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Entraide et Tradition

Le psaume 117 des Laudes II du Bréviaire romain, du Dimanche

publié dans couvent saint-paul le 13 février 2019


Les psaumes des laudes II

du Bréviaire romain

Tome 3

Psaumes 117

 

C’est un merveilleux psaume. Un psaume d’action de grâce après un insigne bienfait reçu de Dieu. L’auteur n’en précise pas la nature. Mais on peut l’interpréter – ou mieux il faut l’interpréter – comme étant le mystère de l’Incarnation Rédemptrice, mystère où éclatent précisément la miséricorde et la bonté de Dieu et qui est le plus grand des bienfaits. En effet dans plusieurs strophes de ce psaume, le psalmiste fait clairement allusion au Mystère de la Rédemption. Ne seraient-ce que ces strophes : « je vous rendrai grâce de ce que vous vous êtes fait mon salut ». La strophe suivante est encore plus claire : « La pierre rejetée par ceux qui bâtissaient est devenu la pierre angulaire ». « Lapidem quem reprobaverunt aedificantes : hic factus est in caput anguli ». C’est l’expression  même utilisée par  saint Pierre devant le Sanhédrin alors qu’il veut rendre compte non seulement du miracle qu’il avait accompli au nom de Jésus-Christ  entrant au Temple avec saint Jean, mais aussi du mystère de la Rédemption en Jésus-Christ, la vraie « pierre angulaire ». « Le lendemain, leurs chefs, les Anciens et les Scribes, s’assemblèrent à Jérusalem, avec Anne, le grand prêtre, Caïphe, Jean, Alexandre, et tous ceux qui étaient de la famille pontificale. Et ayant fait comparaître les Apôtres devant eux, ils leur demandèrent : «  Par quelle puissance ou au nom de qui avez-vous fait cela ?  » Alors Pierre, rempli du Saint-Esprit, leur dit :  » Chefs du peuple et Anciens d’Israël : si l’on nous interroge aujourd’hui, sur un bienfait accordé à un infirme, pour savoir comment cet homme a été guéri, sachez-le bien, vous tous, et tout le peuple d’Israël : C’est par le nom de Jésus-Christ de Nazareth, que vous avez crucifié et que Dieu a ressuscité des morts, c’est par lui que cet homme se présente devant vous pleinement guéri. Ce Jésus est la pierre rejetée par vous de l’édifice, et qui est devenue la pierre angulaire. Et le salut n’est en aucun autre ; car il n’y a pas sous le ciel un autre nom qui ait été donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés.  » (Act 4 5-13). Il est clair que la présence de ces strophes dans ce psaume peut permettre de l’interpréter à la lumière du mystère de la Rédemption.

De plus,  cette façon de commenter les psaumes, à la lumière du Nouveau Testament, est louable puisque l’Ancien Testament est une préparation du Nouveau Testament. L’Ancien Testament nous ouvre aux mystères de Dieu ; ces mystères  sont annoncés dans l’Ancien Testament, tout en trouvant  leur réalisation dans le Nouveau Testament. Ainsi le sacrifice d’Isaac par Abraham, commandé par Dieu, est-il une claire annonce du Sacrifice de Notre Seigneur Jésus-Christ qui se sacrifia pour obéir à la volonté de son Père. De plus, Notre Seigneur n’a-t-il pas dit qu’il n’était pas venu abolir la Loi mais l’accomplir. Saint Paul ne commence-t-il pas  son Epître aux Hébreux, en disant : « Après avoir, à plusieurs reprises et en diverses manières, parlé autrefois à nos pères par les Prophètes, Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses » (Hb 1 1-2). Aussi Dieu a-t-il annoncé  le mystère de l’Incarnation Rédemptrice dès les premiers chapitres de la Genèse, livre de l’Ancien Testament, affirmant,  après le péché originel commis par Adam et Eve, qu’il mettrait une inimité entre la femme et Satan : «Et je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité ; celle-ci te meurtrira à la tête, et tu la meurtriras au talon.  » (Gen 3 17). C’était, au dire de toute la Tradition patristique, annoncer le mystère de la venue du Messie-Sauveur, né de la femme, « la Vierge Marie », qui serait la raison de l’inimitié entre la femme et le serpent. De fait, Il l’écrasera du haut du bois de la Croix…

L’interprétation « spirituelle » de cette « action de grâce » dans la lumière du mystère de la Rédemption, exprimée dans ce psaume, semble donc parfaitement fondée.

D’autant que  ce mystère de l’Incarnation Rédemptrice est, par excellence, le mystère de la bonté de Dieu, de sa miséricorde. Le psalmiste dit juste lorsqu’il dit : « Confitemini Domino quoniam bonus : quoniam in saeculum misericordia eius » « Célébrez le Seigneur, parce qu’il est bon, parce que sa miséricorde est éternelle ». Saint Jean dit, de son côté, nous donnant le vrai sens de l’Evangile, « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle » (Jn 3 16). La raison de l’Incarnation, sa cause efficiente, est la charité de Dieu. Mais une charité pleine de miséricorde. C’est pour le sacrifice que Dieu envoie le Fils et c’est par obéissance à la volonté de son Père que le Christ se laissera cloué en Croix. Cet amour de Dieu s’exprime à l’égard du « cosmos », « Dieu a tellement aimé le monde… », alors que ce monde était pourtant  un monde de pécheurs. Saint Jean n’hésitera pas à dire : « alors que nous étions encore pécheurs, le Christ pour nous est mort ». Ainsi Dieu ne craint pas de livrer son propre Fils, le « Monogène », son Fils unique, son Fils bien aimé, celui en qui il met toutes ses complaisances. Il leur livre son unique. La parabole des Vignerons homicides illustre merveilleusement cet amour absolu de Dieu, un amour de miséricorde, d’une bonté désintéressé, un amour que l’on peut dire, un amour « fou », que l’on ne pouvait imaginer s’il ne nous avait pas été révélé…Cet amour de Dieu est immense. Le don fait ne mesure-t-il pas l’amour ? Plus le don est grand, plus l’amour est grand. Que pouvait-il donner de plus grand que son Fils ?

Mais il ne suffit pas de regarder du côté de la cause efficiente. Il faut aussi regarder du côté de la cause finale. La miséricorde éclate tout également. La cause finale de ce mystère de l’Incarnation Rédemptrice, la raison de la venue du Fils, annoncé déjà dans l’Ancien Testament, « je mettrai une inimité entre toi et la femme »…n’est rien d’autre que le don de la vie éternelle : « …afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle », c’est-à-dire la possession du bien suprême qu’est Dieu. « Dieu est si bon que meilleur ne se peut » s’écriait saint Louis. Dieu veut se donner à sa créature rachetée dans un face à face éternel. La seule condition pour obtenir ce bien suprême, c’est la foi en NSJC, et ici, selon le contexte, c’est la foi en l’amour de Dieu. Alors on comprend que l’Eglise ne craigne pas de faire chanter à son diacre, dans la veillée pascale, dans le chant de l’Exultet : « O félix culpa », « Oh bien heureuse faute qui  nous a valu un tel Rédempteur ». « Un tel Rédempteur » …Oui ! Qui  ne nous donne rien moins que la « Vie Eternelle ». Oh merveilleuse Eternité. Qui nous oblige, comme le psalmiste le chante, « à célébrer le Seigneur, parce qu’il est bon, parce que sa miséricorde est éternelle ».

