La Revue Item - « La Tradition sans peur »
Suivez les activités de l'Abbé Aulagnier
Entraide et Tradition

Le pape François et la corédemption de Marie

publié dans nouvelles de chrétienté le 20 décembre 2019


Le pape François, Marie et la notion de co-rédemption

(Source: RIPOSTE CATHOLIQUE
17 DÉCEMBRE 201)

Ecclesia Dei adflicta. Pie XI avait déclaré le 30 novembre 1933 : « Le Rédempteur se devait, par la force, d’associer sa Mère à son œuvre. C’est pour cela que nous l’invoquons sous le titre de Corédemptrice. Elle nous a donné le Sauveur. Elle l’a conduit à son œuvre de rédemption jusqu’à la croix. Elle a partagé avec lui les souffrances de l’agonie et de la mort en laquelle Jésus consommait le rachat de tous les hommes ».

Mais le Pape François a estimé, le 12 décembre 2019, que la Vierge Marie n’était pas « Corédemptrice » et qu’il n’était pas nécessaire de « perdre du temps » avec ces tonterias (« absurdités, sottises, inepties »).

Nous publions ci-après l’article d’un éminent mariologue, dont il nous a semblé, compte tenu du climat qui règne dans les Universités catholiques, ne pas devoir dévoiler le nom.

*

À propos de la stupéfiante déclaration du Pape François, lors de l’homélie de la messe de Notre-Dame de Guadalupe, à Saint-Pierre de Rome, le 12 décembre 2019

La Vierge Marie n’est pas une « Corédemptrice » et il n’est pas nécessaire de « perdre du temps » avec de nouveaux dogmes, a déclaré le Pape François dans la messe dédiée à la Vierge de Guadalupe, le 12 décembre 2019, qui a qualifié l’idée de ce nouveau dogme de « non-sens ».

Selon le Saint-Père François, est « absurde » du moins, la suggestion même de proclamer de nouveaux dogmes mariaux : « Elle n’a jamais voulu pour Lui-même ce qui appartenait à son Fils » a affirmé Le Pape François. « Elle ne s’est jamais présentée comme co-rédemptrice. Non. Mais Disciple ». Et il insista : « Elle n’a jamais volé pour elle ce qui appartenait à son Fils », préférant « Le servir. Parce qu’elle est mère. Elle donne la vie ».

Et il conclut : « Quand ils viennent à nous avec l’idée de la déclarer Corédemptrice ou de proclamer ce dogme, ne nous perdons pas dans l’absurdité » 1.

Outre la forme, et donc le ton particulièrement incisif, voire agressif, sur le fond, on ne peut que déplorer le refus présenté comme irrévocable d’une initiative présentée comme une « absurdité », qui, cependant, comme on va le voir, a bénéficié de la faveur de nombreux papes, théologiens et saints.

Enfin, il est dommage que ces propos polémiques aient été tenus dans l’action liturgique de la sainte Messe, pendant l’homélie. Ils auraient pu faire l’objet d’un discours avec une réflexion nuancée et prononcée sur un ton paternel.

Le Magistère pontifical : permanence et approfondissement

Le thème de la médiation maternelle de la Vierge Marie au pied de la Croix rédemprice a fait l’objet d’un enseignement constant et sans cesse plus approfondi du Magistère pontifical. Après avoir cité les Souverains Pontifes de Léon XIII jusqu’à Benoît XVI, et en omettant volontairement, dans un premier temps, Jean-Paul II, nous verrons ensuite que ce dernier est allé aussi loin que possible dans cet approfondissement, préparant ainsi le terrain à la proclamation éventuelle d’un cinquième dogme. Enfin, nous évoquerons l’apparition de Notre-Dame de tous les peuples d’Amsterdam, reconnue officiellement en 2002.

Léon XIII et saint Pie X

De Léon XIII, cet extrait de la lettre encyclique Adjutricem Populi (sur le Rosaire) du 5 septembre 1895 : « Après avoir été associée au mystère de la rédemption des hommes, elle est aussi associée à la dispensation de la grâce qui, de ce mystère, devait dériver sur tous les temps : c’est là un pouvoir preque illimité qui lui a été conféré ».

