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Commentaire des psaumes du Bréviaire Romain Ps 9D N° 11

publié dans couvent saint-paul le 28 novembre 2018


Commentaire des psaumes du bréviaire romain

Matines du dimanche

Psaume 9D

 

« Exurge, Domine Deus, exaltetur manus tua : ne obliviscaris pauperum »

« Levez-vous, Seigneur Dieu : que votre main s’élève : n’oubliez pas les pauvres »

Dans le psaume précédent, le psalmiste « a décrit, nous dit saint Thomas, avec précision, le processus de l’iniquité humaine » contre le Christ, le Fils de Dieu, lui faisant subir la Passion, contre toute justice. Nous l’avons vu. C’est bien ainsi.

Là, dans ce nouveau psaume, il implore le « secours divin » (Saint Thomas) contre une telle malice, et souhaite la venue  du Règne de la justice divine. « Exurge, Domine Deus, exaltetur manus tua », « Levez-vous, Seigneur Dieu : que votre main s’élève ». C’est comme un ordre, – ce sont du reste des verbes à l’impératif -,  que le psalmiste donne au Dieu tout Puissant: « Exurge ». Il semble réclamer de Dieu une action vive, virulente, une action puissante. C’est pourquoi il ajoute : « élevez votre main », i.e. exercez votre puissance contre l’impie. La main exprime toujours dans la Bible la notion de puissance. Il ne doute pas un instant de la toute-puissance Dieu. C’est sûr, il saura terrasser l’ennemi qui se lève contre le juste et la justice de Dieu.

Cette première strophe où le psalmiste prie Dieu d’exercer sa puissance pour la restauration de son règne de justice, me fait penser à la première encyclique de saint Pie X « E Supremi apostolatus » où devant la méchanceté des nations et leur apostasie, il en invoque, lui-aussi à la toute-puissance de Dieu et confesse avec certitude que Dieu demeure le plus fort : « Si grande est l’audace et si grande la rage avec lesquelles on se rue partout ã l’attaque de la religion, on bat en brèche les dogmes de la foi, on tend d’un effort obstiné à anéantir tout rapport de l’homme avec la Divinité ! En revanche, et c’est là, au dire de l’ Apôtre, le caractère propre de l’Antéchrist, l’homme, avec une témérité sans nom, a usurpé la place du Créateur en s’élevant « au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu. C’est à tel point que, impuissant à éteindre complètement en soi la notion, de Dieu, il secoue cependant le joug de sa majesté, et se dédie à lui-même le monde visible en guise de temple, où il prétend recevoir les adorations de ses semblables. Il siège dans le temple de Dieu, où il se montre comme s’il était Dieu lui-même » (9).

Quelle sera l’issue de ce combat livré à Dieu par de faibles mortels, nul esprit sensé ne le peut mettre en doute. Il est loisible assurément, à l’homme qui veut abuser de sa liberté, de violer les droits et l’autorité suprême du Créateur; mais au Créateur reste toujours la victoire. Et ce n’est pas encore assez dire : la ruine plane de plus près sur l’homme justement quand il se dresse plus audacieux dans l’espoir du triomphe. C’est de quoi Dieu lui-même nous avertit dans les Saintes Ecritures. « Il ferme les yeux », disent-elles, « sur les péchés des hommes » (10), comme oublieux de sa puissance et de sa majesté; mais bientôt, après ce semblant de recul, « se réveillant ainsi qu’un homme dont l’ivresse a grandi la force » (11), « il brise la tête de ses ennemis » (12), afin que tous sachent que « le roi de toute la terre, c’est Dieu » (13), « et que les peuples comprennent qu’ils ne sont que des hommes » (14).

« Exurge, Domine Deus, exaltetur manus tua », « Levez-vous, Seigneur Dieu : que votre main s’élève ».

« Propter quid irritavit impius Deum ? dixit enim in corde suo : non requiret »

« Pourquoi l’impie a-t-il irrité Dieu ? C’est qu’il a dit en son cœur : il ne s’en souviendra pas ».