« Dicat nunc Israel quoniam bonus : quoniam in saeculum misericordia eius » « Qu’Israël dise maintenant qu’il est bon et que sa miséricorde est éternelle »

L’« Israël » de l’Ancien Testament, le pouvait chanter, lui qui avait bénéficié de la sortie de l’Egypte, du retour de l’exil, de la reconstruction du Temple, du triomphe tel que celui des Macchabées sur les ennemis d’Israël pour le rétablissement du culte du vrai Dieu. C’est, à plus forte raison, vrai maintenant de l’Eglise du Nouveau Testament. Elle chante de fait la bonté de Dieu et sa miséricorde dans toute sa liturgie dominicale, dans son « Gloria in Excelsis Deo ». N’est-ce pas ce qu’elle fait aussi en chantant son Credo. Ce chant n’est-il pas un chant où elle dit l’amour de Dieu et sa bonté. La création ici confessée, « Je crois en Dieu le Père tout puissant créateur du Ciel et de la Terre » n’est-elle pas une œuvre d’amour ? Le bien se donne, se communique : « Bonum diffusivum sui ». C’est son essence. Il ne peut pas ne pas se donner. Dieu accomplit toutes ses œuvres et il vit que cela était bon. Le mystère de l’Incarnation dit également, nous venons d’y faire allusion, son amour éternel. La Passion du Christ ne dit-il pas aussi et surtout tout son amour, un amour immense : « Qu’Israël dise maintenant qu’il est bon et que sa miséricorde est éternelle ».

« Dicat nunc domus Aaron : quoniam in saeculum misericordia eius » « Que la maison d’Aaron dise maintenant que sa miséricorde est éternelle ».

« Domus Aaron », c’est ici toute la maison d’Aaron, la maison sacerdotale, qui est appelée à chanter la miséricorde du Seigneur. Elle le fait parce que « maison sacerdotale ». Dans le Livre de l’Exode, au chapitre 28, il est dit que Dieu choisit Aaron et ses fils pour qu’ils soient prêtres : « Fais venir auprès de toi ton frère et ses fils avec lui, du milieu des enfants d’Israël, pour qu’il soit prêtre à mon service » (Ex 28 1-2). « Ils seront consacrés à mon service comme prêtres », dira Dieu. (Ex 29 1).  Et ils offriront les sacrifices à la louange de Yaweh pour chanter sa miséricorde et manifester leur totale sujétion au Dieu de miséricorde. Cela vaut aussi et essentiellement pour le sacerdoce du Nouveau Testament, le sacerdoce du Christ. En effet le sacerdoce du Nouveau Testament est essentiellement ordonné au sacrifice. Il a été créé par NSJC alors qu’il instituait la sainte Eucharistie : « Faites ceci en mémoire de moi ». Or NSJC est non seulement présent réellement, vraiment, substantiellement dans l’Eucharistie, mais il s’offre à Dieu son Père en sacrifice, il est la Victime de son Sacrifice. Il est prêtre et victime de son sacrifice. Or ce sacrifice est essentiellement la manifestation de la miséricorde de Dieu. NSJC était en effet la seule victime capable, parce qu’Dieu-Homme d’apaiser la colère de Dieu. En effet le péché ayant une certaine infinité de malice en raison de la  dignité infinie de la personne offensée, Dieu lui-même, seul un acte théandrique , à la fois divin et humain, pouvait le réparer et cela surabondamment. Le Christ s’est substitué à nous dans ce sacrifice. Il a réparé surabondamment par cet acte de soumission, l’insubordination du péché d’Adam. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime » dira un jour NSJC. Ainsi le prêtre qui actualise  chaque jour cet acte de charité chante quotidiennement la miséricorde de Dieu et son immense bonté. Voilà la fonction essentielle et capitale du prêtre. Oui, le psalmiste a raison de dire : « Que la maison d’Aaron, la famille des lévites, la famille  sacerdoce,  dise maintenant que sa miséricorde est éternelle ».

« Dicant nunc qui timent Dominum : quoniam in saeculum misericordia  eius » « Que ceux qui craignent le Seigneur disent maintenant que sa miséricorde est éternelle »

« Que ceux qui craignent Dieu…. ». Je dirais volontiers que cette « crainte de Dieu », qui n’a rien à voir avec la peur, la crainte servile, est peut-être la plus belle définition du croyant. Je fonderais cette remarque d’abord sur les paroles mêmes de Notre Dame, dans son Magnificat. N’a-t-elle pas dit, devant sa cousine Elizabeth, le jour de la Visitation : « Mon âme glorifie le Seigneur…Parce qu’il a fait en moi de grandes choses, Celui qui est puissant, Et dont le nom est saint, Et dont la miséricorde s’étend d’âge en âge, sur ceux qui le craignent ».

Et de fait Dieu aime cet esprit de crainte. Il l’encourage même. On ne peut trouver de meilleur texte sur la « crainte de Dieu » que dans le premier chapitre de l’Ecclésiastique : « La crainte du Seigneur est gloire et honneur,
et joie, et couronne d’allégresse. La crainte du Seigneur réjouit le cœur ;
elle donne gaieté, joie et longue vie. Celui qui craint le Seigneur s’en trouvera bien à la fin, et il trouvera grâce au jour de sa mort. Le commencement de la sagesse est de craindre Dieu ; elle est formée avec les fidèles dans le sein de leur mère. Elle s’est préparé chez les hommes une éternelle habitation ; elle demeurera fidèlement avec leur race. La plénitude de la sagesse est de craindre le Seigneur ; elle rassasie de ses fruits ceux qui la possèdent. Elle remplit toute sa maison de choses désirables, et ses greniers de ses produits. La couronne de la sagesse, c’est la crainte du Seigneur ; elle fait fleurir la paix et les fruits de salut. Le Seigneur l’a vue et l’a manifestée ; [et toutes deux sont des dons de Dieu.] Il fait pleuvoir à flots la science et la lumière de l’intelligence, il exalte la gloire de ceux qui la possèdent. La racine de la sagesse, c’est de craindre le Seigneur, et ses rameaux sont une longue vie.
[La crainte du Seigneur bannit le péché, et celui qui s’y attache détourne la colère.]…Car la sagesse et l’instruction, c’est la crainte du Seigneur, et ce qui lui plaît, c’est la fidélité et la mansuétude. Ne te refuse pas à la crainte du Seigneur, et ne t’approche pas de lui avec un cœur double….Vous qui craignez le Seigneur, attendez sa miséricorde, et ne vous détournez pas, de peur que vous ne tombiez. Vous qui craignez le Seigneur, ayez foi en lui, et votre récompense ne se perdra pas. Vous qui craignez le Seigneur, espérez le bonheur, la joie éternelle et la miséricorde.
Considérez les générations antiques, et voyez : qui jamais a espéré au Seigneur et a été confondu ? Qui est resté fidèle à sa crainte et a été abandonné ? Qui l’a invoqué et n’a reçu de lui que le mépris ? Car le Seigneur est compatissant et miséricordieux ; il remet les péchés et délivre au jour de l’affliction.
… Ceux qui craignent le Seigneur ne sont pas indociles à ses paroles,
et ceux qui l’aiment gardent fidèlement ses voies. Ceux qui craignent le Seigneur cherchent son bon plaisir, et ceux qui l’aiment se rassasient de sa loi. Ceux qui craignent le Seigneur préparent leurs cœurs, et tiennent leurs âmes humiliées devant lui,  en disant : Nous tomberons entre les mains du Seigneur, et non entre les mains des hommes ; car autant il a de puissance, autant il a de miséricorde » (Eccle 1 11-30).

Vous pourriez me dire que saint Paul, dans sa 2ème lettre à Timothée, dit que « Dieu ne nous a pas donné un « spiritum timoris », un « esprit de crainte » « Non enim dedit nobis Deus spiritum timoris ». Ce qui semble aller contre l’enseignement de Dieu dans l’Ecclésiastique…Mais je vous répondrai qu’il ne faudrait pas traduire « spiritum timoris » par « un esprit de crainte » mais, comme le traduit Crampon, à juste titre, par « un esprit de faiblesse », ce qui n’a rien à voir avec « l’esprit de crainte » que l’Ecclésiastique magnifie. Nous venons de le voir. En effet, le contexte de la phrase de saint Paul à Timothée, justifie bien cette traduction car saint Paul dit que Dieu ne nous a pas donné un « esprit de faiblesse » mais « de force, d’amour et de modération » «  non spiritum timoris, sed virtutis et dilectionis et sobrietatis ». « Timoris » est ici la faiblesse et non la « crainte » opposée à la force, à la puissance.

