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De la volonté politique pure

De la volonté politique pure

publié dans doctrine politique le 20 février 2010


Nous poursuivons la publication des réflexions de Charles Maurras dans son livre « Mes idées politiques ». C’est la quatrième idées  qu’il intitule : « De la volonté politique pure ». C’est le quatrième  paragraphe de sa préface qu’il a intitulé : « La politique naturelle ».

De la volonté politique pure

On est donc menacé de n’avoir bientôt plus rien dans les tristes pays où les fondements naturels de la politique sont durablement remplacés par ces absurdes inventions d’Étatisme égalitaire et de prétendu Volontarisme populaire, qui, pour être un peu moins folles qu’en Russie, ne peuvent résister longtemps à l’aggravation naturelle du poids de leur insanité.

Nos aïeux, même les moins sages, ne s’étaient rien figuré de tel. Nos neveux, s’ils en réchappent, n’y voudront pas croire. C’était déjà l’avis d’Edgar Poe, il y a cent ans, lorsqu’il écrivait l’admirable « Parabole des chiens de prairie ». Eh ! quoi, fait-il dire à la postérité ahurie, les vieux Américains se gouvernaient eux-mêmes ? Pas possible ! « Ils avaient donc en tête cette idée, la plus drôle du monde, que tous les hommes pouvaient naître libres et égaux ».

Mais cela ne dura que « jusqu’au jour où un individu nommé Mob (ou Popu) établit un despotisme auprès duquel celui d’Elagabal était un paradis. Ce Popu (un étranger soit dit en passant) était, dit-on, le plus odieux de tous les hommes qui aient jamais encombré la terre. Il était insolent, rapace, corrompu. Il avait la stature d’un géant, il avait le cou d’un chameau avec le cœur d’une hyène et la cervelle d’un paon. Il finit par mourir d’un excès de sa propre fureur, qui l’épuisa ».

Rendus contemporains de ces incroyables sottise, gouvernés par ces insolences, ces rapacités, cette corruption, nous sommes même un peu happés par l’animal géant, ce Mob ou ce Popu, sans cœur ni cervelle, appelé à crever de ses colères de dindon… Mais nous sommes aussi dédommagés de cette honte par le spectacle merveilleux de son absurdité, élevée à la perfection.

Des gens qui ont souscrit et fait souscrire un programme dont ils ne peuvent dénier les difficultés profondes, ni les complications inouïes, ont la chance de s’accorder sur la façon de le réaliser.
– Des milliers, et des milliers de voix, auront à dire je veux. Et ce qu’elles auront ainsi voulu sera. Il suffira que ces majorités désignent des exécuteurs : cela sera exécuté.
– Même l’impossible ?
– Surtout l’impossible.
La lune ! On n’a qu’à demander la lune. Des mains dociles iront la cueillit dans le ciel. On en fera descendre, tout semblablement, la Justice et l’Égalité en calligraphiant leurs noms à l’encre rouge sur un papier à tranches d’or. A peine désignés, les pauvres exécuteurs de ces volontés mirifiques sentent pleuvoir tout le contraire des promesses qu’ils ont jurées. Leurs mandants s’en doutent à peine. Mais, peu à peu, les évidences se font jour. Ce qui ne peut pas être refuse d’être. Ce qui doit être, ce que produit l’antécédent qu’on a posé, suit le cours de sa conséquence. On voulait la paix, mais en désarmant : de tous côtés éclatent les fatalités de la guerre, on doit se mettre à réarmer. On annonçait l’abondance : il faut rogner la monnaie. Les salaires ont monté, mais les prix aussi ; il faut que les salaires montent encore : comment monteront-ils Si l’on n’a plus d’argent pour les payer ?

La Démocratie accourt, les yeux bandés, au cimetière

Mais elle y mène, et c’est moins gai.

Comment s’en est-on Si peu douté ! On laisse trop dire et écrire qu’elle est trahie par l’expérience de ses erreurs. Elle est trahie par elle-même. N’eût-elle jamais été mise à l’essai, tout esprit net dut lui refuser tout avenir, comme toute raison, du moment qu’elle s’offrit et se définit. Jeune et distrait, un André Chénier put avoir besoin de voir à l’œuvre les hideux scélérats les bourreaux barbouilleurs de lois ; les Rivarol ont vu tout de suite ce que ce serait : il était idiot de croire qu’un grand peuple pût marcher la tête en bas ; idiot, qu’il fût gouverné par ce qu’il y avait de vain et de vil en lui ; idiot, que les moins directement intéressés à son bien y eussent légalement le plus d’influence par leur nombre, leurs factions, leurs passions.

Toute bonne cervelle de 1789 pouvait voir briller aux purs flambeaux des Droits de l’Homme l’embrasement qu’ils annonçaient et déduire de là, effet proche ou lointain, quelque chose qui devait ressembler au Régicide, aux longues guerres, à Trafalgar, à Leipzig, à Waterloo, à Sedan, à la dépopulation, et la décadence, à tous nos reculs généraux, non sans y distinguer, claire et nette, leur qualité essentielle de produits naturels de I’ démocratie politique.

De même, les bonnes cervelles de 1848 et 1871 n’avaient besoin de vieillir d’un demi-siècle ni d’un siècle : de la démocratie sociale, elles virent sortir, comme le fruit de la fleur, la commune destruction des Capitaux et du Travail qui les engendre ou les reproduit.

La démocratie dans l’État ne pouvait que ruiner l’État. La démocratie dans l’Atelier et dans l’Usine devait ruiner l’Usine et l’Atelier.

Cela était d’autant plus sûr que la démocratie se donnait carrière en une heure de la vie du monde qui lui apportait un moyen facile d’exploiter une tragique confusion.

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