « Ces normes étant observées il revient à l’autorité ecclésiastique qui a compétence sur le territoire, mentionnée à l’article 22, § 2 (même, le cas échéant, après avoir délibéré avec les évêques des régions limitrophes de même langue), de statuer si on emploie la langue du pays et de quelle façon, en faisant agréer, c’est-à-dire ratifier, ses actes par le Siège Apostolique.

§ 4 : «  La traduction du texte latin dans la langue du pays, à employer dans la liturgie, doit être approuvée par l’autorité ecclésiastique ayant compétence sur le territoire, dont il est question ci-dessus ».

Il est difficile de marquer plus clairement le rapport hiérarchique et concret qui est fixé entre le latin et les langues vernaculaires. Le latin est la langue normale, la langue principale, la langue de base, et il est accordé aux langues vernaculaires une place éventuellement plus large que celle qu’elles occupaient avant le Concile. Tous les mots des trois paragraphes le disent positivement. Ils le disent aussi en quelque manière négativement, car il est bien évident que si le Concile avait voulu donner la priorité aux langues vernaculaires, la construction du texte aurait été inverse. Nous aurions lu quelque chose comme ceci : « l’usage des langues vernaculaires sera introduit dans le rite latin…. », et les exceptions ou les réserves au bénéfice de la langue latine eussent ensuite été énumérées.

 

Tous les autres passages de la Constitutions où il est question du latin assignent cette première place notamment les articles 39, 54, 63, 101

 

Lisons l’article 54 : « Usage de la langue du pays »

« On pourra donner la place qui convient à la langue du pays dans les messes célébrées avec concours de peuple, surtout pour les lectures et la « prière commune », et, selon les conditions locales, aussi dans les parties qui reviennent au peuple, conformément à l’article 36 de la présente Constitution.

On veillera cependant à ce que les fidèles puissent dire ou chanter ensemble en langue latine aussi les parties de l’ordinaire de la messe qui leur reviennent.

Mais si quelque part un emploi plus large de la langue du pays dans la messe semble opportun, on observera ce qui est prescrit à l’article 40 de la présente Constitution. »

C’est donc bien clair. La pensée du Concile sur l’usage du latin n’est nullement ambiguë.

 

Or que constatons-nous ?

 

Morceau par morceau, le latin a déserté la messe, au point que c’est le vernaculaire qui est devenu la langue de fond et que, si les choses continuaient et si la « Tradition » n’avait pas réagi, le latin ne subsisterait même plus dans la liturgie. En quelques années, la Constitution conciliaire eut été anéantie.

 

Le Concile, en maintenant le latin comme langue de base dans la liturgie, avait clairement manifesté sa volonté d’éviter toute cassure avec la tradition. Le vernaculaire se voyait offrir des chances nouvelles, mais sans risque d’excessives aventures.

 

C’est le témoignage formel du cardinal Stickler. (Cf : témoignage d’un expert au Concile p.38).

 

Voyons sa pensée exprimée dans ce petit livre blanc publié par la communauté des Chanoines du Christ Roi. Ce livre est un  résumé de ses interventions publiques en matière liturgique.

 

§-2 : La pensée du Cardinal Stickler

 

Le latin, comme langue liturgique.

 

Le Cardinal exprime sur ce sujet – du latin comme langue liturgique – son étonnement. Il ne comprend pas comment, après ce que demandèrent les Pères conciliaires sur ce point, on en soit arrivé à la suppression générale et au triomphe des langues vernaculaires.

 

Ce passage sur le latin de la conférence du cardinal  est fort intéressant. Quand je le découvris pour la première fois, j’étais moi-même dans l’étonnement… admiratif.

 

Il faut le citer aussi dans son intégralité. Il donne un témoignage historique, puis l’enseignement magistériel, enfin les arguments théologiques.

 

Notre Cardinal fut vraiment – durant le Concile – au cœur du problème.

 

a- Et tout d’abord, son témoignage personnel:

 