De saint Pie X, cet extrait de la lettre encyclique Ad Diem illum Laetissimum du 2 février 1904 : « Quand vint pour Jésus l’heure suprême, on vit la Vierge “debout auprès de la croix, saisie sans doute par l’horreur du spectacle, heureuse pourtant de ce que son Fils s’immolait pour le salut du genre humain, et, d’ailleurs, participant tellement à ses douleurs que de prendre sur elle les tourments qu’il endurait lui eût paru, si la chose eût été possible, infiniment préférable” (S. Bonav., I Sent., d. 48, ad Litt., dub. 4). La conséquence de cette communauté de sentiments et de souffrances entre Marie et Jésus, c’est que Marie “mérita très légitimement de devenir la réparatrice de l’humanité déchue” (Eadmeri Mon., De Excellentia Virg. Mariæ, c. 9), et, partant, la dispensatrice de tous les trésors que Jésus nous a acquis par sa mort et par son sang […]. Du fait que Marie l’emporte sur tous en sainteté et en union avec Jésus-Christ et qu’elle a été associée par Jésus-Christ à l’œuvre de la Rédemption, elle nous mérite « de congruo », comme disent les théologiens, ce que le Christ Jésus nous a mérité « de condigno », et elle est le ministre suprême de la dispensation des grâces ».

Benoît XV et Pie XI

L’idée de proclamer le caractère “co-rédempteur” de Marie – c’est-à-dire qu’elle participe au pouvoir rédempteur de son Fils – est récurrente puisque le Pape Pie XI en a parlé au début du siècle dernier. À des pélerins de Vicenza en Italie, le 30 novembre 1933, il déclarait : « Le Rédempteur se devait, par la force, d’associer sa Mère à son œuvre. C’est pour cela que nous l’invoquons sous le titre de Corédemptrice. Elle nous a donné le Sauveur. Elle l’a conduit à son œuvre de rédemption jusqu’à la croix. Elle a partagé avec lui les souffrances de l’agonie et de la mort en laquelle Jésus consommait le rachat de tous les hommes. C’est précisémment au pied de la croix, durant les derniers moments de sa vie, que le Rédempteur l’a proclamée notre Mère, et la mère de tous : “Voici ton fils”, lui disait-il, en parlant de Saint Jean qui nous représentait tous. Et nous-mêmes nous étions tous en cet apôtre pour recueillir ces autres paroles du Sauveur : “Voici ta Mère” ».

Le prédécesseur de Pie XI, Benoît XV, dans une homélie datant de 1920 à l’occasion de la canonisation de saint Gabriel de la Vierge douloureuse et de sainte Marguerite Marie Alacoque, déclarait : « Mais les souffrances de Jésus ne peuvent être séparées des peines de Marie. Tout comme le premier Adam eut une femme comme complice dans sa rébellion contre Dieu, le nouvel Adam voulait qu’une femme partage son œuvre en rouvrant les portes du ciel aux hommes. De la croix, il s’adressa à sa Mère douloureuse en tant que “femme” et la proclama la Nouvelle Ève, la Mère de tous les hommes pour qui il est mort afin qu’ils aient la vie ».

Du même Pape Benoît XV : « Tellement, en même temps que son Fils souffrant et mourant, elle souffrit jusqu’à en mourir presque, et Elle a renoncé de telle sorte à ses droits maternels sur son Fils, pour le salut des hommes en L’immolant, autant qu’il dépendait d’Elle, pour apaiser la justice de Dieu, que l’on peut dire à juste titre qu’Elle a racheté le genre humain conjointement au Christ » (lettre apostolique Inter sodalicia, 22 mars 1918).