Vous pourriez également m’opposer l’enseignement de saint Jean sur la crainte et l’amour. En effet il écrit dans sa première Epître : qu’il « n’y a pas de crainte dans l’amour » : «  Il n’y a point de crainte dans l’amour ; mais l’amour parfait bannit la crainte, car la crainte suppose un châtiment ; celui qui craint n’est pas parfait dans l’amour.  Nous donc, aimons Dieu, puisque Dieu nous a aimés le premier ».
Saint Jean nous donne lui-même la réponse à cette objection lorsqu’il dit « la crainte suppose un châtiment ». Il n’entend pas ici la crainte dans le sens de l’Ecclésiastique. Pour l’Ecclésiastique : « La crainte du Seigneur est gloire et honneur, et joie, et couronne d’allégresse. La crainte du Seigneur réjouit le cœur ; elle donne gaieté, joie et longue vie. Celui qui craint le Seigneur s’en trouvera bien à la fin, et il trouvera grâce au jour de sa mort ». Ainsi celui qui entretient dans son cœur, grâce à « l’esprit de crainte », « gloire, honneur, joie du cœur  couronne d’allégresse, gaieté et sainte espérance », a banni lui aussi, de son cœur,  comme celui qui aime Dieu, toute crainte de châtiment. Autre la crainte servile. Autre la crainte filiale. C’est celle-là qui est dans le cœur du vrai croyant. Cette crainte filiale connaît la miséricorde du Seigneur et sait, comme nous y invite le psalmiste, la chanter : « Que ceux qui craignent le Seigneur disent maintenant que sa miséricorde est éternelle ». C’est la même pensée qu’exprime l’Ecclésiastique : « Vous qui craignez le Seigneur, attendez sa miséricorde … Vous qui craignez le Seigneur, espérez le bonheur, la joie éternelle et la miséricorde ».

« De tribulatione invocavi Dominum ; et exaudivit me in latitudine Dominus » « Du sein de la tribulation, j’ai invoqué le Seigneur et le Seigneur m’a exaucé et mis au large ».

Quelle belle supplique ! Elle me fait penser à celle des Apôtres dans la barque agitée par une mer déchainée. « Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ». La mer est agitée. Les disciples sont au milieu d’une vraie tribulation « physique ». Ils  sont littéralement « effrayés ». NSJC le leur reprochera : « Pourquoi êtes-vous effrayés ». Ils s’approchent du Seigneur endormi et l’éveillèrent.  On a même l’impression qu’ils sont sur le point de secouer le Maître « Ils lui dirent  « Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ».

 

« Seigneur »…Oh quelle merveilleuse apostrophe : « Seigneur ». Nul ne peut prononcer ce mot « Seigneur » sans la foi, sans la foi en la divinité de celui qu’on invoque. En effet que signifie ce mot « Seigneur » ? Il  n’est pas seulement un titre royal, mais c’est un titre divin. On l’adresse à Dieu même.

Sans m’arrêter à l’Ancien Testament où l’expression est mille fois employée pour signifierla Seigneuriedu Dieu tout puissant, du Dieu d’Israël, j’arrêterai ma réflexion sur le Nouveau Testament.

 

Cette expression « Dominus » est coutumière dans la liturgie de l’Eglise. En elle, l’Eglise adresse toutes ses prières à Dieu le Père par Jésus-Christ « Notre Seigneur ». Voyez en plus les prières de l’Offertoire. Sans cesse, elles font référence à « Notre Seigneur ». Ainsi dès la deuxième prière de l’Offertoire : « Accordez-nous …d’avoir part à la divinité de Celui qui a daigné revêtir notre humanité, Jésus-Christ, votre Fils « Notre Seigneur », qui étant Dieu vit et règne avec vous en l’unité du Saint Esprit… », ou encore la troisième prière : « Nous vous offrons, « Seigneur », le Calice de notre rédemption… ».

 

Ce titre est attribué dès l’origine du Christianisme à Jesus-Christ. Saint Paul est très clair. Il attribue dans son Epître aux Romains cette « seigneurie » au Christ Jésus. « Jésus est Seigneur », dit-il. Voilà la foi de l’Eglise qui, par les Apôtres, se transmettra d’âge en âge. Et l’on dira toujours : « Notre Seigneur » pour désigner le Christ Jésus : « Notre Seigneur Jésus-Christ ». Il faut, du reste, qu’il en soit ainsi. C’est une affirmation de sa divinité. Il n’est pas seulement « Jésus ». Il n’est pas seulement « Christ », Il est  « Notre Seigneur Jésus-Christ » ? Voilà la plénitude de son nom. Il est « Sauveur ». Il est « Roi », Il est l’oint du Seigneur, Il est prophète, Il est prêtre. Il est Dieu. Voilà ce qui est dit en plénitude dans l’expression : « Notre Seigneur Jésus-Christ » : « De tribulatione invocavi Dominum » « Du sein de la tribulation, j’ai invoqué le Seigneur »

 

C’est aussi l’acclamation de l’apôtre Saint Thomas après la résurrection de Jésus d’entre les morts. Il ne veut croire à la résurrection du Christ, sans avoir vu les plaies du Crucifié, mieux encore, sans avoir mis préalablement ses doigts dans ses plaies,  ses mains dans son coté transpercé. Sa « tribulation » est réelle, elle est théologale…Alors toutes portes fermées, Jésus apparaît au milieu d’eux.  Thomas, cette fois, est présent. Sans attendre, Jésus s’approche de lui, lui dit de mettre ses mains dans ses plaies, dans son côté. Alors confondu et émerveillé, saint Thomas s’écrie : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Et Jésus de lui dire de n’être plus  incrédule mais croyant. Acceptant enfin la résurrection, « sortant enfin de sa tribulation », Thomas confesse la divinité de Jésus: « Mon Seigneur et mon Dieu ». Tel est le sens de son acclamation. Je confesse la divinité de Jésus. Il est bien « Seigneur ». Il est bien le Maître de tout. Il est le tout puissant. Il est « Seigneur ».

 

Saint Luc utilise habituellement ce mot « Seigneur » pour désigner le Christ Jésus. Alors que Jésus arrive à la porte de Naïm. Il voit sortir un cortège funèbre. Vous connaissez la scène. C’est une veuve qui n’avait qu’un fils qu’elle venait de  perdre. Le  peuple par sympathie accompagne la veuve pleine de chagrin. Le cortège est immense. C’est alors que Jésus avec ses propres disciples, arrive. Saint Luc ici nomme Jésus du titre de « Seigneur » : « Le Seigneur l’ayant vu, fut touché de compassion pour elle». Il fit arrêter le cortège funèbre, toucha le cercueil et il dit : « Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi ». Aussitôt le mort se leva sur son séant et commença à parler et Jésus le remit à sa mère. Tous furent saisis de crainte et glorifiaient Dieu, et disaient « un grand prophète a paru parmi nous et Dieu a visité son peuple ». De nouveau, vous le voyez,  le mot « Seigneur » est mis en relation, par le truchement du miracle, avec la notion de divinité. « Mon Seigneur et mon Dieu »

 

Saint Luc ou mieux encore les amis de Jésus, la famille de Lazare, Marthe et Marie avaient l’habitude d’appeler Jésus, « Seigneur », voire même « Maître ».