« A ce stade, il convient de mentionner une disposition du Concile qui a été non seulement mal comprise mais, plus encore, complètement répudiée: la langue cultuelle. Je me permettrai ici, une fois encore, d’étayer mon argument par un souvenir personnel. En qualité d’expert de la Commission pour les séminaires, on m’avait confié le rapport sur la langue latine. Il fut clair et bref et, après mûre discussion, rédigé sous une forme qui correspondait aux souhaits de tous les membres avant d’être soumis à l’aula conciliaire. C’est alors que, sans que l’on s’y attendît, le Pape Jean XXIII signa en toute solennité, à l’autel de Saint-Pierre, la lettre apostolique Vetera, Sapientia, ce qui, de l’avis de la Commission, rendait superflue la déclaration conciliaire sur le latin dans l’Église: cette lettre présentait non seulement le rapport entre la langue latine et la liturgie mais encore toutes les autres fonctions de cette langue dans la vie de l’Église. Lorsque, plusieurs jours durant, la question de la langue du culte fut discutée dans l’aula conciliaire, je suivis avec beaucoup d’attention tout ce débat, ainsi d’ailleurs que la discussion, jusqu’au vote final, des différentes formulations incluses dans la Constitution sur la Sainte Liturgie. Je me rappelle très bien que, à la suite de quelques propositions radicales, un évêque sicilien se leva et adjura les Pères de procéder, sur cette question, avec prudence et intelligence car, sinon, le risque était que la Messe fût dite dans sa totalité en langue vernaculaire, ce qui fit bruyamment éclater de rire toute l’aula conciliaire. Et c’est pourquoi je n’ai jamais compris comment, dans ses Mémoires  publiés en 1983, Mgr Bugnini, à propos du passage radical et complet du latin obligatoire à la langue vernaculaire comme langue cultuelle exclusive, ait pu écrire que le concile avait pratiquement dit que la langue vernaculaire était, dans toute la Messe, une nécessité pastorale (op. cit. pp. 108-121 dans l’édition italienne originale). «À l’encontre de cela, je puis témoigner que les formulations de la Constitution conciliaire sur ce point, tant dans sa partie générale (Art. 36) que dans les dispositions particulières relatives au Sacrifice de la Messe (Art. 54) ont été approuvées quasiment à l’unanimité dans les discussions des Pères conciliaires et surtout lors du vote final : 2152 oui et 4 non ».

 

b- Ensuite l’enseignement magistériel sur le latin :

 

« Au cours des recherches que j’ai effectuées pour préparer le rapport sur la tradition sur lequel devait s’appuyer ce décret conciliaire sur la langue latine, j’ai constaté que toute la Tradition était absolument unanime sur ce point, jusqu’au Pape Jean XXIII : elle s’est toujours prononcée clairement contre toutes les tentatives antérieures visant à renverser cet ordre des choses. Je pense ici en particulier à la décision du Concile de Trente, sanctionnée d’un anathème, contre Luther et le Protestantisme, à Pie VI contre l’Évêque Ricci et le Synode de Pistoia, et à Pie XI qui, à propos de la langue cultuelle de l’Église, a prononcé un clair « non vulgaris ».

 

Là, le Cardinal ne fait que citer mais ses citations sont incontestables ! Jugez-en !

 

Le Concile de Trente enseigne bien dans son canon 9 dans sa 22e session : « Si quelqu’un dit… que la Messe ne doit être célébrée qu’en langue vernaculaire… qu’il soit anathème ». Et dans son chapitre doctrinal — au chapitre VIII de la même session — on lit: « Bien que la Messe contienne un riche enseignement pour le peuple fidèle, il n’a cependant pas paru bon aux Pères qu’elle soit célébrée indistinctement en langue vulgaire ».

 

Toutefois, ordre était donné aux pasteurs d’âmes de donner régulièrement des instructions pour expliquer le sens des belles pièces du Missel romain.

 

Quant au Pape Pie VI invoqué par le Cardinal, on peut, de fait, citer entre autres, la proposition 66: « La proposition qui affirme qu’il est contraire à la pratique apostolique et aux conseils de Dieu, de ne pas préparer au peuple des voies plus faciles pour joindre sa voix à la voix de toute l’Église, si elle est entendue en ce sens qu’il faut introduire l’usage de la langue vulgaire dans les prières liturgiques, est fausse, téméraire, perturbe l’ordre présent pour la célébration des mystères, produit facilement de nombreux maux ».

 

Voici qui est bien dit. Voilà la vraie tradition catholique que Mgr Bunigni et son personnel devaient défendre et respecter, et qu’ils n’ont pas défendue, ni respectée, ni même le Pape Paul VI. Vraiment, le Cardinal prouve bien son jugement : « L’Ordo Missae — celui issu du Concile Vatican II — est radicalement nouveau », quant à la langue liturgique, ne respectant pas la tradition catholique.

 

c- Enfin les arguments développés par le Cardinal pour le maintien du latin comme langue liturgique

 

« Il faut bien voir que la raison n’en est pas uniquement d’ordre cultuel, même si cet aspect est toujours mis en avant. C’est aussi une question de révérence, de crainte respectueuse : comme le voile recouvre les vases sacrés, le latin sert de protection contre la profanation — à la manière de l’iconostase des Églises orientales derrière laquelle s’accomplit l’anaphore — et aussi contre le danger de vulgariser, en utilisant la langue vernaculaire, toute l’action liée au mystère, ce qui se produit effectivement souvent de nos jours. Mais cela tient aussi à la précision du latin, qui sert comme nulle autre langue la doctrine dogmatiquement claire ; au danger d’obscurcir ou de fausser la vérité dans les traductions, ce qui d’ailleurs pourrait aussi porter gravement préjudice à l’élément pastoral, si important ; et aussi à l’unité qui est ainsi manifestée et renforcée dans toute l’Église ».

