La Revue Item - « La Tradition sans peur »
Suivez les activités de l'Abbé Aulagnier
Entraide et Tradition

Sermon en l’honneur de Mgr Marcel Lefebvre

publié dans couvent saint-paul le 26 mars 2011


Le 3ème dimanche de Carême

Sermon en l’honneur de Mgr Marcel Lefbvre

MBCF.

Mgr Lefebvre est essentiellement évêque. Il fut un grand évêque. A lui, comme à tout évêque, lui fut confié « l’Evangile » (1 Tim 1 11), « sa prédication » comme le dit saint Paul aux Corinthiens : « Ce n’est pas pour baptiser que le Christ m’a envoyé, c’est pour prêcher l’Evangile… ». Or l’objet de la prédication de l’Evangile n’est pas un objet social, politique comme si les Apôtres avaient été envoyés pour l’instauration d’un ordre social et politique, voire même l’instauration du bien-être en ce monde, ce qui serait anachronique au sermon sur la Montagne… Non ! L’objet de la prédication de l’Evangile c’est « le Christ et le Christ crucifié » contemplé et adoré comme Principe unique de salut. « Nous, nous prêchons le Christ crucifié » (1 Cor 1 17 23), nous dit saint Paul. Il insiste : « C’est une parole certaine et digne de toute créance, que Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs, dont je suis le premier (moi qui étais auparavant blasphémateur, persécuteur, homme de violence)… Mais j’ai obtenu miséricorde précisément afin que Jésus-Christ fit voir en moi le premier, toute sa longanimité, pour que je servisse d’exemple à ceux qui, à l’avenir, croiront en lui pour avoir la vie éternelle » (1 Tim 1 16). La vie éternelle ! C’est pourquoi, pour Saint Paul comme pour Mgr Lefebvre, le Christ « est en nous l’espérance de la gloire », l’espérance de la vie éternelle. Il faut, de toute nécessité, lui être uni par le Baptême et par la Foi pour connaître la Béatitude éternelle. Sous ce rapport (du salut) Jésus-Christ est tout.
Voilà la prédication essentielle de tous les Apôtres, de tous les Evêques.
Voilà l’Evangile.
Ce fut l’objet des premières prédications de saint Pierre. Une prédication claire et nette, énergique que d’aucuns diraient imprudente selon la chair. Il ne craignit pas de déranger les Juifs et leur religion hébraïque. Il ne tut pas le nom du Christ dans leurs assemblées. Non ! Le premier objet de sa prédication, de sa première prédication fut « Jésus de Nazareth », fut la confession de sa « filiation divine », fut la confession de sa « crucifixion » : « Lui… que vous avez fait mourir en le crucifiant par la main des impies ». Mais sans cette crucifixion, vain est notre salut. Le premier objet de sa première prédication fut la confession de sa « résurrection d’entre les morts » : « Dieu L’a ressuscité, déliant les liens de la mort, parce qu’il n’était pas possible qu’elle Le tînt en son pouvoir », étant Dieu lui-même. Sans cette Résurrection, vaine est notre foi.
Il en est de même pour la seconde prédication publique au Temple de Jérusalem. Avec saint Jean, Pierre monte au Temple pour prier à la neuvième heure. Pierre est interpellé par un boiteux. Il le guérit au nom de Christ. Avec ces paroles merveilleuses : « Je n’ai rien… Mais ce que j’ai, je te le donne : « Au nom de Jésus-Christ, lève-toi». Il le prit par la main et il se leva. Je n’ai rien, ce que j’ai, je te le donne : « Au nom de Jésus-Christ lève-toi ». Le Christ ! Voilà toute la richesse de Pierre. Et il le confessa de nouveau dans la prédication qui fit suite à ce miracle opéré au nom de Christ.
Après avoir en effet opérés ce miracle au nom du Christ qui est tout, qui est « le Béni de Dieu », Pierre et Jean sont interpellés par les grands-prêtres ; mis en prison, ils reçoivent l’ordre de ne plus prêcher au nom du Christ, « Alors Pierre, rempli du Saint-Esprit, leur dit : … C’est par le nom de Jésus-Christ de Nazareth que vous avez crucifié, que Dieu a ressuscité des morts, c’est par Lui que cet homme est présent devant vous en pleine santé. C’est Lui, la pierre rejetée par vous les constructeurs, qui est devenue tête d’angle. Et le salut n’est en aucun autre, car il n’est sous le ciel aucun autre nom donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés » (Act 4 8-12).