Alors que Marie Madeleine est aux pieds de Jésus à contempler et méditer ses paroles, Marthe, tout affairée au repas, se tourne vers Jésus et lui dit : « Seigneur », vous ne vous mettez-vous pas en peine que ma sœur me laisse servir seule ? Dites-lui donc de m’aider »… « Marthe Marthe, vous vous inquiétez et vous agitez pour beaucoup de choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la bonne part qui ne lui sera pas ôtée ». Saint Luc, lui-même dans ce récit parle de Jésus comme « Seigneur ». « Marie était assise aux pieds du Seigneur » et de nouveau il écrit : « Le Seigneur lui répondit… »

 

Saint Jean, le disciple que Jésus aimé, utilise lui aussi également ce mot de « Seigneur » en relation avec la divinité. On le trouve, entre autres, lors du récit de l’apparition de Jésus à ses disciples près de la mer de Tibériade. Les disciples vont à la pêche. Toute la nuit, ils pêchent. Mais sans résultat. Le matin venu, Jésus se trouve sur la berge. De la berge, Il leur crie de jeter les filets sur la droite de la barque et « vous trouverez du poisson ». Ce qu’ils firent. La pèche fut miraculeuse. Alors le disciple que Jésus aimait dit à Pierre : « C’est le Seigneur ». A ces mots, Pierre se jette à l’eau, il était nu. La barque est conduite sur la berge. Jésus qui avait allumé un feu de braise, demande d’apporter des poissons pris. « Venez et mangez ». Et aucun de disciples n’osaient demander : « Qui êtes-vous parce qu’ils savaient que c’était le « Seigneur ».

 

C’est alors que Jésus prit à part Pierre. Il voulait lui faire réparer son propre reniement lors de la Passion.Jésus lui pose par trois fois la question « Pierre m’aimes-tu plus que ceux-la ? Et Pierre de répondre : « Seigneur », vous savez que je vous aime ». Alors « paie mes agneaux », lui dit Jésus. « Pierre m’aimes-tu plus que ceux-là » « Oui « Seigneur » vous savez bien que je vous aime ». Alors   « Paie mes agneaux ». « Pierre m’aimes-tu » ? Pierre fut contrarié de cette triple interrogation et lui dit : « Seigneur », vous connaissez toutes choses, vous savez bien que je vous aime ? « Alors « paie mes brebis ».

Là encore le mot « Seigneur » est mis en relation avec la « divinité » : « Vous connaissez toutes choses ». Il vient de réaliser ce miracle de la pêche miraculeuse.

 

Je conclue.

 

« Jésus est Seigneur ». Ainsi le confesse tous les disciples. Ainsi le confesse la foi de l’Eglise…Il est « le Seigneur qui vient ». Aussi, l’Eglise gardera-t-elle longtemps dans sa prière l’invocation primitive araméenne : « Marana tha », i.e ; « Viens Seigneur » Jésus. C’est même la conclusion  de la première lettre de saint Paul  aux Corinthiens: « je vous salue de ma propre main, moi Paul. Si quelqu’un n’aime pas le Seigneur qu’il soit anathème ! Marana tha », (Le seigneur vient) (1 Cor 16 22)

C’est aussi la conclusion de l’Apocalypse de saint Jean : « « Celui qui atteste ces choses, dit : « Oui, je viens bientôt. Amen ! Venez Seigneur Jésus » « Veni Domine Jesu »

 

Et Jésus lui-même avait mis ses disciples sur la voie de cette appellation  de « seigneurie ». Souvenez-vous de la scène dans l’Evangile de Saint Mathieu : « Les Pharisiens étant assemblés, Jésus leur fit cette question : « Que vous semble du Christ ? De qui est-il le fils ? Ils lui répondirent : de «David ». (C’est l’enseignement même du Psaume 110 1). Comment donc, leur dit-il, David inspiré d’en haut, l’appelle-t-il « son Seigneur », en disant : « Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis l’escabeau de tes pieds ? Si donc David l’appelle « son Seigneur », comment est-il son fils ? Nul ne pouvait lui rien répondre, et, depuis ce jour, personne n’osa plus l’interroger » (Math 22 41-46)

Il est le fils de David selon la nature humaine. Le Christ en effet est de la descendance de David. Mais selon sa divinité, Jésus est « son Seigneur » et Maître.

 

Saint Paul va utiliser ce psaume 110 ici commenté par NSJC,  pour montrer tout le sens du mot « Seigneur ». C’est dans son fameux passage de la Iere Epître aux Corenthiens : « Puis ce sera la fin, quand il (Jésus) remettra le royaume à Dieu et au Père, après avoir anéanti toute principauté, toute puissance et toute force. Car il faut qu’il règne :  » jusqu’à ce qu’il ait mis tous ses ennemis sous ses pieds.  » Le dernier ennemi qui sera détruit, c’est la mort.  Car Dieu  » a tout mis sous ses pieds.  » Mais lorsque l’Ecriture dit que tout lui a été soumis, il est évident que celui-là est excepté, qui lui a soumis toutes choses.  Et lorsque tout lui aura été soumis, alors le Fils lui-même fera hommage à celui qui lui aura soumis toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous » (1 Cor 15 24-28).

 

Qu’est-ce à dire sinon que Saint Paul confesse ici, s’inspirant du Psaume 110 de David expliqué plus haut par Jésus lui-même, que Jésus est le Seigneur, le Maître de toutes choses. Il est le Seigneur de tous les hommes, de tous ses ennemis, de toutes les Puissances, de la mort elle-même. Tout l’univers, cieux, terre, enfers, tout l’univers proclame, proclamera que Jésus est « Seigneur », tout lui est soumis et lui sera soumis. Il est le seul et vrai  Kyrios , le seul « Seigneur et Maître », le seul Dieu, oui, le seul Kyrios. Et voilà la pleine signification de notre « Kyrie Eleison » par trois fois répété, en notre messe : « Seigneur, ayez pitié de nous ». « Kyrie eleison ». Mais qui ne voit que ce « Kyrie eleison » est semblable à ce cri des apôtres : « Domine, salva nos », « Seigneur, sauvez nous ». « Seigneur, ayez pitié de nous », semblable à cette strophe de notre psaume : «  Du sein de la tribulation, j’ai invoqué le Seigneur ». C’est le même cri. C’est la même supplique avec la même intelligence du mystère du Christ, Sauveur parce que tout à la fois homme et Dieu, parce que Seigneur.

 

Alors vous voyez combien est important ce récit du miracle de la mer apaisée, du vent calmé par la seule parole de Jésus. Là, il manifeste devant ses disciple sa Seigneurie sur toutes choses, sur tous les éléments. Il est homme, certes. Mais Il est Dieu. Tout lui obéit. Tout est en sa dépendance. Tout est en sa domination. Tout est en son pouvoir : « Il commanda au vent et à la mer et il se fit un grand calme ». Par sa propre puissance, il apaise les éléments agités. Commander aux flots est la manifestation de la puissance divine.