Pie XII

Plus tard, Pie XII en a parlé à plusieurs reprises. Dans un discours aux pèlerins de Gênes du 22 avril 1940, il disait : « En effet, Jésus et Marie ne sont-ils pas les deux amours sublimes du peuple chrétien, le nouvel Adam et la nouvelle Ève que l’Arbre de la Croix a uni dans la douleur et l’amour pour racheter le péché de nos premiers parents dans le jardin d’Éden ? ». Et dans son encyclique Mystici Corporis du 29 juin 1943, Pie XII décrit Marie « comme une nouvelle Ève » ; dans sa constitution apostolique Munificentissimus Deus du 1er novembre 1950, par laquelle il définit solennellement le dogme de l’Assomption de Marie au Ciel, Pie XII reprenait ce thème : « Nous devons nous rappeler d’une manière particulière que dès le IIe siècle, les saints Pères ont désigné la Vierge Marie comme la nouvelle Ève qui, bien que soumise au nouvel Adam, est intimement associée à lui dans cette lutte contre l’Ennemi infernal et qui, comme l’avait annoncé le Protévangile, a eu comme résultat final la victoire totale sur le péché et la mort, qui sont toujours mentionnés ensemble dans les écrits de l’Apôtre des Gentils ». La Vierge, dit Pie XII, est « intimement associée à son Fils dans ce combat contre l’Ennemi infernal, ce qui… aura comme résultat final la victoire totale sur le péché et la mort ». Ainsi pour Pie XII, Jésus est le seul Rédempteur, mais Marie, subordonnée, apparaît « intimement associée à Lui » dans l’œuvre de la Rédemption.

Paul VI

Parmi les Papes conciliaires, Paul VI suggère la même chose dans sa Professio Fidei ou « Credo du Peuple de Dieu », en 1968 : « Unie par un lien indissoluble au mystère de l’Incarnation et de la Rédemption, la Bienheureuse Vierge Marie, l’Immaculée, ayant achevé le cours de sa vie terrestre, fut portée corps et âme à la gloire du ciel, où elle participe déjà à la gloire de la résurrection de son Fils, anticipant la résurrection des justes ; et Nous croyons que la Très Sainte Mère de Dieu, la Nouvelle Ève, Mère de l’Église, continue au ciel à exercer son office maternel à l’égard des membres du Christ, coopérant pour que les âmes rachetées naissent et grandissent dans la vie divine ».

Benoît XVI

La position de Benoît XVI n’est pas celle d’un refus, mais de la prudence du théologien. Le cardinal Joseph Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, a affirmé : « Ce qui est juste dans cette appellation de Corédemptrice, c’est que le Christ ne reste pas extérieur et forme une nouvelle et profonde communauté avec nous. Tout ce qui est à lui sera nôtre et tout ce qui est nôtre, il l’a fait sien. Ce grand échange est le contenu spécifique de la rédemption, notre libération et notre accès à la communion avec Dieu. Parce que Marie anticipe l’Église comme telle, qu’elle est l’Église en personne, cet “être-avec” est réalisé en elle de façon exemplaire. Mais cet “avec” ne doit pas faire oublier le “d’abord” du Christ. Tout vient de lui, comme le soulignent les épîtres aux Éphésiens et aux Colossiens. Marie aussi est tout ce qu’elle est par lui. Le terme de “Corédemptrice” obscurcirait cette donnée originelle. Une bonne intention s’exprime dans un mauvais vocable. Dans le domaine de la foi, la continuité avec la langue de l’Écriture et des Pères est essentielle. La langue n’est pas manipulable à volonté ».

Lorsqu’il est devenu le Pape Benoît XVI, il a su accueillir avec bonté et paternité l’initiative suivante : la demande en faveur du cinquième dogme marial “Marie Co-rédemptrice” fut présentée au Saint-Père par le cardinal Télesphore Toppo en 2006.

En effet, du 3 au 7 mai 2005, nombre de cardinaux, archevêques et évêques du monde entier se sont rassemblés à Fatima, au Portugal, pour un symposium, sur Marie Co-rédemptrice. À la fin de ce symposium, les cardinaux et évêques présents conclurent unanimement pour la soumission et la signature d’une nouvelle pétition (ou Votum) à Sa Sainteté le pape Benoît XVI, en vue d’une définition dogmatique solennelle de Notre-Dame, comme la Mère spirituelle de tous les peuples, sous ses trois aspects de Co-rédemptrice, Médiatrice de toutes grâces et Avocate. Voici le Témoignage du Cardinal Toppo, co-président du symposium de Fatima :