 

« Toujours du point de vue pastoral, l’abandon du latin comme langue liturgique, à l’encontre de la volonté expresse du Concile, engendre une deuxième source d’erreurs, plus graves encore : je veux parler de la fonction de langue universelle qu’assume le latin, qui unit toute l’Église, justement, dans le culte public, sans déprécier aucune langue vernaculaire vivante. Et précisément à notre époque où le concept d’Église qu’on voit se développer met l’accent sur l’ensemble du peuple de Dieu considéré comme Corps mystique du Christ, aspect d’ailleurs toujours souligné dans la réforme, il se fait que, par l’introduction de l’usage exclusif des langues vernaculaires, et même de dialectes, l’unité de l’Église universelle est remplacée par une diversité d’innombrables chapelles populaires, jusqu’au niveau des communautés villageoises et églises paroissiales, qui sont séparées les unes des autres par une véritable différence de tension naturelle qui, entre elles, est et ne peut qu’être insurmontable. D’un point de vue pastoral, comment alors un Catholique peut-il retrouver sa Messe dans le monde entier, et comment peut-on abolir les différences entre races et peuples dans un culte commun, grâce à une langue liturgique sacrée commune, ainsi que l’a expressément souhaité le Concile, alors qu’il y a tant d’occasions, dans un monde devenu si petit, de prier ensemble ? Dans quelle mesure alors chaque prêtre a-t-il la possibilité pastorale d’exercer le sacerdoce suprême de la Sainte Messe n’importe où, surtout dans ce monde où les prêtres sont devenus si rares ? ».

 

Le Concile ne décrète pas l’élimination totale du latin. Il décrète exactement le contraire :« l’usage de la langue latine, sauf cas particulier, sera observé dans les rites latins » (art 36)

Seulement s’il y a eu le Concile, il y a eu aussi l’après Concile ; il y a eu, il y a cette mentalité post-conciliaire, dénoncée par Paul VI lui-même  – n’a-t-il pas parlé d’autodestruction de l’Eglise – de fumée de Satan dans l’Eglise – et Benoît XVI  – souvenez-vous de sa conférence du 22 décembre 2005 – qui consiste à porter partout la subversion. Les novateurs veulent la substitution complète du français au latin, non pas seulement et non pas tant parce que les cérémonies religieuses seraient ainsi plus intelligibles, mais parce qu’il s’agit d’affirmer clairement et visiblement qu’on en a fini avec le passé et la tradition, qu’on marche avec son temps et sa modernité et qu’on s’oriente vers l’avenir.

 

Mais plus que cela encore :

 

Cette attaque contre le latin, comme langue sacrée, comme langue du culte est une caractéristique de l’hérésie anti-liturgique si bien décrite par Dom Guéranger dans ses « Institutions Liturgique (T I p 419).

 

§-3 Dom Guéranger et le latin

 

C’est très Important. C’est la huitième proposition :

 

« 8- La réforme liturgique ayant pour une de ses fins principales l’abolition des actes et des formules mystiques, il s’ensuit nécessairement que ses auteurs devaient revendiquer l’usage de la langue vulgaire dans le service divin. Aussi est-ce là un des points les plus importants aux yeux des sectaires. Le culte n’est pas une chose secrète, disent-ils ; il faut que le peuple entende ce qu’il chante. La haine de la langue latine est innée au cœur de tous les ennemis de Rome ; ils voient en elle le lien des Catholiques dans l’univers, l’arsenal de l’orthodoxie contre toutes les subtilités de l’esprit de secte, l’arme la plus puissante de la Papauté. L’esprit de révolte qui les pousse à confier à l’idiome de chaque peuple, de chaque province, de chaque siècle, la prière universelle, a, du reste, produit ses fruits, et les Réformés sont à même tous les jours de s’apercevoir que les peuples catholiques, en dépit de leur prières latines, goûtent mieux et accomplissent avec plus de zèle les devoirs du culte que les peuples Protestants. A chaque heure du jour, le service divin a lieu dans les Eglises Catholiques ; le fidèle qui y assiste laisse sa langue maternelle sur le seuil ; hors les heures de la prédication, il n’entend que des accents mystérieux qui même cessent de retentir dans le moment le plus solennel, au Canon de la Messe ; et cependant ce mystère le charme tellement qu’il n’envie pas le sort du Protestant dont l’oreille n’entend jamais que des sons dont elle perçoit la signification. Tandis que le Temple Réformé réunit, à grand peine, une fois la semaine, les Chrétiens puristes, l’Eglise Papiste voit sans cesse ses nombreux autels assiégés par ses religieux enfants, qui s’arrachent à leurs travaux pour venir entendre ces paroles mystérieuses qui doivent être de Dieu, car elles nourrissent la foi et charment les douleurs. Avouons-le, c’est un coup de maître du Protestantisme d’avoir déclaré la guerre à la langue sainte ; s’il pouvait réussir à la détruire, son triomphe serait bien avancé. Offertes aux regards profanes, comme une vierge déshonorée, la Liturgie, dès ce moment, a perdu son caractère sacré, et le peuple trouvera bientôt que ce n’est pas trop la peine qu’il se dérange de ses travaux ou de ses plaisirs pour aller entendre comme on parle sur la place publique. Otez à l’Eglise Française ses déclamations radicales et ses diatribes contre la prétendue vénalité du clergé, et allez voir si le peuple ira longtemps écouter le soi-disant Primat des Gaules crier : « Le Seigneur est avec vous » ; et d’autres lui répondre ; « Et avec votre esprit ».Nous traiterons ailleurs, d’une manière spéciale, de la langue liturgique ».

