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Entraide et Tradition

« Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ».

publié dans couvent saint-paul le 29 janvier 2011


Quatrième dimanche après l’Epiphanie
« Domine, salva nos , perimus »
« Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ».

Quelle belle supplique, MBCF, dans la bouche des disciples : « Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ». La mer est agitée. Les disciples sont inquiets. Plus que cela, ils sont même « effrayés ». NSJC le leur reprochera : « Pourquoi êtes-vous effrayés ». Ils s’approchent du Seigneur endormi et l’éveillèrent. On a même l’impression qu’ils sont sur le point de secouer le Maître « Ils lui dirent « Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ».

« Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ».
Faisons de cette supplique, de cette prière, MBCF, l’objet de notre méditation dominicale.

« Seigneur »…Oh quelle merveilleuse apostrophe : « Seigneur ». Nul ne peut prononcer ce mot « Seigneur » sans la foi, sans la foi en la divinité de celui qu’on invoque. En effet que signifie ce mot « Seigneur » ? Il n’est pas seulement un titre royal, mais c’est un titre divin. On l’adresse à Dieu même.
Sans m’arrêter à l’Ancien Testament où l’expression est mille fois employée pour signifier la Seigneurie du Dieu tout puissant, du Dieu d’Israël, j’arrêterai ma réflexion sur le Nouveau Testament.

Cette expression « Dominus » est coutumière dans la liturgie de l’Eglise. En elle, l’Eglise adresse toutes ses prières à Dieu le Père par Jésus-Christ « Notre Seigneur ». Voyez en plus les prières de l’Offertoire. Sans cesse, elles font référence à « Notre Seigneur ». Ainsi dès la deuxième prière de l’Offertoire : « Accordez-nous …d’avoir part à la divinité de Celui qui a daigné revêtir notre humanité, Jésus-Christ, votre Fils « Notre Seigneur », qui étant Dieu vit et règne avec vous en l’unité du Sain t Esprit… », ou encore la troisième prière : « Nous vous offrons, « Seigneur », le Calice de notre rédemption… ».

Ce titre est attribué dès l’origine du Christianisme à Jesus-Christ. Saint Paul est très clair. Il attribue dans son Epître aux Romains cette « seigneurie » au Christ Jésus. « Jésus est Seigneur », dit-il. Voilà la foi de l’Eglise qui, par les Apôtres, se transmettra d’age en age. Et l’on dira toujours : « Notre Seigneur » pour désigner le Christ Jésus : « Notre Seigneur Jésus-Christ ». Il faut, du reste, qu’il en soit ainsi. C’est une affirmation de sa divinité. Il n’est pas seulement « Jésus ». Il n’est pas seulement « Christ », Il est « Notre Seigneur Jésus-Christ ». Voilà la plénitude de son nom. Il est « Sauveur ». Il est « Roi », Il est l’oint du Seigneur, Il est prophète, Il est prêtre. Il est Dieu. Voilà ce qui est dit en plénitude dans l’expression : « Notre Seigneur Jésus-Christ »

C’est en effet l’acclamation de l’apôtre Saint Thomas après la résurrection de Jésus d’entre les morts. Il ne veut croire à la résurrection du Christ, sans avoir vu les plaies du Crucifié, mieux encore sans avoir mis préalablement ses doigts dans ses plaies, ses mains dans son coté transpercé . Alors toutes portes fermées, Jésus apparaît au milieu d’eux. Thomas, cette fois, est présent. Sans attendre, Jésus s’approche de lui, lui dit de mettre ses mains dans ses plaies, dans son côté. Alors confondu et émerveillé, saint Thomas s’écrie : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Et Jésus de lui dire de n’être plus incrédule mais croyant. Acceptant enfin la résurrection, Thomas confesse la divinité de Jésus: « Mon Seigneur et mon Dieu ». Tel est le sens de son acclamation. Je confesse la divinité de Jésus. Il est bien « Seigneur ». Il est bien le Maître de tout. Il est le tout puissant. Il est « Seigneur ».

Saint Luc utilise habituellement ce mot « Seigneur » pour désigner le Christ Jésus. Alors que Jésus arrive à la porte de Naïm. Il voit sortir un cortège funèbre. Vous connaissez la scène. C’est une veuve qui n’avait qu’un fils qu’elle venait de perdre. Le peuple par sympathie accompagne la veuve pleine de chagrin. Le cortège est immense. C’est alors que Jésus avec ses propres disciples, arrive. Saint Luc ici nomme Jésus du titre de « Seigneur » : « Le Seigneur l’ayant vu, fut touché de compassion pour elle». Il fit arrêter le cortège funèbre, toucha le cercueil et il dit : « Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi ». Aussitôt le mort se leva sur son séant et commença à parler et Jésus le remit à sa mère. Tous furent saisis de crainte et glorifiaient Dieu, et disaient « un grand prophète a paru parmi nous et Dieu a visité son peuple ». De nouveau, vous le voyez, le mot « Seigneur » est mis en relation, par le truchement du miracle, avec la notion de divinité. « Mon seigneur et mon Dieu »