Voilà la foi de Pierre sur le Christ. Le Christ est la « pierre angulaire » c’est-à-dire « la pierre qui tient tout », « qui tient tout l’édifice ». Le Christ, en cet édifice, est le salut, le Sauveur, le seul Sauveur.
Voilà aussi la foi de Mgr Lefebvre. Qu’a-t-il pris comme devise de son épiscopat sinon cette phrase de saint Jean : « Credidimus caritatis ». Mais comment se manifesta cette charité de Dieu, précisément dans le salut et l’envoi du Fils de Dieu pour le réaliser dans sa chair, dans sa Passion ? C’est ce que dit saint Jean dans son Evangile : « Dieu a tellement aimé le monde qu’Il envoya son Fils bien-aimé, son Monogène, afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas mais ait la Vie éternelle » (Jn 3 16).
La finalité de l’Incarnation rédemptrice, c’est la vie éternelle, le salut, manifestation de charité. La cause efficiente du salut, c’est la charité de Dieu manifestée dans le Christ. La cause finale de l’Incarnation, c’est encore la charité possédée, la vie éternelle, la vision de gloire. Tout, en matière de salut, en matière de rédemption, de sainteté se récapitule dans le Christ Jésus, c’est pourquoi saint Paul pouvait dire : « Omnia instaurare in Christo ».
Voilà la Foi de Mgr Lefebvre. Il y conforma toute sa vie épiscopale. Il éleva son épiscopat à ce niveau. Il fut consacré évêque pour prêcher cela et rien d’autre. Voilà la haute idée que Mgr Lefebvre eut de son épiscopat, de sa mission épiscopale.
Il n’a pas eu seulement le sens de sa dignité épiscopale qu’il porta toujours avec simplicité et grande noblesse s’appliquant à suivre les conseils que saint Paul donnait à Timothée : L’évêque doit avoir le « sens rassis », il doit être « circonspect » « capable d’enseigner », « il ne doit pas s’adonner au vin, ni violent, mais doux, pacifique, désintéressé, gouvernant bien sa propre maison, il faut encore qu’il jouisse de la considération de ceux du dehors » (1 Tim 3 2-7)… telle fut l’attitude de Mgr Lefebvre dans sa vie épiscopale. J’en suis le témoin parmi beaucoup d’autres.
Mais au-delà de ses qualités personnelles d’évêque – il était, il faut le dire, agréable de l’approcher -, il a surtout eu le sens de ses obligations, de ses devoirs épiscopaux. Il nous en a donnés de nombreux témoignages.
Souvenez-vous de son discours de Lille en juillet 1976 : Il vient d’être frappé d’une suspens, la « suspens a divinis », il démontre en quoi elle est illégale, en quoi elle est un abus de pouvoir et donc nulle, elle ne l’oblige pas en conscience et il conclut son sermon par ces mots pathétiques : « Je pense, en toute sincérité, en toute paix, en toute sérénité, que je ne puis pas contribuer par l’obéissance à cette suspense, par ces peines dont je suis frappé, par la fermeture de mes séminaires, par le refus de faire des ordinations, à la destruction de l’Eglise catholique. Je veux qu’à l’heure de ma mort, lorsque Notre-Seigneur me demandera : « Qu’as-tu fait de ta grâce épiscopale et sacerdotale ? » je ne puisse pas entendre de la bouche du Seigneur : « Tu as contribué à détruire l’Eglise avec les autres » (p. 72). Et cette grâce épiscopale l’obligea à rester fidèle à Notre-Seigneur Jésus-Christ qui est la Vérité. « On nous dit, poursuit-il, vous jugez le Pape. Mais où est le critère de la vérité ? Mgr Benelli m’a jeté à la figure : « Ce n’est pas vous qui faites la vérité ». Bien sûr, ce n’est pas moi qui fais la vérité, mais ce n’est pas le pape non plus ! La vérité, c’est Notre-Seigneur Jésus-Christ (NSJC) et donc il faut nous reporter à ce que NSJC nous a enseigné, à ce que les Pères de l’Eglise et toute l’Eglise nous ont enseigné pour savoir où est la vérité. Ce n’est pas moi qui juge le Saint-Père. C’est la Tradition. Un enfant de cinq ans avec son catéchisme peut très bien répondre à son évêque. Si son évêque venait à lui dire : « NSJC n’est pas présent dans la Sainte Eucharistie. C’est moi qui suis le témoin de la vérité et je te dis que NSJC n’est pas présent dans la Sainte Eucharistie », eh bien, cet enfant, malgré ses cinq ans, a son catéchisme, il répond : « Mais mon catéchisme dit le contraire ». Qui a raison ? L’évêque ou le catéchisme ? Le catéchisme évidemment qui représente la foi de toujours et c’est simple, c’est enfantin comme raisonnement. Mais nous en sommes-là » (pp. 77-78).