Aimons ce mot « Domine ». Nous le répétons avant de venir à la Sainte Table : « Domine, non sum dignus… » « Seigneur, je ne suis pas digne, mais dites seulement une parole et mon âme serai guéri ». Ce sont bien des paroles de salut ! Confessons par ce mot, «  Domine », notre foi en la divinité de notre Maître. Celui que nous voulons servir est Dieu, notre Dieu. Il a toute puissance. Ne cherchons pas à diminuer sa Seigneurie sur nous, son domaine sur nous. Au contraire, protestons de notre soumission, de notre adoration. Nous savons que nous sommes sur la terre « pour le servir et l’honorer et par ce moyen sauver notre âme ». Que notre service soit total, plénier. Ne retranchons rien de ce souverain domaine de Dieu. Sa souveraineté est plénière et totale.  Elle est publique. Nous devons la recevoir telle, plénière, totale et publique. N’oublions que l’on ne peut pas servir deux maîtres : « Dieu et Mamon », « Dieu et le monde ». C’est, du reste, alors que nous servirons pleinement ce « Seigneur et Maître » que nous trouverons la joie. Elle est inhérente à cette confession, à ce service divin. Je dis bien que la « joie est inhérente à cette confession et à ce service divin ». Souvenez-vous du bon larron. Lui aussi sut invoquer sur le bois de la Croix, ce « Seigneur ». Alors qu’il agonisait, il s’adressa à Jésus et en quel terme ? Il confessa sa «  Seigneurie ». Souvenez du récit en saint Luc : « Or, l’un des malfaiteurs, mis en croix l’injuriait, disant :  » N’es-tu pas le Christ? Sauve-toi toi-même et sauve-nous !  » Mais l’autre le reprenait, disant :  » Tu n’as pas même la crainte de Dieu, toi qui subis la même condamnation ! Pour nous, c’est justice, car nous recevons ce que méritent nos crimes; mais lui n’a rien fait de mal.  » Et il dit à Jésus:  » Seigneur, souvenez-vous de moi, quand vous viendrez avec votre royauté.  » «Domine, Memento mei, cum veneris in regnum tuum » Et Jésus lui dit :  » Je te le dis en vérité, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis.  »

Ne croyez-vous pas que ces paroles du bon larron « Seigneur » sont des paroles de vie, de joie parce qu’elles ont causé le salut. « Il n’y a pas sous le ciel d’autre nom par lequel nous puissions être sauvés ». Et  le bon larron s’endormit dans la joie de son « Seigneur et Maître » pour la vie éternelle.

« Domine, salva nos, perimus ».

Le psalmiste dit juste lorsqu’il écrit, après l’ « invocation » : « invocavi dominum et exaudivit me in latitudine Dominus », « j’ai invoqué le Seigneur et le Seigneur m’a exaucé et mis au large ». L’exemple du bon larron le prouve à l’évidence, « in latitudine », ici le Royaume de Dieu. « Je te le dis en vérité, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis » ainsi que  les disciples au milieu de la mer agitée : « Domine, salva nos, perimus ». Le Seigneur se leva, commanda à la mer, il se fit un grand calme. Tout est juste dans ce psaume, à la lettre près.

Fort de cette interprétation de cette strophe, on comprend que le psalmiste puisse exprimer dans les 7 strophes suivantes un sentiment de confiance et d’abandon dans le Seigneur

C’est ainsi qu’il peut écrire immédiatement après: « Dominus mihi adjutor, non timebo quid faciat mihi homo »  » « Le seigneur est mon secours, je ne craindrai pas ce que l’homme pourra me faire »

Il est mon secours « adjutor » puisqu’il a exaucé mon appel, ma supplique, celle des disciples, celle du bon larron et de bien d’autres. Que craindrai-je ? Il est mon protecteur.

« « Dominus mihi adjutor, et ego despiciam inimicos meos » « Le Seigneur est mon secours, et je mépriserai mes ennemis »

Il exprime une merveilleuse confiance en son Seigneur, son secours.
«Bonum est confidere in Domino, quam confidere in homine» « Il vaut mieux se confier au Seigneur que de se confier dans l’homme »

Le Seigneur est le tout puissant. Il a toujours manifesté sa toute-puissance, dans l’Ancien Testament en sauvant le peuple hébreu dans sa fuite de l’Egypte, alors qu’il allait être « dévoré » par la puissance du Pharaon. Ici dans  le Nouveau Testament : en sauvant les disciples d’une mort apparemment certaine et prochaine.

« Bonum est sperare in Domino quam sperare in principibus » « Il vaut mieux espérer au Seigneur, plutôt que d’espérer dans les princes »

Ce sont là des remarques bien légitimes dès lors que le Seigneur a toujours manifesté sa protection.

Dans les trois strophes suivantes, l’auteur fait allusion, sans les expliciter, aux  tribulations dont le Seigneur l’a sauvé. D’où sa confiance à toutes épreuves et  son chant de miséricorde au Seigneur : « quoniam in aeternum Misericordia eius ». Il a pu se venger des nations par la confiance qu’il a mise dans le Seigneur.

« Omnes gentes circuierunt me, et in nomine Domini quia ultus sum in eo » « Toutes les nations m’ont entouré, et au nom de Seigneur je me suis vengé d’elles »

« Circumdantes circumdederunt me, et in nomine Domini quia ultus sum in eos » « Elles m’ont environné et assiégé, et au nom de Seigneur je me suis vengé d’elles »

Circumdederunt me sicut apes et exarserunt sicut ignis in spinis, et in nomine Domini quia ultus sum in eos » « Elles m’ont environné comme des abeilles, et elle se sont embrasées comme un feu d’épines ; et au nom de Seigneur je me suis vengé d’elles ».

« Impulsus eversus sum ut caderem : et Dominus suscepit me » « j’ai été poussé, heurté et prêt à tomber, et le  Seigneur m’a soutenu »

C’est toujours la même confiance ici exprimée. Oui ! Aux milieux des mille tribulations, le Seigneur m’a soutenu.

« Fortitudo mea et laus mea Dominus, et factus est mihi in salutem » « Le Seigneur est ma force et ma gloire, il s’est fait mon salut »

Voilà ici l’affirmation claire du mystère de la Rédemption, qui est le mystère du salut. C’est ce que nous confessons dans le Credo de Nicée et dans le Gloria. Dans le Credo nous confessons bien que NSJC est « descendu des cieux pour nous autres hommes et pour notre salut » « Qui propter nos homines et propter nostram salutem descendit de caelis ». Dans le Gloria de la messe, nous confessons que Notre Seigneur est « l’Agneau de Dieu, Fils du Père et qui efface les péchés du monde, ayez pitié de nous » et on le confesse même par deux fois : « Vous qui effacez les péchés du monde » « Qui tollis peccata mundi, suscipe deprecationem nostram ».

Rien n’est plus beau que l’explication que nous donne le catéchisme du Concile de trente sur ce salut apporté par le Fils de Dieu, Notre Seigneur. Il faut prendre le temps de le lire. C’est l’objet du chapitre 3 du Catéchisme relatif au second article du Symbole de la Foi : « Et en Jésus-Christ son Fils unique, notre Seigneur » :

Le genre humain trouve dans la foi et la confession de cet Article des avantages immenses et merveilleux. Nous en avons une preuve dans cette parole de l’Apôtre Saint Jean:[1] Quiconque confessera que Jésus est le Fils de Dieu, demeurera en Lui, et lui en Dieu. Mais notre Seigneur Jésus-Christ Lui-même avait pris soin de nous en donner une autre, lorsqu’Il avait proclamé d’une manière si éclatante le bonheur du prince des Apôtres:[2] Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car ce n’est ni la chair ni le sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux. C’est ici en effet le fondement le plus solide de notre Salut et de notre Rédemption.

I. — PÉCHÉ ORIGINEL

Pour mieux apprécier les fruits merveilleux que nous recueillons de cet Article, il faut nous rappeler la perte lamentable que firent nos premiers parents de cet état si heureux dans lequel Dieu les avait placés. Que le Pasteur s’applique donc à bien expliquer aux Fidèles la cause commune de nos misères et de nos malheurs. A peine Adam eut-il désobéi à Dieu et transgressé le précepte qui lui disait:[3] Tu peux manger de tous les fruits du jardin, mais ne touche pas à l’arbre de la science du bien et du mal ; car le jour où tu mangeras de son fruit tu mourras de mort ; aussitôt il tomba dans cet affreux malheur qui lui fit perdre la sainteté et la justice dans lesquelles il avait été créé, et lui-même devint sujet à une foule d’autres maux que le Saint Concile de Trente a énumérés tout au long.[4] D’autre part il ne faut pas oublier que ce péché et son châtiment ne se sont point arrêtés en Adam, mais qu’il a été, lui, comme la source et le principe qui les a fait passer justement à toute sa postérité.