 

Résumons la pensée de Dom Guéranger :

-les ennemis de Rome ont la haine du latin ;

-le latin est au principe de l’unité des catholiques ;

-le latin est l’arsenal de l’orthodoxie ;

-le latin n’éloigne pas les fidèles du devoir de rendre leur culte à Dieu. Bien au contraire ! Les églises catholiques restent pleines, celles des Réformés se vident de plus en plus ;

-le latin par son caractère sacré permet de garder le sens du mystère nécessaire à la foi du peuple.

 

§-4 Mgr Lefebvre et le latin liturgique :

 

Mgr Lefebvre dans son « Itinéraire spirituelle » n’a pas de mot assez fort pour fustiger ce refus de la Romanité, de la langue latine dans le culte divin : C’est sa 3ème note complémentaire. Elle a pour titre

 

3- Le choix providentiel de Rome, comme Siège de Pierre et les bienfaits de ce choix pour la croissance du Corps Mystique de NSJC

 

« Je crois devoir ajouter quelques lignes pour attirer l’attention de nos prêtres et de nos séminaristes sur le fait incontestable des influences romaines sur notre spiritualité, sur notre liturgie, et même sur notre théologie

 

On ne peut nier que ce soit là un fait providentiel : Dieu qui conduit toutes choses, a dans sa sagesse infinie préparé Rome a devenir le siège de Pierre et le centre du rayonnement de l’Evangile. D’où l’adage « Unde Christo e Romano ».

Dom Guéranger dans son « Histoire de sainte Cécile » montre la grande part qu’ont pris les membres des grandes familles romaines dans la fondation de l’Eglise, donnant leurs biens et leur sang pour la victoire et le règne de Jésus-Christ. Notre liturgie romaine en est le témoin fidèle.

 

La Romanité n’est pas un vain mot. La langue latine en est un exemple important. Elle a porté l’expression de la foi et du culte catholique jusqu’aux confins du monde. Et les peuples convertis étaient fiers de chanter leur foi dans cette langue, symbole réel de l’unité de la foi catholique.

 

Les schismes et les hérésies ont souvent commencé par une rupture avec la Romanité, rupture avec la liturgie romaine, avec le latin, avec la théologies des Pères et des théologiens latins et romains.

 

C’est cette force de la foi catholique enracinée dans la Romanité, que la Maçonnerie a voulu faire disparaître en occupant les Etats pontificaux et en enfermant la Rome catholique dans la Cité du Vatican. Cette occupation de Rome par les Maçons a permis l’infiltration dans l’Eglise, du modernisme et la destruction de la Rome catholique par les clercs et les Papes modernistes qui s’empressent de détruire tout vestiges de « Romanité » : la langue latine, la liturgie romaine. Le pape slave est le plus acharné à changer le peu que gardait le Traité du Latran et le Concordat. Rome n’est plus ville sacrée. Il encourage l’implantation des fausses religions à Rome, y accomplit de scandaleuses réunions œcuméniques, pousse partout à l’inculturation de la liturgie, détruisant les derniers vestiges de la liturgie romaine. Il a modifié dans la pratique le statut de l’Etat du Vatican. Il a renoncé au couronnement, refusant ainsi d’être chef d’Etat. Cet acharnement contre la « Romanité » est un signe infaillible de rupture avec la foi catholique, qu’il ne défend plus.

 

Les Universités pontificales romaines sont devenues des chaires de pestilence moderniste. La mixité de la Grégorienne est un scandale perpétuel.

Tout est à restaurer in Christo Domino, à Rome comme ailleurs.

 

Aimons scruter comme les voies de la Providence et de la Sagesse divine passent par Rome et nous conclurons qu’on ne peut être catholique sans être romain. Cela s’applique aussi aux catholiques qui n’ont ni la langue latine ni la liturgie romaine ; s’ils demeurent catholiques, c’est parce qu’ils demeurent romains – comme les maronites par exemple, par les liens de la culture française catholique et romaine qui les a formés.