Saint Luc ou mieux encore les amis de Jésus, la famille de Lazare, Marthe et Marie avaient l’habitude d’appeler Jésus, « Seigneur », voire même « Maître ».
Alors que Marie Madeleine est aux pieds de Jésus à contempler et méditer ses paroles, Marthe, tout affairée au ménage et au repas, se tourne vers Jésus et lui dit : « Seigneur », ne vous mettez-vous pas en peine que ma sœur me laisse servir seule ? Dites lui donc de m’aider »… « Marthe Marthe, vous vous inquiétez et vous agitez pour beaucoup de choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la bonne part qui ne lui sera pas ôtée ». Saint Luc, lui-même dans ce récit parle de Jésus comme « Seigneur ». « Marie était assise aux pieds du Seigneur » et de nouveau il écrit : « Le Seigneur lui répondit… »

Saint Jean, le disciple que Jésus aimé, utilise lui aussi également ce mot de « Seigneur » en relation avec la divinité. On le trouve, entre autres, lors du récit de l’apparition de Jésus à ses disciples près de la mer de Tibériade. Les disciples vont à la pêche. Toute la nuit, ils pèchent. Mais sans résultat. Le matin venu, Jésus se trouve sur la berge. De la berge, Il leur crie de jeter les filets sur la droite de la barque et « vous trouverez du poisson ». Ce qu’ils firent. La pèche fut miraculeuse. Alors le disciple que Jésus aimait dit à Pierre : « C’est le Seigneur ». A ces mots, Pierre se jette à l’eau, il était nu. La barque est conduite sur la berge. Jésus qui avait allumé un feu de braise, demande d’apporter des poissons pris. « Venez et mangez ». Et aucun de disciples n’osaient demander : « Qui êtes-vous parce qu’ils savaient que c’était le « Seigneur ».

C’est alors que Jésus prit à part Pierre. Il voulait lui faire réparer son propre reniement lors de la Passion. Jésus lui pose par trois fois la question « Pierre m’aimes tu plus que ceux-la ? Et Pierre de répondre : « Seigneur », vous savez que je vous aime ». Alors « paie mes agneaux », lui dit Jésus. « Pierre m’aimes-tu plus que ceux-là » « Oui « Seigneur » vous savez bien que je vous aime ». Alors « Paie mes agneaux ». « Pierre m’aimes-tu » ? Pierre fut contrarié de cette triple interrogation et lui dit : « Seigneur », vous connaissez toutes choses, vous savez bien que je vous aime ? « Alors « paie mes brebis ».
Là encore le mot « Seigneur » est mis en relation avec la « divinité » : « Vous connaissez toutes choses ».

Je conclue.

« Jésus est Seigneur ». Ainsi le confesse tous les disciples. Ainsi le confesse la foi de l’Eglise…Il est « le Seigneur qui vient ». Aussi, l’Eglise gardera-t-elle longtemps dans sa prière l’invocation primitive araméenne : « Marana tha », i.e ; « Viens Seigneur » Jésus. C’est même la conclusion de la première lettre de saint Paul aux Corinthiens: « je vous salue de ma propre main, moi Paul. Si quelqu’un n’aime pas le Seigneur qu’il soit anathème ! Marana tha », (Le seigneur vient) (1 Cor 16 22)
C’est aussi la conclusion de l’Apocalypse de saint Jean : « « Celui qui atteste ces choses, dit : « Oui, je viens bientôt. Amen ! Venez Seigneur Jésus » « Veni Domine Jésu »

Et Jésus lui-même avait mis ses disciples sur la voie de cette appellation de « seigneurie ». Souvenez-vous de la scène dans l’Evangile de Saint Mathieu : « Les Pharisiens étant assemblés, Jésus leur fit cette question : « Que vous semble du Christ ? De qui est-il le fils ? Ils lui répondirent : de «David ». (C’est l’enseignement même du Psaume 110 1). Comment donc, leur dit-il, David inspiré d’en haut, l’appelle-t-il « son Seigneur », en disant : « Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis l’escabeau de tes pieds ? Si donc David l’appelle « son Seigneur », comment est-il son fils ? Nul ne pouvait lui rien répondre, et, depuis ce jour, personne n’osa plus l’interroger » (Math 22 41-46)
Il est le fils de David selon la nature humaine. Le Christ en effet est de la descendance de David. Mais selon sa divinité, Jésus est « son Seigneur » et Maître.

