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Entraide et Tradition

les hymnes de la fête de la Maternité divine de Notre Dame (3)

publié dans la doctrine catholique le 6 octobre 2016


C- L’Hymne des Laudes

Première strophe :

Te, Mater alma Numinis, Oramus omnes supllices, A fraude nos ut daemonis Tua sub umbra protegas

C’est vous, féconde Mère de Dieu, que nous prions tous humblement : contre les ruses du démon, sous votre ombre, protegez-nous »

Nous retrouvons de nouveau une belle définition de la maternité divine  de Notre Dame: « Mater alma Numinis », expression qui est ici traduite par « féconde Mère de Dieu ». « Numinis », c’est la divinité. Et « Alma » est traduit par « féconde ». Mais nous pourrions aussi bien traduire, et peut-être mieux, par « vénérable », voire même « sainte ». Nous avons déjà trouvé ce mot dans une précédente hymne. « Alma Dei Mater » Et nous avions eu comme traduction « douce Mère de Dieu». Nous avions fait remarquer que « almus » veut dire aussi « nourricier, nourrissant » et nous disions que rien n’est plus doux qu’une Mère nourrissant son enfant.

Quoi qu’il en soit de ces traductions, l’auteur insiste de nouveau sur la maternité de Notre Dame. Cette maternité divine, les Pères et docteurs de l’Eglise ont aimé la chanter. Citons les belles paroles de saint Léon le Grand que l’on trouve au bréviaire romain au deuxième nocturne de cette fête de la Maternité: « Jésus Christ, notre Seigneur, descend de son trône du ciel pour pénétrer notre misère, sans pourtant quitter la gloire de son Père, en des conditions tout à fait nouvelles et d’une manière inusitée. Dans des conditions nouvelles, puisque invisible en soi, il se rend visible à nous, incompréhensible, il accepte d’être appréhendé, éternel, il commence à exister dans le temps. — D’une manière inusitée, puisque conçu et né d’une vierge sans la participation d’un homme et sans que soit faite injure à l’intégrité de sa mère. Une telle naissance convenait en effet au futur Sauveur des hommes qui, tout en revêtant la substance de la nature humaine, ignorerait les souillures de la chair. Il serait différent de nous par l’origine, mais semblable par la nature. Nous le croyons, cette naissance fut en dehors du cours normal de la génération humaine, mais elle s’appuya sur la puissance de Dieu, puisque la virginité de la mère demeura intacte dans la conception, l’enfantement et la suite des temps.

 

Cette maternité divine est vraiment le grand privilège de Notre Dame. C’est ce privilège qui la fait grande aux yeux de l’univers et qui nous fait implorer, à juste titre, sa protection : « nous vous prions tous humblement », « Oramus omnes supllices ». Il faudrait traduire : » nous vous prions tous suppliants ». Il ne faudrait pas oublier le « supplices ». Ce mot « supplicium » vient du verbe « supplicare » qui veut dire « supplier», « prier les dieux ». « Orare » « supplicare » sont des verbes à la même définition. « Supplicare » intensifie même la prière. A l’égard de Marie, nous ne la prions pas seulement, nous la supplions. « Qu’elle nous protège, sous son ombre contre les ruses du démon». Tel est l’objet de notre prière suppliante.

Deuxième strophe :

Ob perditum nostrum genus Primi parentis crimine, ad inclytum martris decus Te Rex supremus extulit.

Pour notre race, perdue par la faute du premier Père, le Roi suprême vous a élevé à la gloire incomparable de Mère

On ne peut exprimer plus clairement que la finalité de cette Maternité Divine, c’est la Rédemption de la race humaine « perdue par la faute du premier Père », Adam. Et là, je pense à ce magnifique passage de saint Bernard de Clairvaux commentant la scène de l’Annonciation. Il parle au nom de tous les représentants de cette race « perdue » en Adam attendant avec anxiété la réponse de Marie à la parole de l’Ange.

« Tu as appris, Vierge, l’événement et aussi la manière dont il doit s’accomplir: double merveille et double joie. …Et puisque ce que tu viens d’entendre fut pour toi joie et allégresse, à nous maintenant d’entendre de ta bouche l’heureuse réponse que nous désirons, pour que tressaillent enfin de joie nos corps humiliés (Ps 50, 10). Tu as appris, dis-je, l’événement et tu as cru, crois aussi la manière dont il s’accomplira. Tu as entendu : tu concevras et enfanteras un fils ; tu as entendu : ce n’est pas d’un homme, mais de l’Esprit Saint. L’ange attend la réponse, il est temps pour lui de retourner vers Dieu qui l’a envoyé.

Nous attendons, nous aussi, ô Souveraine, une parole de pitié, nous misérables, écrasés par une sentence de damnation ! Voici qu’on vient t’offrir la rançon de notre délivrance, nous serons libérés tout de suite, si tu acceptes. Dans la Parole éternelle, Verbe de Dieu, nous avons été créés tous, et nous voilà condamnés à mort ; dans ta brève réponse se trouve le remède qui doit nous ramener à la vie.

Cette réponse, ô bonne Vierge, Adam, pitoyable exilé du paradis avec sa postérité de misère, la réclame de toi; Abraham, David t’en supplient, tous les autres saints ancêtres sollicitent cette réponse ; tes pères par conséquent. qui eux aussi habitent le sombre pays de la mort ; le monde entier dans l’attente se tient prosterné à tes genoux. Et ce n’est pas sans raison, puisque du mot que ta bouche va prononcer dépendent la consolation des malheureux, le rachat des captifs, la libération des condamnés, en un mot : le salut de l’universelle filiation d’Adam, c’est-à-dire le salut de toute ta propre race.