 

C’est d’ailleurs faire une erreur, à propos de la culture romaine, que de parler de culture occidentale. Les juifs catholiques ont apportés avec eux de l’Orient tout ce qui était chrétien, tout ce qui dans l’Ancien Testament était une préparation et allait être un apport au Christianisme, tout ce que NSJC a assumé et que l’Esprit Saint a inspiré aux Apôtres d’utiliser. Que de fois les épîtres de saint Paul nous enseignent à ce sujet !

Dieu a voulu que le Christianisme, coulé en quelque sorte dans le moule romain, en reçoive une vigueur et une expansion exceptionnelles. Tout est grâce dans le plan divin et Notre divin Sauveur a tout disposé, comme il est dit des Romains, « cum consillio et patientia » ou « suaviter et fortiter » !

A nous aussi de garder cette Tradition romaine voulue par NS, comme Il a voulu que nous ayons Marie pour Mère ».  (Cf p. 90-92)

 

On peut donc conclure, de la pensée de Mgr Lefebvre,  que, dans le domaine liturgique, c’est l’abandon du latin qui résume la défaite de Rome et le triomphe de la subversion moderniste.

 

§-5 Les raisons de l’abandon.

 

Mais pourquoi cet abandon ?

 

Pour des raisons simples qui tiennent au conditionnement.

 

Toute la presse a fait campagne pour le français. Où trouverait-on une population qui résiste à la presse unanime, sans parler de la radio et de la télévision ? Les arguments mis en avant étaient ceux qui convainquent les foules. On disait : c’est le progrès, il faut sortir du Moyen-âge.  Qui voudrait être contre le progrès ? La nouveauté, le changement, la mode séduisent toujours. Qui voudraient faire partie des passéistes, des rétrogrades, des réactionnaires, des traditionalistes ? Mieux valait évidement être pour la réforme, la révolution, l’avenir, les lendemains qui chantent.

 

On disait aussi : c’est pour que votre religion soit intelligible, pour que vous la compreniez et  qu’ainsi vous puissiez mieux participer aux cérémonies du culte. Comment refuser cet appel, flatteur, à l’intelligence ? Si nous sommes adultes, il va de soi que nous devons tutoyer Dieu et lui parler en quelque sorte d’égal à égal, en personnes libres et intelligentes capables de dialoguer au même niveau

 

On disait encore : le latin n’est connu que d’une minorité de privilégiés ; or l’Eglise est l’Eglise des pauvres, sa prière est pour tout le monde et non pour ceux qui ont eu la chance de faire des études supérieures. L’argument est irrésistible…Il fut utilisé par le Pape Paul VI, lui-même. (Voir plus bas)

 

§-6 Jean XXIII et le latin.

 

Jean XXIII explique,  dans un texte fameux,  Veterum Sapientiae, signée sur l’autel du Bernin avec grande solennité le 22 février 1962, l’importance du latin pour l’Eglise. Je vous y renvoie. (Vous trouvez le texte sur le site  du Vatican)

 

Or  Jean XXIII est le pape du Concile Vatican II. Il défendait l’usage du latin, non seulement pour les documents officiels du Vatican, non seulement pour les études des clercs, mais aussi pour la langue liturgique. Non pas en passant, dans une allocution improvisée, mais dans une constitution solennelle et qu’il tint à promulguer personnellement à Saint Pierre, en présence de quarante cardinaux et de je ne sais combien d’évêques, de curés et de notabilités romaines.

 

 

§-7 Que s’est-il passé ?

 

Il s’est passé que des siècles de tradition, la pensée de tous les papes et de Jean XXIII, le pape du Concile et enfin le Concile lui-même, Vatican II, dont la Constitution liturgique prescrit expressément que « l’usage de la langue latine, sauf droit particulier, sera observé dans les rites latins » (art 36), il s’est passé que tout cela a craqué devant la subversion moderniste implantée à l’intérieur de l’Eglise en invoquant même l’autorité du Concile, se cachant derrière « l’esprit du Concile » et derrière la pensée du Pape Paul VI lui-même qui a succédé au Pape Jean XXIII .

 

§-8 Paul VI et le latin

 

Il est certain que la manière de Paul VI déconcerte beaucoup.

 

Dans un article des Etudes (Juillet-Août 1967 p 81) le P. Rouquettes rapporte le propos d’un ami romain, réel ou imaginaire, selon lequel « si les paroles de Paul VI sont souvent des mises en garde contre les excès de la réforme, ses décisions pour la plupart vont dans le sens de cette réforme » (II s’agit de la Reforme de l’Eglise et non pas uniquement de la réforme liturgique). C’est lui qui est le juste interprète de la loi, et en particulier du document Sacro Sanctum Concilium.

Que faut-il en penser ?

 

En premier lieu ce qu’il faut dire c’est que c’est le pape qui réforme.

II ne va pas dans le sens d’une réforme qui lui serait proposée ou imposée. Il réforme lui-même (Cf la messe qu’il célébra lui-même le 5 mars 1965, à Rome)

Et donc la vraie question qui se pose, ce n’est pas de savoir si Paul VI va ou non dans le sens de la réforme voulue par les novateurs, mais quelle est sa pensée personnelle et sur quelle voie il entend mener l’Eglise.