Cependant le genre humain étant tombé de si haut, rien ne pouvait le relever et le remettre dans son premier état, ni les forces des hommes, ni celles des Anges. A ses malheurs, à sa ruine il ne restait de remède que le Fils de Dieu Lui-même, avec sa Puissance infinie. Seul Il pouvait, en se revêtant de l’infirmité de notre chair, détruire la malice infinie du péché, et nous réconcilier avec Dieu dans son sang.

Or la foi et la confession de ce mystère de la Rédemption est, et a toujours été si nécessaire aux hommes pour les conduire au salut, que Dieu a voulu le révéler dès le commencement: Au moment de la condamnation générale qui suivit de si près le péché, Il fit briller l’espérance de la Rédemption dans les paroles dont Il se servit pour prédire au démon sa propre ruine, par la délivrance même de l’homme:[5] Je mettrai des inimitiés entre toi et la femme, entre ta race et la sienne. Elle te brisera la tête, et toi tu chercheras à la blesser au talon.

Souvent, dans la suite, Dieu confirma cette promesse, et fit connaître ses desseins d’une manière plus positive, surtout lorsqu’il voulait témoigner à certains hommes une bonté particulière. Abraham entre autres parmi les patriarches, reçut plusieurs fois de Lui la révélation de ce mystère. Mais ce fut principalement à l’heure où il allait immoler son fils Isaac pour Lui obéir, qu’il Le connut clairement. Dieu lui dit en effet:[6] Puisque vous avez fait cela, et que vous n’avez point épargné votre fils unique, Je vous bénirai, et Je multiplierai votre race comme les étoiles et comme le sable qui est sur le bord de la mer. Votre postérité possédera les villes de vos ennemis, et toutes les nations de la terre seront bénies en votre race, parce que vous avez obéi à ma voix. De telles paroles faisaient aisément conclure qu’un des descendants d’Abraham délivrerait un jour le genre humain de l’effroyable tyrannie de Satan, et lui apporterait le salut. Or ce Libérateur annoncé ne pouvait être que le Fils de Dieu, sorti, comme homme, de la race d’Abraham. Peu de temps après, le Seigneur, pour conserver le souvenir de cette promesse, refit la même alliance avec Jacob, petit-fils d’Abraham. En effet ce patriarche vit dans un songe une échelle dont le pied reposait sur la terre, dont le sommet touchait le ciel, et le long de laquelle les Anges de Dieu montaient et descendaient.[7] Et Dieu Lui-même appuyé sur cette échelle lui disait:[8] Je suis le Seigneur Dieu d’Abraham ton père, et le Dieu d’Isaac. La terre sur laquelle tu dors, Je te la donnerai à toi et à ta postérité, et tes descendants seront comme la poussière de la terre. Tu t’étendras vers l’Orient et vers l’Occident, vers le nord et vers le Midi, et toutes les tribus de la terre seront bénies en toi et en ta race.

Et dans la suite Dieu continua de renouveler le souvenir de sa promesse et d’exciter l’attente du Sauveur, non seulement chez les descendants d’Abraham, mais chez beaucoup d’autres hommes. Dès que le gouvernement juif, avec sa religion, fut bien établi, le peuple connut plus clairement cette promesse. Car d’une part des objets muets figuraient, et de l’autre des hommes prédisaient les biens extraordinaires que Jésus-Christ notre Sauveur et Rédempteur devait nous apporter. Les Prophètes, dont l’esprit était éclairé par une lumière céleste, annoncèrent d’avance au peuple la naissance du Fils de Dieu, ses œuvres admirables (œuvres qu’Il a opérées pendant sa vie humaine), sa doctrine, ses mœurs, sa vie, sa mort, sa résurrection, et tous ses autres mystères. Et ils parlaient clairement de toutes ces choses, comme s’ils les avaient eues sous les yeux. De sorte que si nous supprimons la distance qui existe entre le passé et l’avenir, nous confondrons ensemble les prédictions des Prophètes et les prédications des Apôtres, la Foi des anciens patriarches et notre propre Foi »

Après la lecture de très beau passage qui explicite une part importante de notre Credo, nul doute que l’auteur de  notre strophe a raison d’écrire, tout le mystère du salut le confirme, que «  le Seigneur est ma force », en ce sens qu’il fut le seul capable, parce que Dieu-Homme, de réparer le genre humain et de le réconcilier avec Dieu : « Le Seigneur est ma force et ma gloire », parce qu’ « il s’est fait mon salut »

Alors si ce Christ Seigneur nous a ouvert par son sacrifice les « portes du Ciel », le péché étant effacé, il est juste de dire avec le psalmiste : « Vox exsultationis et salutis in tabernaculis justorum » « Le cri de l’allégresse et de la délivrance retentit dans les tentes des justes ». Venez donc voir dans les églises des traditionalistes, la joie qui s’exprime lorsque la foule chante son Gloria et son Credo ! « Vos exsulationis » : « exsultatio » ce mot latin se traduit par « saut, bond, transports de joie ». C’est bien cela, sinon physiquement, du moins moralement, spirituellement.

« Dextera Domini fecit virtutem ; dextera Domini exaltavit me, dextera Domini fecit virtutem » « La droite du Seigneur a fait éclater sa puissance, la droite du Seigneur m’a exalté ; la droite du Seigneur a fait éclater sa puissance ».

Ainsi cette œuvre rédemptrice est une œuvre de puissance divine. Elle est une œuvre d’exaltation. Il nous a fait Fils de Dieu, dans la foi et le baptême.  Et comme le dit Saint Paul : « si donc nous sommes fils, nous sommes aussi héritier de Dieu, Cohéritier du Christ». C’est pourquoi saint Pierre est plein de joie lorsqu’il écrit dans sa première Epître : « Béni soit Dieu, le Père de Notre Seigneur Jésus-Christ, qui selon sa grande miséricorde nous a régénérés par la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts pour une vivante espérance ; pour un héritage incorruptible, sans souillure et inflétrissable, qui vous est réservé dans les cieux, à vous que la puissance de Dieu garde par la foi pour le salut, qui est prêt à se manifester au dernier moment. Dans cette pensée, vous tressaillez de joie, bien qu’il vous faille encore pour un peu de temps être affligés par diverses épreuves, afin que l’épreuve de votre foi beaucoup plus précieuse que l’or périssable que l’on ne laisse pourtant pas d’éprouver par le feu, vous soit un sujet de louange, de gloire et d’honneur lorsque se manifestera Jésus-Christ. Vous l’aimez sans l’avoir jamais vu ; vous croyez en lui, bien que maintenant encore vous ne le voyiez pas ; et vous tressaillez d’une joie ineffable, et pleine de gloire, sûrs que vous êtes de remporter le prix de votre foi, le salut de vos âmes. » (1 St Pierre : 31 3-10)

« Non moriar sed vivam ; et narrabo opera Domini » « Je ne mourrai pas, mais je vivrai et je raconterai les œuvres du Seigneur »