Donne ta réponse, ô Vierge, hâte-toi, ô Souveraine, donne cette réponse que la terre, que les enfers, que les cieux aussi attendent. Le Roi lui-même, Seigneur de tous, est en suspens. Autant il a convoité ta beauté, autant il désire à cette heure le oui de ta réponse, ce oui par lequel il a résolu de sauver le monde. Tu lui as plu par ton silence, tu lui plairas bien davantage maintenant par ta parole. Écoute-le : il te crie du haut du ciel : « O belle entre toutes les femmes, fais-moi entendre ta voix ! » Si tu lui fais entendre ta voix, il te fera, lui, contempler notre libération.

N’est-ce pas ce que tu cherchais en gémissant, ce vers quoi tu soupirais nuit et jour dans tes prières? Eh bien ! c’est toi à qui cette promesse fut faite, ou devons-nous en attendre une autre ? C’est toi, dis-je, la femme promise, attendue, désirée, toi enfin, en qui ton saint ancêtre Jacob, proche déjà de la mort, espérait la vie éternelle quand il disait: J’attendrai de toi ma délivrance, Seigneur ! (Gen 49, 18). C’est toi en qui et par qui Dieu lui-même, notre Roi, a depuis toujours préparé l’œuvre du salut au milieu du monde. Pourquoi espères-tu d’une autre femme ce qu’on vient t’offrir Pourquoi attends-tu d’une autre ce qui va bientôt se réaliser par toi, pourvu que tu donnes ton consentement, que tu répondes cette parole ?

Réponds donc vite à l’ange ! que dis-je ? réponds par l’ange au Seigneur. Réponds une parole et reçois la Parole. Profère la tienne et reçois la divine : émets une parole éphémère et embrasse l’éternelle ! Pourquoi tarder? Pourquoi trembler’? Crois, parle et reçois ! Que l’humilité s’arme d’audace et la timidité d’assurance ! Il ne convient plus à présent que la modestie virginale renonce à la prudence. En cette conjoncture unique, prudente Vierge, ne redoute pas de te montrer présomptueuse, car si la modestie est agréable dans son silence, une parole de charité est en ce moment beaucoup plus nécessaire. Ouvre ton cœur, Vierge bienheureuse, ouvre-le à la foi, ouvre tes lèvres à l’acceptation, ouvre ton sein au Créateur. Voici le Désiré de toutes les nations qui frappe à la porte. Ah ! si pendant que tu tardes il allait passer son chemin et que tu doives dans les larmes courir à la recherche de l’ami de ton âme ! Lève-toi, cours, ouvre ! lève-toi par la foi, cours par la ferveur, ouvre-lui par ton consentement. » (Super Missus est §8)

 

On ne peut rien méditer de plus beau ! Ces paroles sont vraiment « ad hoc » pour commenter cette strophe : « Pour notre race, perdue par la faute du premier père, le Roi suprême vous a élevé à la gloire incomparable de Mère »

Troisième strophe

« Clementer ergo prospice Lapsis Adami posteris : A te rogatus Filius deponat iram vindicem.»

«Regardez donc avec bonté les descendants déchus d’Adam ; que votre Fils, prié par vous, apaise son couroux vengeur »

Cette strophe est également tout à fait dans l’esprit de la supplique de saint Bernard que nous venons de citer plus haut. Elle la prolonge merveilleusement. On pourrait même dire qu’elle fut écrite par lui. Le drame théologal exprimé est le même ! Tout dépend, dans cette délivrance, de la réponse de Marie ! Aussi notre auteur s’exprime avec véhémence, comme la prière de saint Bernard : « regardez donc avec bonté les descendants déchus d’Adam ». Vous admirerez, le mot « clementer » et sa position dans la phrase. C’est tout à fait remarquable. On ne peut pas ne pas penser au Canon Romain qui, dans sa première prière, s’adresse au Père en ces termes : « Te igitur, Clementissime Pater, per Jesum Christum Filium tuum Dominum nostrum, supplices… ».

On remarquera également le vocabulaire particulièrement expressif de cette strophe. Dieu est défini comme « clemens », c’est-à-dire, « doux, bienveillant, bon, indulgent ». Ce sont les « notes » de sa charité. Il s’est révélé tel en son Fils Jésus qui nous a fait connaître le Père. « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur ». La postérité d’Adam est présentée comme « lapsus » : « lapsis Adami posteris ». « Lapsi» vient du verbe « labi », son participe passé est « lapsus est » et ce verbe veut dire : « glisser, tomber en glissant », « tomber dans un état mauvais », on le traduira même par « se tromper », mot qui a donné le mot français : « lapsus ». Ce mot est vraiment une belle description de la chute originelle.

«  que votre Fils, prié par vous, apaise son couroux vengeur » : « iram », « vindicem ». Les mots « ira » et « vindex -cis » sont très forts pour exprimer la « colère de Dieu ». Ils sont équivalent et renforce donc l’intensité de la colère. « Son couroux vengeur », c’est bien traduit. Ainsi est la justice de Dieu. Le péché originel a provoqué sa justice, sa colère. On n’aime plus ces termes ! Et pourtant, ils sont utilisés dans la liturgie…

 

Conclusion

Jesu tibi sit gloria, Qui natus es de Virgine, Cum Patre et almo Spiritu, In sempiterna saecula. Amen

« Jésus, à vous soit la gloire, qui êtes né de la Vierge, avec le Père et l’Esprit Saint, pour les siècles éternels. Ameen.

 

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