L’homme, dans sa révolte contre Dieu, est grandement téméraire. Il use et abuse de son propre pouvoir qui, pourtant, lui vient de Dieu et de nul autre. Il méprise Dieu et son autorité. Parce que Dieu est longanime et n’urge pas sa sanction par miséricorde, il croit que Dieu ne se souvient pas de ses forfaitures. Et c’est en cela, peut-être, que l’homme irrite Dieu.

« Vides quoniam tu laborem et dolorem consideras : ut tradas eos in manus tuas »

« Vous le voyez ; car vous considérez la peine et la douleur, pour les livrer entre vos mains »

« Tibi derelictus est pauper : orphano tu eris adjutor »

« C’est à vous qu’a été laissé le soin du pauvre ; vous serez le protecteur de l’orphelin ».

Notre Seigneur l’a affirmé aussi à sa manière, dans le Nouveau Testament lorsqu’il a enseigné les béatitudes : « Jésus, voyant cette foule, monta sur la montagne, et lorsqu’il se fut assis, ses disciples s’approchèrent de lui. Alors, ouvrant sa bouche, il se mit à les enseigner, en disant :
Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux !
Heureux ceux qui sont doux, car ils posséderont la terre !

Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés !

Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés !

Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde !

Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu !

Heureux les pacifiques, car ils seront appelés enfants de Dieu !

Heureux ceux qui souffrent persécution pour la justice, car le royaume des cieux est à eux !

Heureux êtes-vous, lorsqu’on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.  Réjouissez-vous et soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux : c’est ainsi qu’ils ont persécuté les prophètes qui ont été avant vous » (Mt 5 1-12).

Cela éclatera au grand jour lors du jugement général. Le jugement en effet a été remis par Dieu à Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est Lui le juge souverain. C’est affirmé très clairement dans l’Evangile de Saint Jean en son chapitre 5 : « Le Père même ne juge personne, mais il a donné au Fils le jugement tout entier,
afin que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père. Celui qui n’honore pas le Fils n’honore pas le Père qui l’a envoyé. En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui écoute ma parole et croit à celui qui m’a envoyé a la vie éternelle, et n’encourt point la condamnation, mais il est passé de la mort à la vie. En vérité, en vérité, je vous le dis, l’heure vient, et elle est déjà venue, où les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui l’auront entendue vivront. Car, comme le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils d’avoir la vie en lui-même ;  et il lui a aussi donné le pouvoir de juger, parce qu’il est Fils de l’homme. Ne vous en étonnez pas ; car l’heure vient où tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix. Et ils en sortiront, ceux qui auront fait le bien, pour une résurrection de vie ; ceux qui auront fait le mal, pour une résurrection de condamnation. Je ne puis rien faire de moi-même. Selon que j’entends, je juge ; et mon jugement est juste, parce que je ne cherche pas ma propre volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé.
(Jun 5 22-30)

Ô ! Que ces paroles sont consolantes pour ceux qui, ici-bas, auront fait le bien au milieu de la contradiction et de l’opposition des méchants et qui auront suivi la nouvelle législation enseignée par NSJC. Un jour le jugement sera porté par le Fils de l’homme. Ceux qui auront fait le bien connaitront la vie éternelle : « ceux qui auront fait le bien, pour une résurrection de vie ». C’est pourquoi le psalmiste dit juste  lorsqu’il dit : «  A lui a été laissé le soin du pauvre », « Tibi derelictus est pauper », ou encore, il sera « le soutien, le secours, l’aide de l’orphelin »: « orphano tu eris adjutor ».