Cette question, elle se pose notamment à propos de l’extension du français à toute la messe. Il y a la une réforme qui est conforme au désir des novateurs, mais qui est contraire à l’esprit et à la lettre de la Constitution sur la liturgie.(Cf notre démonstration plus haut). Or c’est un fait que Paul VI ne l’a pas empêchée. Il l’a tacitement du moins approuvée, c’est-à-dire qu’il a, dans sa souveraineté pontificale, aboli partiellement un texte conciliaire. Son droit n’est pas douteux. Mais le paradoxe de la situation c’est que, dans son attitude, ce n’est pas la plénitude de l’exercice de son droit que l’on voit ; on voit au contraire le triomphe des réformateurs qui auraient été assez puissants pour soumettre sa volonté à leur volonté propre.

 

§-9 En est-il ainsi ?

Le pape a-t-il cédé ?

Ou a-t-il accompli une réforme qu’il était résolu personnellement à accomplir ?

 

A ces questions personne ne peut répondre avec une certitude absolue.

 

Mais nous pouvons conjecturer.

Tout d’abord en ce qui me concerne, je suis convaincu que la volonté du pape n’a plié devant aucune autre volonté. Ce n’est qu’une conviction personnelle mais elle est pleine et entière. Le pape sait ce qu’il veut et il a certainement voulu ce qu’il a fait.

 

A quelle fin ?

Voilà plutôt sur quoi l’on peut s’interroger.

 

Peut-être pour que le peuple ait une meilleure intelligence de la foi et de la liturgie.

C’est du moins ce qu’il a exprimé à deux reprises : le 7 mars 1965 et le 26 novembre 1969.

 

Voici les textes :

Le 7 mars 1965, il déclarait aux fidèles massés sur la place Saint Pierre :

 

« C’est un sacrifice que l’Eglise accomplit en renonçant au latin, langue sacrée, belle, expressive, élégante. Elle a sacrifié des siècles de tradition et d’unité de langue pour une aspiration toujours plus grande à l’universalité ».

 

Ce « sacrifice », dans l’esprit de Paul VI, il semble définitif.

 

Il s’en expliquait de nouveau, le 26 novembre 1969, en présentant, le nouveau rite de la messe : « Ce n’est plus le latin, disait-il, mais la langue courante, qui sera la langue principale de la messe. Pour quiconque connaît la beauté, la puissance du latin, son aptitude à exprimer les choses sacrées, ce sera certainement un grand sacrifice de la voir remplacé par la langue courante. Nous perdrons la langue des siècles chrétiens, nous devenons comme des intrus et des profanes dans le domaine littéraire de l’expression sacrée. Nous perdons ainsi en grande partie cette admirable et incomparable richesse artistique et spirituelle qu’est le chant grégorien. Nous avons, certes, raison d’en éprouver du regret et presque du désarroi… »

 

Les mots sont si forts – qu’on les relise – qu’on ne peut s’empêcher de poser la question : mais alors pourquoi ?

 

« La réponse semble banale et prosaïque, dit Paul VI, mais elle est bonne, parce que humaine et apostolique. La compréhension de la prière est plus précieuse que les vétustes vêtements de soie dont elle s’est royalement parée. Plus précieuse est la participation du peuple, de ce peuple d’aujourd’hui qui veut qu’on lui parle clairement, d’une façon intelligible qu’il puisse traduire dans son langage profane. Si la noble langue latine nous coupait des enfants, des jeunes, du monde du travail et des affaires, si elle était un écran opaque au lieu d’être un cristal transparent, ferions-nous un bon calcul, nous autres pêcheurs d’âmes, en lui conservant l’exclusivité dans le langage de la prière et de la religion ? »

 

C’est donc l’argument de l’intelligibilité (source de participation) que retient Paul VI.

 

Observons cependant deux points :

 

En premier lieu, à sa manière toujours balancée, Paul VI déclare, d’un côté, que la langue courante remplacera désormais le latin à la messe et, d’un autre côté, que le latin n’aura plus « l’exclusivité » dans la prière et la religion. On est mal fixé sur la part respective des deux langues, quoique la volonté pontificale soit non douteuse. C’est la langue courante qu’il veut.

 

En second lieu, c’est dans des allocutions que le pape donne son mot d’ordre. Mais des allocutions ne sont pas des décisions. Le pape indique une préférence personnelle, mais il n’abroge pas, comme il en a le droit, la Constitution conciliaire sur la liturgie. Seule celle-ci demeure la loi et c’est nécessairement la loi qui prime. On peut donc espérer qu’on y reviendra. (Voir mon texte sur Benoît XVI et le retour du latin)

Toutefois, vous le voyez la loi conciliaire est purement et simplement bafouée. C’est l’anarchie…pratiquée au plus haut niveau.