Vous voyez, pour Mgr Lefebvre, « la Vérité, c’est le Christ ». Et cette vérité, le Christ l’a enseignée à ses Apôtres et par eux, à l’Eglise. La Vérité du Christ c’est la Tradition. Et la mission de l’Evêque, c’est de la garder dans son intégrité pour la transmettre fidèlement. Voilà ce que fut son épiscopat. Que demande-t-on à un ministre, « qu’il soit trouvé fidèle », dira saint Paul. Fidélité à sa mission ! Ce sont presque les dernières paroles de Mgr Lefebvre prononcées lors du sermon des Sacres, le 30 juin 1988, nous n’étions qu’à trois ans de son décès : « Cette vie de Notre-Seigneur, dont nous avons besoin pour aller au ciel – vous voyez, nouvelle insistance de Mgr Lefebvre sur le Christ, c’est vraiment le souci de son épiscopat -, elle est en train de disparaître partout dans cette église conciliaire parce qu’elle suit les chemins qui ne sont pas les chemins catholiques. Loin de moi, loin de moi de m’ériger en Pape ! Je ne suis qu’un évêque catholique, qui continue à transmettre, à transmettre la doctrine. « Tradidi quod et accepi » (J’ai transmis ce que j’ai reçu), c’est ce que je pense… C’est ce que je souhaiterais que l’on mette sur ma tombe et le moment ne tardera sans doute pas. Que l’on mette sur ma tombe : Tradidi quod et accepi, ce que dit saint Paul. Je vous ai transmis ce que j’ai reçu, tout simplement. Je suis le facteur qui porte une lettre. Ce n’est pas moi qui l’ai faite cette lettre, ce message, cette parole de Dieu, c’est Dieu Lui-même, c’est NSJC, et nous vous l’avons transmise – voilà de nouveau affirmé la fonction de l’Evêque : transmettre la doctrine du Christ, sur le Christ -, par l’intermédiaire de ces chers prêtres qui sont ici présents et par tous ceux qui, eux-mêmes, ont cru devoir résister à cette vague d’apostasie dans l’Eglise, en gardant la foi de toujours et en la transmettant aux fidèles. Nous ne sommes que des porteurs de cette nouvelle, de cet Evangile que NSJC nous a donné, nous vous transmettons les moyens de sanctification, la vraie et sainte Messe, les vrais sacrements qui donnent la vie spirituelle ». Je crois que l’on ne peut pas exprimer en termes plus simples, le rôle de l’Evêque, transmettre le Christ, sa doctrine, et tous les moyens de salut, ses sacrements qu’Il remit aux Apôtres et par les Apôtres à l’Eglise apostolique.
Et c’est pourquoi, durant les dernières années de son épiscopat, en raison de cette crise moderniste post-conciliaire, Mgr Lefebvre n’a cessé de réclamer entre autres choses au Saint-Père qu’il nous redonne, outre le droit public de l’Eglise, j’y reviendrai –, « la Bible catholique, la Vulgate et non une Bible œcuménique, la vraie Messe et enfin le catéchisme… « Rendez-nous la vraie Bible, telle qu’était la Vulgate autrefois, qui a été tant de fois consacrée par les Conciles et par les papes… Enfin, rendez-nous notre catéchisme suivant le modèle du Catéchisme du Concile de Trente, car, sans un catéchisme précis, que seront nos enfants demain, que seront les générations futures ? Elles ne connaîtront plus la foi catholique, et nous le constatons déjà aujourd’hui » (p. 72).
Vraiment transmettre la foi, la doctrine de NSJC, transmettre NSJC et ses moyens de salut, voilà ce que fut le souci de l’épiscopat de Mgr Lefebvre. Il l’exprima très clairement aussi dans son petit ouvrage « Itinéraire spirituel ». Il a des pages sublimes sur le Christ Jésus. C’est l’objet de son chapitre 6. NSJC doit être, comme le dit saint Paul, « notre vie » et qu’à ce titre, nous devons « être toujours plus chrétiens ». Il écrit : « Si l’on pense et croit que ce mystère de l’Incarnation est pour le mystère de la Rédemption, alors il va de soi que sans Jésus-Christ, il n’y a pas de salut possible ». Il en déduit que « tout acte, toute pensée qui ne sont pas chrétiens sont sans valeur salvifique, sans mérite pour le salut » (p. 46) et c’est pourquoi, écrit-il, « l’avenir (d’un chacun) pour l’éternité dépendra désormais de (sa) relation avec Jésus-Christ, qu’il en soit conscient ou non, qu’il le veuille ou non » (p. 47). Et c’est là que se fonde le zèle missionnaire de Mgr Lefebvre et de tout prêtre. C’est très beau.

Revue-Item.com

 

 

partager cette page

bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark bookmark