Et de faite, Jésus le laisse entendre dans saint Matthieu lorsqu’il parle du jugement final..  : « Lorsque le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, il s’assiéra sur le trône de sa gloire. Et, toutes les nations étant rassemblées devant lui, il séparera les uns d’avec les autres, comme le pasteur sépare les brebis d’avec les boucs. Et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche. Alors le Roi dira à ceux qui sont à sa droite : Venez, les bénis de mon Père : prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès l’origine du monde. Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli ; nu, et vous m’avez vêtu ; malade, et vous m’avez visité ; en prison, et vous êtes venus à moi.
Les justes lui répondront : Seigneur, quand vous avons-nous vu avoir faim, et vous avons-nous donné à manger ; avoir soif, et vous avons-nous donné à boire ? Quand vous avons-nous vu étranger, et vous avons-nous recueilli ; nu, et vous avons-nous vêtu ? Quand vous avons-nous vu malade ou en prison, et sommes-nous venus à vous ?
Et le Roi leur répondra : En vérité, je vous le dis, toutes les fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.

S’adressant ensuite à ceux qui seront à sa gauche, il dira : Retirez-vous de moi, maudits, allez au feu éternel, qui a été préparé pour le diable et ses anges. Car j’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’ai eu soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ; j’étais étranger, et vous ne m’avez pas recueilli ; nu, et vous ne m’avez pas vêtu ; malade et en prison, et vous ne m’avez pas visité.
Alors eux aussi lui diront : Seigneur, quand vous avons-nous vu avoir faim ou soif, ou être étranger, ou nu, ou malade, ou en prison, et ne vous avons-nous pas assisté ?
Et il leur répondra : En vérité, je vous le dis, chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait.
Et ceux-ci s’en iront à l’éternel supplice, et les justes à la vie éternelle. »
(Mt 25 31-46)

Vraiment le Seigneur est le soutien du pauvre : « Tibi derelictus est pauper », le soutien de l’orphelin : « orphano tu eris adjutor ».

Et c’est pourquoi le psalmiste dit encore vrai lorsqu’il laisse entendre  que « le Seigneur brisera le bras du pécheur et du méchant »: « Contere brachium peccatoris et maligni » : « Et ceux-ci s’en iront à l’éternel supplice ». Le psalmiste dit : « Ils chercheront leur péché et ils  ne le trouveront pas ». Et le Christ, Souverain Juge, répond comme en écho : « Seigneur, quand vous avons-nous vu avoir faim ou soif, ou être étranger, ou nu, ou malade, ou en prison, et ne vous avons-nous pas assisté ? » : « quaeretur peccatum illius et non invenietur ».

Après la lecture de ce passage de l’Ecriture, on comprend combien est juste la remarque du psalmiste, qui affirme : « Dominus regnabit in aeternum et in saeculum saeculi ; peribitis Gentes de terra illius »

« Le Seigneur règnera éternellement et dans les siècles des siècles : et vous nations vous disparaitrez de sa terre ». « De terra illius », « de sa terre », i.e. de son Ciel, de la vie éternelle. De son règne de Gloire.

Tant il est  vrai, nous venons de le voir, que le Seigneur ne reste pas insensible à la prière du juste.

« Desiderium pauperum exauduvit Dominus, praeparationem cordis eorum audivit auris tua

« Le Seigneur a exaucé le désir des pauvres ; votre oreille a entendu la prière de leur cœur ».

Et c’est ainsi qu’il rendra justice à « l’orphelin et à l’opprimé ».

Ainsi, il est de foi que toute justice sera rendue à la fin des temps, au jugement final.

C’est, du reste, un argument que nous donne saint Thomas pour justifier le Jugement dernier, en plus du jugement particulier. Il est merveilleusement résumé par Jean de saint Thomas, son disciple, dans le catéchisme du Concile de Trente : « Une autre raison, – c’est la troisième raison – c’est que souvent la réputation des bons est attaquée, pendant que les méchants reçoivent les louanges dues à l’innocence. La Justice divine veut que les bons recouvrent, dans une assemblée générale de tous les hommes, et par un jugement solennel, l’estime qu’ils méritent, et qui leur a été injustement ravie ici-bas. –Il est le soutien des pauvres et des orphelins…comme le dit le psalmiste –