 

§-10  Jean Madiran commentait ce discours en ces termes :

 

« Ce sont là des « affirmations objectivement et manifestement contraire à la loi en vigueur, non abrogée, telle que nous venons de la rappeler ; contraire aussi au numéro 116 de la Constitution liturgique, que nous n’avons pas encore cité, et auquel on se réfère trop rarement au sujet du latin ; numéro 116 qui stipule : « L’Eglise reconnaît dans le chant grégorien le chant propre de la liturgie romaine; c’est donc lui qui, dans les actions liturgiques, toutes choses égales d’ailleurs, doit occuper la première place ».

Sans latin plus de grégorien.

Si le grégorien est le chant propre de la liturgie romaine, c’est donc que le latin en est obligatoirement la langue propre.

Si le grégorien doit occuper la première place dans les actions liturgiques, c’est donc, obligatoirement, que le latin doit y occuper la première place.

Le pape a sans doute le pouvoir d’abroger la loi conciliaire ; mais une simple allocution, même du pape n’a pas de soi ce pouvoir.

Au demeurant Paul VI déclare à jet continu que le Concile en général et la Constitution liturgique en particulier doivent toujours être tenus pour loi de l’Eglise…

Donc quand Paul VI déclare dans son allocution du 26 novembre 1969 : « Ce n’est plus le latin, mais la langue courante qui sera la langue principale de la messe » quand il précise sans équivoque que désormais « la latin sera remplacé par la langue courante », quand il ajoute : « Nous perdons la langue des siècles chrétiens, nous devenons comme des intrus et des profanes dans le domaine littéraire de l’expression sacrée », il énonce ainsi son opinion privée, sa tendance personnelle, sa préférence particulière, dont il donne d’ailleurs aussitôt le motif : il en espère une plus grande « compréhension », il pense que le latin risque de « nous couper des enfants, des jeunes, du monde du travail et des affaires ». C’est une opinion. Ce n’est qu’une opinion. Rien ne nous impose d’y adhérer. Rien ne nous interdit de la critiquer (beaucoup de raisons, enseignées par l’Eglise nous y invitent au contraire). Cette opinion n’est nullement proposée à notre obéissance par un acte du Magistère. C’est une confidence sur un état d’âme (et cette confidence, bien sûr, nous renseigne terriblement). C’est une volonté individuelle : la volonté déclarée de « remplacer » le latin par le « vernac ». C’est une impulsion, c’est un encouragement donnés à tout un parti dans l’Eglise, le plus puissant, le plus dévastateur : celui qui veut nous transformer en intrus et en profanes dans le domaine de l’expression religieuse. Mais enfin il est bien clair que cette volonté personnelle de remplacer le latin par le « vernac » dans la liturgie est contraire aux lois de l’Eglise en général et à la loi de Vatican II en particulier. Cette infraction aux lois nous en prenons acte, sans irrespect, sans plaisir, mais sans faiblesse » (Itinéraires n°146)

 

Nous trouvons ainsi une nouvelle caractéristique de la période qui a précédé de quelques années l’introduction dans l’Eglise du nouvelle Ordo Missae, nouvelle caractéristique que l’on peut ainsi formuler : c’est l’encouragement au mépris systématique pour la législation existante, même récente, et l’établissement de facto d’une sorte de vacance de la légalité de plus en plus étendue laissant la porte ouverte à tout abus de pouvoir, à toute subversion.

 

Nous nous sommes dressés contre…

 

Ce système  – de la vacance de la loi – nous le voyons clairement en ce qui concerne l’introduction dans l’Eglise de la langue vernaculaire au mépris évident de la loi la plus récente du Concile de Vatican.

 

§-11 L’importance du latin.

 

Il s’agit d’une question d’une extrême importance pour elle-même et parce qu’elle en commande beaucoup d’autres.

Il ne s’agit pas de savoir si j’aime la messe en latin. Il s’agit de savoir si c’est bien et si c’est le mieux.

 

A- La messe en latin assure l’unité du peuple chrétien. C’est pourquoi ce sont les grandes prières communes pour lesquelles l’observation du latin (ou du grec) semble en priorité s’imposer : le Kyrie, le Gloria, le Credo, le Sanctus, le Pater, l’Agnus Dei… Dites ou chantées, ces parties doivent être sues par tous les catholiques afin que sur la surface entière de la terre, ils puissent se reconnaître et se sentir en communion à la messe… surtout dans les grands rassemblements…

 

Tous les fidèles ont droit au latin dans toutes les messes et il faut qu’ils aient ce latin conformément à la Constitution liturgique.

 

La bonne solution et il n’y en a qu’une c’est le respect de la Constitution conciliaire, c’est-à-dire ne donner aux langues vernaculaires que la place qui convient et rendre au latin sa place première, notamment pour les grandes prières communes.

 

L’unité catholique est mise en pièce par la suppression de la langue commune qui en est à la fois le symbole, l’expression et le plus ferme support.

On dit souvent que, pour les grandes cérémonies internationales, à Rome, dans les pèlerinages, dans le congrès… le latin subsisterait. Mais comment subsisterait-il, ou à quoi servirait-il, si personne ne le sait plus ? Ceux qui à Rome, à Lourdes…. chantent aujourd’hui encore ensemble le Credo, le chantent parce qu’ils le savent ; ils ne le chanteraient évidemment plus s’ils ne le savaient plus. Et comment le sauraient-ils s’ils ne l’apprenaient plus au catéchisme et s’ils ne le chantaient plus dans les paroisses et dans les cérémonies nationales ?

 

Cette ignorance passerait tout naturellement des laïcs aux clercs. Et si les prêtres ne disent plus la messe en latin, s’ils ne récitent plus le bréviaire en latin, ils ne sauront plus le latin qu’ils se refuseront d’ailleurs à apprendre. Comme il faudrait tout de même bien une langue internationale à Rome, cette langue se fera au bénéfice de l’anglais et de l’allemand, le protestantisme renforçant ainsi sa prééminence dans le dialogue œcuménique.

Ne nous faisons pas d’illusion : l’attentat contre le latin c’est un attentat contre Rome et contre le catholicisme. Si le latin doit disparaître de nos églises si on ne l’y chante plus, si on ne l’y entend plus, la liturgie catholique et la doctrine catholique ne résisteront pas à la pression du monde moderne.

 

B- Notre civilisation est attaquée et nous devons nous retremper dans nos sources, nos origines, notre tradition et notre histoire. Pour affronter le monde extérieur nous devons d’abord rester nous-mêmes, être nous-mêmes. Nous le devons comme occidentaux en même temps que comme catholiques. Le problème du latin qui est celui de notre religion parce qu’elle est romaine est aussi celui de notre civilisation. Vouloir nous en couper serait un véritable suicide.

 

Serait-il difficile d’obtenir des catholiques le respect de la Constitution conciliaire en ce qui concerne le latin ?

 

Ce serait d’autant moins difficile qu’il en a toujours été ainsi. Pourquoi, tout d’un coup, serait-il difficile de faire ce qui s’est toujours fait sans le moindre encombre au cours des siècles et jusqu’à ces dernières années ? Les fidèles ne demanderaient pas mieux.

Si on objecte qu’ils ont adopté le français et qu’ils ne veulent plus le latin, je répondrai que ce n’est pas vrai. Ils sont satisfaits du français pour certaines prières où le latin peut être un obstacle à leur participation mais le refus général du latin ne correspond nullement à leur pensée qui est, à cet égard, violée par tous les procédés classiques du viol des foules. Que les raisons profondes du maintien du latin là où il doit être maintenu leur soient expliquées, ils les comprendront aussitôt et s’y rallieront avec joie. Aujourd’hui où les jeunes, notamment, sont si sensibles à tout ce qui peut les unir au-delà des rivalités nationales, comment ne sentiraient-ils pas le lien d’unité et de solidarité que constitue une même prière dite dans la même langue sur tous les points du globe. Qu’ils prennent conscience qu’ils reconnaîtront ces prières dans toutes les églises chaque fois qu’ils voyagent, qu’ils prennent conscience enfin qu’ils pourront les dire ensemble quand ils se retrouveront en n’importe quel lieu pour n’importe quelle réunion… voilà qui emportera toujours leur accord sur la place que doit conserver le latin dans leur religion.

Il est affreux de penser que ces vérités élémentaires qui ont toujours été reçues comme des évidences dans l’Eglise, du sommet de la hiérarchie au dernier des fidèles, puissent être aujourd’hui battues en brèche par un « gang de révolutionnaires » dont le seul but est la destruction du catholicisme, destruction à laquelle ils amènent hélas ! tant d’esprits honnêtes à coopérer, en la présentant comme une rénovation.

 

C-Enfin et ultimement et surtout, le latin est essentiel parce qu’il est lié à tout le reste et qu’il permet de voir clairement le processus de la désagrégation de la liturgie.

 

En supprimant le latin, en effet, on affirme nettement la rupture avec tout le passé et on ouvre la voie à toutes les innovations. A lui seul il est un rempart contre les extravagances. Le rempart abattu, tout devient possible, et permis, et recommandable. Parce que des siècles et des siècles d’usage l’ont rendu sacré, il suffit de l’abolir pour instaurer la « désacralisation » dans tous les domaines. Ce qui est un objectif hautement avoué. Avec le sacré, c’est aussi le mystère qui disparaît. Or il s’agit justement de faire disparaître le mystère. Le christianisme doit être clair intelligible, compréhensible, fonctionnel, rationnel, rationaliste. La foi doit devenir raison. Balayons les obstacles. Le latin en est un. Voilà ce que voulait Luther.

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