« Le samedi 3 juin 2006, j’ai eu de privilège d’avoir une audience privée avec Sa Sainteté le pape Benoît XVI. En demandant cette audience, mon intention première était de présenter au Saint-Père les Acta des exposés théologiques du symposium de Fatima 2005 sur la co-rédemption de Marie, ainsi que le votum écrit en latin et signé par un nombre significatif de cardinaux et d’évêques qui requièrent la solennelle définition papale de Notre-Dame comme Mère spirituelle de tous les peuples, co-rédemptrice, Médiatrice de toutes grâces, et Avocate.

Durant nos 15 minutes d’audience, le Saint-Père a reçu le Votum et les Acta avec un vif intérêt. Il fut surpris que tant de cardinaux et d’évêques aient signé le Votum. Il examina alors brièvement le texte des Acta et dit qu’il voulait lire les Acta avant de les transmettre à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi pour examen, comme le prévoit le protocole ».

Jean-Paul II

« Le rôle corédempteur de Marie n’a pas cessé avec la glorification de son Fils. » (Jean-Paul II, homélie du 31 janvier 1985).

« Marie, conçue et née sans la souillure du péché, a participé de façon admirable aux souffrances de son divin Fils, pour être Corédemptrice de l’humanité. » Jean-Paul II, audience générale du 8 septembre 1982

L’approfondissement du Magistère pontifical concernant la doctrine concernant la médiation maternelle de la Vierge Marie a connu un aboutissement dans l’enseignement de Jean-Paul II, dont le blason portait le signe très explicite du « M » au pied de la croix avec la devise « Totus Tuus », inspirés de l’apôtre de la Vierge Marie saint Louis-Marie Grignion de Montfort, qu’il voulait proclamer Docteur de l’Église.

A ce sujet, le Père Jean-Michel Garrigues, OP 2, a mis en lumière la question du « Développement en cours du dogme marial » (Nova et Vetera 73 – 1998/3), p. 35-51) dans son œuvre mariologique (cf. notamment L’Epouse du Dieu vivant, Marie plénitude trinitaire de l’Eglise, Paris, Parole et Silence, 2000). Voici ce qu’il affirme en substance : la lecture de la catéchèse mariale de Jean-Paul II permet de comprendre comment les limites placées par le Concile Vatican II, qui à l’époque avaient été ressenties comme minimalistes par certains courants de dévotion mariale, ne constituent pas des barrières bloquant un développement dogmatique ultérieur, mais bien des « garde-fous » qui ont permis à celui-ci de se poursuivre dans le sens d’une explicitation véritable du donné révélé. Dégagé par le Concile des ambiguïtés sémantiques du terme de « corédemption », Jean-Paul II a pu expliciter, dans le cycle de soixante-dix catéchèses du Mercredi consacrée à la Vierge Marie entre le 6 septembre 1995 et le 12 novembre 1997, et dans son encyclique Redemptoris Mater du 25 mars 1987, l’une des facettes de « l’association selon un mode absolument singulier » (Lumen Gentium n. 6) de la Vierge Marie à l’œuvre du Rédempteur.

Marie, “coopératrice singulière” du Rédempteur

On peut dire que la catéchèse de Jean Paul II montre dans cette « coopération singulière » la clé de voûte du rôle de Marie dans l’économie du salut, la finalité même de sa vocation surnaturelle impliquée dans sa maternité divine. L’association de Marie au sacrifice du Christ, qui fait d’elle, comme « nouvelle Ève », la mère des rachetés, apparaît désormais de manière saisissante dans la catéchèse du pape Jean-Paul II comme l’accomplissement parfait de son fiat (Lc l, 38) à l’Annonciation. Par rapport à son acte suprême dans l’œuvre de la Rédemption, l’Immaculée Conception de Marie constitue la disposition et son Assomption la conséquence les plus adéquates dans l’ordre de la convenance propre à la «connexion des mystères ».