Saint Paul va utiliser ce psaume 110 ici commenté par NSJC, pour montrer tout le sens du mot « Seigneur ». C’est dans son fameux passage de la Iere Epître aux Corenthiens : « Puis ce sera la fin, quand il (Jésus) remettra le royaume à Dieu et au Père, après avoir anéanti toute principauté, toute puissance et toute force. Car il faut qu’il règne :  » jusqu’à ce qu’il ait mis tous ses ennemis sous ses pieds.  » Le dernier ennemi qui sera détruit, c’est la mort. Car Dieu  » a tout mis sous ses pieds.  » Mais lorsque l’Ecriture dit que tout lui a été soumis, il est évident que celui-là est excepté, qui lui a soumis toutes choses. Et lorsque tout lui aura été soumis, alors le Fils lui-même fera hommage à celui qui lui aura soumis toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous » (1 Cor 15 24-28).

Qu’est-ce à dire, MBCF, sinon que Saint Paul confesse ici, s’inspirant du Psaume 110 de David expliqué plus haut par Jésus lui-même, que Jésus est le Seigneur, le Maître de toutes choses. Il est le Seigneur de tous les hommes, de tous ses ennemis, de toutes les Puissances, de la mort elle-même. Tout l’univers, cieux, terre, enfers, tout l’univers proclame, proclamera que Jésus est « Seigneur », tout lui est soumis et lui sera soumis. Il est le seul et vrai « Kyrios », le seul « Seigneur et Maître », le seul Dieu, oui, le seul Kyrios. Et voilà la pleine signification de notre « Kyrie Eleison » par trois fois répété, en notre messe : « Seigneur, ayez pitié de nous ». « Kyrie eleison ». Mais qui ne voit que ce « Kyrie eleison » est semblable à ce cri des apôtres : « Domine, salva nos », « Seigneur, sauvez nous ». « Seigneur, ayez pitié de nous ». C’est le même cri. C’est la même supplique avec la même intelligence du mystère du Christ, Sauveur parce que tout à la fois homme et Dieu, parce que Seigneur.

Alors vous voyez combien est important ce récit du miracle de la mer apaisée, du vent calmé par la seule parole de Jésus. Là, il manifeste devant ses disciple sa Seigneurie sur toutes choses, sur tous les éléments. Il est homme, certes. Mais Il est Dieu. Tout lui obéit. Tout est en sa dépendance. Tout est en sa domination. Tout est en son pouvoir : « Il commanda au vent et à la mer et il se fit un grand calme ». Par sa propre puissance, il apaise les éléments agités. Commander aux flots est la manifestation de la puissance divine.

MBCF, aimons ce mot « Domine ». Nous le répétons avant de venir à la Sainte Table : « Domine, non sum dignus… » « Seigneur, je ne suis pas digne, mais dites seulement une parole et mon âme serai guéri ». Ce sont bien des paroles de salut ! Confessons par ce mot, « Domine », notre foi en la divinité de notre Maître. Celui que nous voulons servir est Dieu, notre Dieu. Il a toute puissance. Ne cherchons pas à diminuer sa Seigneurie sur nous, son domaine sur nous. Au contraire, protestons de notre soumission, de notre adoration. Nous savons que nous sommes sur la terre « pour le servir et l’honorer et par ce moyen sauver notre âme ». Que notre service soit total, plénier. Ne retranchons rien de ce souverain domaine de Dieu. Sa souveraineté est plénière et totale. Elle est publique. Nous devons la recevoir telle, plénière, totale et publique. N’oublions que l’on ne peut pas servir deux maîtres : « Dieu et mamon » ; « Dieu et le monde ». C’est, du reste, alors que nous servirons pleinement ce « Seigneur et Maître » que nous trouverons la joie. Elle est inhérente à cette confession, à ce service divin. Je dis bien que la « joie est inhérente à cette confession et à ce service divin ». Souvenez-vous du bon larron. Lui aussi sut invoquer sur le bois de la Croix, ce « Seigneur ». Alors qu’il agonisait, il s’adressa à Jésus et en quel terme ? Il confessa sa « Seigneurie ». Souvenez du récit en saint Luc : « Or, l’un des malfaiteurs, mis en croix l’injuriait, disant :  » N’es-tu pas le Christ? Sauve-toi toi-même et sauve-nous !  » Mais l’autre le reprenait, disant :  » Tu n’as pas même la crainte de Dieu, toi qui subis la même condamnation ! Pour nous, c’est justice, car nous recevons ce que méritent nos crimes; mais lui n’a rien fait de mal.  » Et il dit à Jésus:  » Seigneur, souvenez-vous de moi, quand vous viendrez avec votre royauté.  » «Domine, Memento mei, cum veneris in regnum tuum » Et Jésus lui dit :  » Je te le dis en vérité, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis.  »
Ne croyez-vous pas que ces paroles du bon larron « Seigneur » sont des paroles de vie, de joie parce qu’elles ont causé le salut. « Il n’y a pas sous le ciel d’autre nom par lequel nous puissions être sauvés ». Et le bon larron s’endormit dans la joie de son « Seigneur et Maître » pour la vie éternelle.
« Domine, salva nos, perimus ».

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