Notre auteur poursuit : « comme  sur cette terre, l’adversité et la prospérité, sont presque indifféremment le partage des bons et des méchants, il fallait prouver que la Sagesse et la Justice infinie de Dieu conduisent et gouvernent toutes choses.
Or ce n’était pas assez qu’il y eût dans l’autre monde des récompenses pour les bons et des châtiments pour les méchants, ces récompenses et ces châtiments devaient être décernés dans un Jugement publie et général. C’était le moyen de les faire connaître à tous d’une manière très éclatante, et d’obliger tous les hommes à rendre à la Justice et à la Providence de Dieu les louanges qu’elle mérite. N’avait-on pas vu plus d’une fois les justes eux-mêmes, pendant leur séjour sur cette terre, se plaindre injustement de cette Providence, lorsque les méchants auprès d’eux vivaient au sein de l’opulence et des honneurs ? – C’est pourquoi le psalmiste crie «Exurge Domine, exaltetur manus tua ». – Mes pieds ont chancelé, disait le Prophète David lui-même, mes pas se sont presque détournés de la voie, parce que j’ai vu avec jalousie et avec regret la paix des pécheurs. Voilà, dit-il un peu plus loin, voilà que les pécheurs et les heureux du siècle ont acquis les richesses, et j’ai dit: C’est donc en vain que j’ai gardé mon cœur pur et que j’ai conservé mes mains innocentes, puisque je suis frappé de plaies tout le jour, et que je suis châtié dès le matin. Et cette plainte, plusieurs autres l’ont fait entendre comme lui. Il fallait donc de toute nécessité un Jugement général, pour que les hommes ne disent pas: Dieu se promène dans le ciel, sans se soucier des choses de la terre. C’est donc avec raison que l’on a placé cette Vérité au nombre des douze Articles de notre Foi, pour affermir la croyance de ceux qui auraient pu douter de la Justice et de la Providence de Dieu.
D’ailleurs, il était souverainement utile de proposer ce Jugement de Dieu aux bons et aux méchants, pour consoler les uns et effrayer les autres, pour empêcher les premiers de se décourager en leur faisant connaître la Justice de Dieu, et pour détourner les seconds du mal par la crainte des éternels supplices.
Aussi Jésus-Christ, notre Dieu et Sauveur, en parlant du dernier jour, a-t-il déclaré Lui-même qu’il y aurait un Jugement général. Il en a marqué les signes avant-coureurs, afin qu’en les voyant arriver, il nous fût possible de connaître que la fin du monde est proche. Puis au moment même où Il montait au ciel, il envoya des Anges consoler par ces paroles ses Apôtres attristés:   Ce Jésus qui vient de vous quitter, et de s’élever dans le ciel, reviendra un jour de la même manière que vous L’avez vu y monter ». Et cette fois dans la gloire.

A la lumière de ce rappel doctrinal sur le jugement général, et plus particulièrement, de  ces phrases : «  il était souverainement utile de proposer ce Jugement de Dieu aux bons et aux méchants, pour consoler les uns et effrayer les autres, pour empêcher les premiers de se décourager en leur faisant connaître la Justice de Dieu, et pour détourner les seconds du mal par la crainte des éternels supplices »,  on comprend combien est juste cette réflexion final du psalmiste « afin que l’homme n’entreprenne plus de s’élever sur la terre » « ut non apponat ultra magnificare se homo super terram ». Comment l’homme pourrait-il en effet s’enorgueillir alors qu’il sait que sa vie sera jugée par NSJC en gloire ? Je suis stupéfait de voir avec quelle facilité l’homme contemporain oublie ses destinées éternelles.

Judicare pupillo et humili, ut non apponat ultra magnificare se homo superr terram »

« Pour rendre justice à l’orphelin et à l’opprimé, afin que l’homme n’entreprenne plus de s’élever sur la terre ».

 

 

 

 

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