Dans sa catéchèse du mercredi 9 Avril 1997, le pape exprime avec une telle précision doctrinale la « coopération de Marie à l’œuvre du salut » par « son association au sacrifice rédempteur du Christ », qu’on le sent tout proche de ce qui pourrait être une formulation dogmatiquement définissable. Après avoir pris appui sur la Tradition en rappelant que «déjà saint Augustin attribue à la Vierge le qualificatif de «coopératrice», titre qui souligne l’action conjointe et subordonnée de Marie au Christ rédempteur», Jean-Paul II assume la doctrine conciliaire en maintenant que « l’enseignement de l’Église souligne clairement la différence entre la Mère et le Fils dans l’œuvre du salut, montrant la subordination de la Vierge, en tant que coopératrice, à l’unique Rédempteur ».

Cela situe d’emblée la coopération de Marie à la Rédemption du côté des hommes rachetés, coopération à propos de laquelle l’apôtre Paul affirme : « Nous sommes les collaborateurs de Dieu » (l Co 3, 9) et soutient la possibilité pour l’homme de coopérer avec Dieu. Le pape se fait ainsi l’écho du Concile Vatican II qui déclare que « l’unique médiation du Rédempteur n’exclut pas, mais suscite au contraire une coopération variée de la part des créatures, en dépendance de l’unique source » (Lumen Gentium n. 62).

Après avoir situé la coopération de Marie dans le cadre général de la coopération que tous les hommes rachetés peuvent apporter à leur Rédempteur, Jean Paul II exprime ensuite, dans cette même catéchèse « le mode absolument singulier » (Lumen Gentium n. 61), que cette coopération acquiert dans la personne de Marie.

« Appliqué à Marie, [dit le pape], le terme de « coopératrice » prend cependant une signification spécifique. La collaboration des chrétiens au salut se réalise après l’événement du Calvaire, dont ils s’efforcent de répandre les fruits par la prière et le sacrifice. Au contraire le concours de Marie s’est réalisé au cours de l’événement même et à titre de Mère ; il s’étend donc à la totalité de l’œuvre salvifique du Christ. C’est elle seule qui fut associée de cette manière à l’offrande rédemptrice qui a mérité le salut de tous les hommes. En union avec le Christ et soumise à lui, elle a collaboré pour obtenir la grâce du salut à toute l’humanité ».

Dans ces phrases d’une portée décisive, le magistère ordinaire du pape ne peut pas ne pas être engagé dans un enseignement proprement doctrinal sur un mystère aussi central que celui de la Rédemption. En s’appuyant sur des emprunts à d’autres passages de la catéchèse pontificale, qui rattachent selon la « connexion des mystères » cette vérité aux dogmes déjà définis de l’Immaculée Conception et de l’Assomption de Marie, le Père Garrigues, théologien, voit se dégager une conclusion théologique très riche que l’on peut tenter d’articuler autour des trois points suivants :

Ayant été elle-même parfaitement sauvée, dès sa conception immaculée, par la « plénitude de grâce» (Lc 1, 28) qui lui venait déjà de la mort de son Fils, pour donner au Père son « fiat » (Lc 1, 38), devenir par l’Esprit Saint la Mère du Fils de Dieu et être conduite jusqu’au pied de la Croix,
la Vierge Marie, comme « Femme » (Jn 2, 4-1 19, 26) choisie par Dieu pour être la Nouvelle Ève, est la seule personne humaine à avoir été associée par Lui à l’acte même du sacrifice du Calvaire, en donnant au Père, dans sa compassion avec son Fils, la parfaite réponse de foi et d’amour de l’humanité rachetée unie à l’unique offrande du Rédempteur qui obtenait la grâce du salut pour tous.
Devenue ainsi « Mère » (Jn 19, 27) selon l’Esprit pour tous les rachetés et élevée par Dieu dans son âme et dans son corps à la gloire de son Fils ressuscité, elle est la seule dans le Corps Mystique du Christ à être associée, en intercédant pour tous les hommes, à la dispensation universelle de la « plénitude de grâce » (Jn 1, 14.16), qui vient du « seul Médiateur entre Dieu et les hommes » (1 Tm 2, 5), car elle en a été « comblée » (Lc 1, 28) en premier pour tous ses enfants.
Le développement dogmatique en cours