C’est, de fait, ce qu’on fait tous les apôtres. Ils racontèrent les « œuvres du Seigneur ».Et tout d’abord le premier d’entre eux, saint Pierre, le jour de la Pentecôte, s’écria : « Alors Pierre, se présentant avec les Onze, éleva la voix et leur dit :  » Juifs, et vous tous qui séjournez à Jérusalem, sachez bien ceci, et prêtez l’oreille à mes paroles : Ces hommes ne sont pas ivres, comme vous le supposez, car c’est la troisième heure du jour. Ce que vous voyez, c’est ce qui a été annoncé par le prophète Joël : » Dans les derniers jours, dit le Seigneur, je répandrai de mon Esprit sur toute chair, et vos fils ainsi que vos filles prophétiseront, et vos jeunes gens auront des visions, et vos vieillards des songes. Oui, dans ces jours-là, je répandrai de mon Esprit sur mes serviteurs et sur mes servantes, et ils prophétiseront. Et je ferai paraître des prodiges en haut dans le ciel, et des miracles en bas sur la terre : du sang, du feu, et des tourbillons de fumée ;le soleil se changera en ténèbres, et la lune en sang, avant que vienne le jour du Seigneur, le jour grand et glorieux. Alors quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. — Enfants d’Israël, écoutez ces paroles : Jésus de Nazareth, cet homme à qui Dieu a rendu témoignage pour vous par les prodiges, les miracles et les signes qu’il a opérés par lui au milieu de vous, comme vous le savez vous-mêmes ;cet homme ayant été livré selon le dessein immuable et la prescience de Dieu, vous l’avez attaché à la croix et mis à mort par la main des impies. Dieu l’a ressuscité, en le délivrant des douleurs de la mort, parce qu’il n’était pas possible qu’il fût retenu par elle. Car David dit de lui :  » J’avais continuellement le Seigneur devant moi, parce qu’il est à ma droite, afin que je ne sois point ébranlé. C’est pourquoi mon cœur est dans la joie, et ma langue dans l’allégresse, et ma chair aussi reposera dans l’espérance ; car vous ne laisserez pas mon âme dans le séjour des morts, et vous ne permettrez pas que votre Saint voie la corruption. Vous m’avez fait connaître les sentiers de la vie, et vous me remplirez de joie en me montrant votre visage.  » Mes frères, qu’il me soit permis de vous dire en toute franchise, au sujet du patriarche David, qu’il est mort, qu’il a été enseveli, et que son sépulcre est encore aujourd’hui parmi nous. Comme il était prophète, et qu’il savait que Dieu lui avait promis avec serment de faire asseoir sur son trône un fils de son sang, c’est la résurrection du Christ qu’il a vue d’avance, en disant que son âme ne serait pas laissée dans le séjour des morts, et que sa chair ne verrait pas la corruption ». C’est ce Jésus que Dieu a ressuscité ; nous en sommes tous témoins. Et maintenant qu’il a été élevé au ciel par la droite de Dieu, et qu’il a reçu du Père la promesse du Saint-Esprit, il a répandu cet Esprit que vous voyez et entendez. Car David n’est pas monté au ciel ; mais il a dit lui-même :  » Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Asseyez-vous à ma droite, jusqu’à ce que je fasse de vos ennemis l’escabeau de vos pieds.  » Que toute la maison d’Israël sache donc avec certitude que Dieu a fait Seigneur et Christ ce Jésus que vous avez crucifié. « (Act 2 14-36)

C’est ce que fit aussi le diacre saint Etienne face aux Juifs. Excédés, ils le lapidèrent lorsqu’il  confessa l’exaltation du Christ en gloire à la droite de Dieu son Père. : «  Hommes à la tête dure, incirconcis de cœur et d’oreilles, vous résistez toujours au Saint-Esprit ; tels furent vos pères, tels vous êtes. Quel prophète vos pères n’ont-ils pas persécuté ? Ils ont même tué ceux qui annonçaient d’avance la venue du Juste ; et vous, aujourd’hui, vous l’avez trahi et mis à mort. Vous qui avez reçu la Loi, en considération des anges qui vous l’intimaient, et vous ne l’avez pas gardée !…  » En entendant ces paroles, la rage déchirait leurs cœurs, et ils grinçaient des dents contre lui. Mais Etienne, qui était rempli de l’Esprit-Saint, ayant fixé les yeux au ciel, vit la gloire de Dieu, et Jésus debout à la droite de son Père. Et il dit :  » Voici que je vois les cieux ouverts, et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu.  » Les Juifs poussèrent alors de grands cris, en se bouchant les oreilles, et se jetèrent tous ensemble sur lui. Et l’ayant entraîné hors de la ville, ils le lapidèrent. Les témoins déposèrent leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme nommé Saul.Pendant qu’ils le lapidaient, Etienne priait en disant :  » Seigneur Jésus, recevez mon esprit !  »
Puis s’étant mis à genoux, il s’écria d’une voix forte :  » Seigneur, ne leur imputez pas ce péché.  » Après cette parole, il s’endormit [dans le Seigneur].
Or, Saul avait approuvé le meurtre d’Etienne.
(Act 7 51-60)

«Castigans castigavit me Dominus : et morti non tradidit me » «  Le Seigneur m’a rudement châtié, mais il ne m’a pas livré à la mort »

Et non ! Puisque son œuvre est une œuvre de vie, une œuvre de salut. « Je suis la voie, la vérité et la vie ». « Qui mange mon corps et boit mon sang , a la vie éternelle ».

« Aperite mihi portas justitiae, ingressus in eas confiebor Domino : haec porta Domini, justi intrabunt in eam » « Ouvrez-moi les portes de la justice, afin que j’y entre et que j’y célèbre le Seigneur. C’est là la porte du Seigneur et les justes entreront par elles »

C’est faire une nette allusion au « pastorat » du Seigneur qui n’est rien d’autre que l’accomplissement de son œuvre rédemptrice et dont nous parle saint Jean dans son Evangile, dans son merveilleux chapitre 10 : « Je suis le Bon Pasteur et le Bon pasteur donne sa vie pour ses brebis… » « En vérité, en vérité, je vous le dis, je suis la porte des brebis. Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des brigands ; mais les brebis ne les ont point écoutés. Je suis la porte : si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé ; il entrera, et il sortira, et il trouvera des pâturages. Le voleur ne vient que pour dérober, égorger et détruire ; moi, je suis venu pour que les brebis aient la vie, et qu’elles soient dans l’abondance. Je suis le bon pasteur. Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. Mais le mercenaire, qui n’est pas le pasteur, et à qui les brebis n’appartiennent pas, voit venir le loup, laisse là les brebis et prend la fuite ; et le loup les ravit et les disperse. Le mercenaire s’enfuit, parce qu’il est mercenaire et qu’il n’a nul souci des brebis. Je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme mon Père me connaît, et que je connais mon Père, et je donne ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie ; il faut aussi que je les amène, et elles entendront ma voix, et il y aura une seule bergerie, un seul pasteur. C’est pour cela que mon Père m’aime, parce que je donne ma vie pour la reprendre. Personne ne me la ravit, mais je la donne de moi-même ; j’ai le pouvoir de la donner, et le pouvoir de la reprendre : tel est l’ordre que j’ai reçu de mon Père. »(Jn 10 7-18)

Nul doute que cette œuvre rédemptrice est une œuvre de vie et que NSJC l’accomplit en pleine soumission à la volonté de son Père. Ainsi répara-t-il la désobéissance d’Adam !

« Confitebor tibi quoniam exaudisti me et factus es mihi salutem » « Je vous rendrai grâce de ce que vous m’avez exaucé et que vous vous êtes fait mon salut »

Le Bon Pasteur, de fait, a entendu la plainte, les plaintes, vu les tribulations des hommes suite au péché originel. Il y fut sensible. Epris de compassion, il vint opérer notre salut. « Il est descendu des cieux pour nous autres hommes et pour notre salut » « Qui propter nos homines et propter nostram salutem descendit de caelis ». Comment en effet ne pas rendre grâce au Seigneur pour tant de bonté ? Il faut vraiment avoir un cœur de pierre pour ne pas répondre « amour pour amour ».

« Lapidem quem reprobaverunt aedificantes : hic factus est in caput anguli » « Le pierre rejetée par ceux qui bâtissaient est devenue la pierre angulaire »

C’est, nous l’avons dit, cette phrase qui a été utilisée par Saint Pierre alors qu’il s’adressait aux « Anciens» et aux « Scribes et « à toute la famille pontificale » Anne et Caïphe compris, après la guérison, au nom de Jésus-Christ du boiteux de naissance à l’entrée du Temple : « Ayant fait comparaître les Apôtres devant eux, ils leur demandèrent :  » Par quelle puissance ou au nom de qui avez-vous fait cela ?  » Alors Pierre, rempli du Saint-Esprit, leur dit :  » Chefs du peuple et Anciens d’Israël :  si l’on nous interroge aujourd’hui, sur un bienfait accordé à un infirme, pour savoir comment cet homme a été guéri, sachez-le bien, vous tous, et tout le peuple d’Israël : C’est par le nom de Jésus-Christ de Nazareth, que vous avez crucifié et que Dieu a ressuscité des morts, c’est par lui que cet homme se présente devant vous pleinement guéri. Ce Jésus est la pierre rejetée par vous de l’édifice, et qui est devenue la pierre angulaire. Et le salut n’est en aucun autre ; car il n’y a pas sous le ciel un autre nom qui ait été donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés. » (Act. 4 8-12)

Cette phrase est capitale et le pape François devrait bien la méditer, lui qui aujourd’hui dans ses voyages auprès des puissances musulmanes (Février et mars 2019) ne craint pas d’écrire et de signer avec son « homologue musulman »: Le pluralisme et les diversités de religion, de couleur, de sexe, de race et de langue sont une sage volonté divine, par laquelle Dieu a créé les êtres humains ». Non ! Son prédécesseur, d’heureuse mémoire, Saint Pierre, inspiré de l’Esprit Saint, lui, confesse la vérité devant les Juifs en disant : Ce Jésus est la pierre rejetée par vous de l’édifice, et qui est devenue la pierre angulaire. Et le salut n’est en aucun autre ; car il n’y a pas sous le ciel un autre nom qui ait été donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés. »(Act 4 12) Telle est la foi catholique que François, ici, ne professe pas. L’Eglise a la mission de conserver et répandre la foi catholique. Notre-Seigneur a dit en effet aux Apôtres : « Allez par le monde entier, prêchez l’Evangile à toute créature. Qui croira et sera baptisé sera sauvé : mais qui ne croira pas, sera condamné» (Marc. 16, 15 et 16). Et l’Apôtre des Gentils rappelle : « Il n’y a qu’un seul Dieu, une seule foi, un seul baptême » (Eph. 4, 5).

C’est un dogme de foi proclamé par le IVème Concile du Latran sous Innocent III que « L’Eglise universelle des fidèles est une et en dehors d’elle absolument personne ne peut être sauvé ». Le principe “nulla salus extra Ecclesiam” n’exclut pas du salut ceux qui sont hors de l’Eglise du fait d’une erreur invincible, mais lui sont ordonnés au moins par un désir implicite. Mais ceux-là sont cependant privés de l’assurance de la grâce et des moyens ordinaires de l’obtenir. Cette vérité de foi a été confirmée, notamment, par  Grégoire XVI (Mirari Vos du 15 août 1832); Pie IX (Singulari quidem du 17 mars 1856 aux évêques autrichiens); Léon XIII (Satis cognitum du 29 juin 1896).

Pie XI, dans l’encyclique Mortalium animos du 6 janvier 1928, explique à son tour que dans le domaine de la foi, on ne peut arriver à une unité fraternelle comme dans le domaine politique. Subordonner la vérité de la foi à la fraternité revient à professer l’indifférentisme religieux, condamné de façon constante par le Magistère universel de l’Eglise.

« A Domino factum est istud et est mirabile in oculis nostris » « C’est le Seigneur qui a fait cela et c’est une chose merveilleuse à nos yeux »

En effet, nous l’avons dit, le salut ne peut venir que du Seigneur. Il en avait seul le pouvoir et la volonté et l’amour. C’est lui, le Seigneur Dieu qui l’a pensé et l’a annoncé et l’a réalisé en la plénitude des temps. Saint Paul est formel. Il écrit à Timothée : « Dieu notre Sauveur, veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité. Car il y a un seul Dieu ; et aussi un seul médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus fait homme, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous : c’est là un fait attesté en son temps, et c’est pour en témoigner, que j’ai été établi prédicateur et apôtre, — je dis la vérité, je ne mens pas, — docteur des nations dans la foi et la vérité. » (1  Timl 2 3-7). Voilà encore un texte que François aurait dû lire avant de signer son document…mais on pourrait en citer mille autres du même genre. Celui-ci, tiré de l’Epitre aux Colossiens de saint Paul : «De cette l’Eglise, j’en ai été fait ministre, en vue de la charge que Dieu m’a donnée auprès de vous, afin d’annoncer pleinement la parole de Dieu, le mystère caché aux siècles et aux générations passées, mais manifesté maintenant à ses saints, à qui Dieu a voulu faire connaître combien est grande pour les Gentils la gloire de ce mystère qui est le Christ, en qui vous avez l’espérance de la gloire. C’est lui que nous annonçons, avertissant tous les hommes, les instruisant en toute sagesse, afin que nous rendions tout homme parfait dans le Christ Jésus. C’est pour cela que je travaille, et que je lutte selon la force qu’il me donne, et qui agit en moi avec puissance ». (Col 1 25-27)

Voilà ce que le Pape François doit annoncer et qu’il ne fait pas.

Ou encore ce que Saint Paul enseigne aux Ephésiens : « C’est en lui que nous avons la rédemption acquise par son sang, la rémission des péchés, selon la richesse de sa grâce, que Dieu a répandue abondamment sur nous en toute sagesse et intelligence,  en nous faisant connaître le mystère de sa volonté, selon le libre dessein que s’était proposé sa bonté, pour le réaliser lorsque la plénitude des temps serait accomplie, à savoir, de réunir toutes choses en Jésus-Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre. » (Eph 1 7-8)

C’est clair. Et le pape trahit sa mission en ne prêchant pas le Christ, unique Sauveur en son Sang, dans l’amour du Père….

« Haec est dies quam fecit Dominus ; exultemus et laetemur in ea » «  Voici le jour que le Seigneur a fait ; passons le dans l’allégresse et dans la joie »

Haec dies quam fecit Dominus » « Voici le jour que le Seigneur a fait » c’est-à-dire voici l’œuvre rédemptrice que le Seigneur a fait, soyons dans l’allégresse et dans la joie. C’est bien normal. N’oublions pas qu’un saint triste est un triste saint. Oui ! Comment être dans la tristesse lorsque l’on  vit avec le Christ qui le principe de notre gloire !
« O Domine, salvum me fac, o Domine, bene prosperare : benedictus qui venit in nomine Domine » « O Seigneur, sauvez-moi. O Seigneur, faites-nous prospérer. Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur »

C’est une strophe pleine de confiance. Et de fait que craindre de Celui qui a opéré une telle Rédemption ?

Pleine de confiance mais aussi pleine de louange et d’action de grâce. Ce seront les sentiments qui domineront dans les dernières strophes.  Car son œuvre est lumière « benediximus vobis de domo Domini ; Deux Dominus et illuxit nobis » « Nous vous bénissons de la maison du Seigneur. Le Seigneur est Dieu et il a fait briller sur nous sa lumière ».

Mais le Christ est cette lumière. C’est ce que confesse saint Jean dans son Prologue : «  En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes, Et la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue ». ( Jn 1 4). C’est ce qui se passe aujourd’hui. Mais comment pourraient-ils le recevoir si le pape qui doit le prêcher, se tait sur son mystère ?

« Deus meus es tu et confitebor tibi : Deux meus es tu et exaltabo te » «  Vous êtes mon Dieu et je vous célébrerai. Vous êtes mon Dieu et je vous exalterai »

Si seulement le pape pouvait partager ses sentiments si nobles et si justes.

« Confitebor tibi quoniam exaudisti me et factus es mihi in salutem » « Je vous célébrerai parce que vous m’avez exaucé et que vous êtes fait mon salut »

« Confitemini Domino quoniam bonus ; quoniam in saeculum misericordia eius » «  Louez le Seigneur, parce qu’il est bon, parce que sa miséricorde est éternelle ».

 

 

 

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