Selon le Père Garrigues, le développement articule ensemble les trois dimensions essentielles du rôle de Marie dans le dessein du salut :

son Immaculée Conception,
sa Coopération unique à l’acte même du sacrifice rédempteur,
enfin son Assomption dans la gloire du ciel et son association à la dispensation de toutes les grâces dans sa Maternité Spirituelle s’exprimant en intercession pour chacun des rachetés.
Notre-Dame de Tous les Peuples : Amsterdam (1945-1959)

En conclusion, la Vierge Marie elle-même a exprimé sa volonté au cours des apparitions qui ont eu lieu à Amsterdam. Le 25 mars 1945, jour de la fête de l’Annonciation, la Vierge Marie apparaît à Ida Peerdeman (1905-1996), hollandaise habitant à Amsterdam. C’est la première des 56 apparitions qui vont se succéder entre 1945 et 1959. Le 31 mai 2002, Mgr Joseph Maria Punt, évêque de Haarlem-Amsterdam, reconnaît comme authentiques et dignes de foi les messages et les apparitions de la « Dame de Tous les Peuples » à Amsterdam.

La Vierge Marie a indiqué qu’elle voulait être connue et aimée de tous les hommes et qu’on la reconnaisse comme “La Dame de tous les Peuples” ou “Mère de tous les Peuples”. Cette action est demandée en préparation d’un dogme, le dernier, le plus grand et le plus important (15 août 1951), réclamé plusieurs fois (15 novembre 1951 notamment), qui doit être le « couronnement de la Mère du Seigneur Jésus-Christ, Corédemptrice, Médiatrice et Avocate » (11 octobre 1953). C’est la première fois dans l’histoire mariale que la Vierge Marie demande un dogme. Elle s’adresse pour cela au Pape et aux théologiens en spécifiant qu’elle « n’apporte pas de nouvelle doctrine. C’est bien les anciennes notions que j’apporte » (4 avril 1954) et en les prévenant que ce dogme de la corédemption de Marie fera l’objet d’un « combat dur et pénible » (5 octobre 1952). Cependant, « quand il (ce dogme) aura été proclamé, la Dame de tous les Peuples donnera la Paix, la vraie Paix au monde » (31 mai 1954).

Notes.

1. « Tonterias » ou « absurdités, sottises, inepties », dans la langue originelle espagnole-argentine, selon le texte officiel – cf. site internet du Vatican ; « chiacchere » en italien : « bavardages inutiles », selon la traduction officielle dans cette langue – cf. site internet du Vatican. Traduction française plus « douce » : « non-sens » selon le journal La Croix ; la traduction française officielle n’a pas encore été publiée sur le site internet du Vatican à ce jour – 16 décembre 2019.

2. Même si les réflexions du Père Garrigues évoquées ici sont antérieures au pontificat actuel, il ne les renierait sans doute pas, mais il s’efforcerait peut-être de situer la déclaration du Pape François dans la continuité de l’enseignement du Magistère pontifical antérieur. Le Père Garrigues s’est prêté à cet exercice périlleux dans son ouvrage Une morale souple mais non sans boussole. Réponse aux doutes des quatre cardinaux à propos d’Amoris laetitia (Le Cerf, 2017) écrit avec le jésuite Alain Thomasset. Il s’agissait de répondre aux doutes des cardinaux Brandmüller, Burke, Caffarra et Meisner sur la compatibilité du chapitre VIII de l’exhortation apostolique Amoris laetitia (AL) de François avec l’exhortation Familiaris consortio et l’encyclique Veritatis splendor de Jean-Paul II. La thèse des auteurs est que les enseignements respectifs des deux papes ne se contredisent que si l’on fait une lecture laxiste de François et rigide de Jean-Paul II. Une interprétation correcte des enseignements en question permettrait au contraire de souligner leur complémentarité, Jean-Paul II insistant doctrinalement sur l’universalité et l’objectivité des normes morales et François prenant pastoralement en considération « la dimension singulière de la décision personnelle »

Revue-Item.com

 

 

partager cette page

bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark